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Billet de blog 23 décembre 2012

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Assistants d’éducation : comment les appelle-t-on?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

C’est la loi 2003-400 qui, le 23 avril 2003, a créé les assistants d’éducation, autorisant les établissements scolaires à les recruter pour remplacer progressivement les surveillants d’externat et maîtres d’internat créés par la loi du 3 avril 1937.

Dix ans après, dans les collèges et lycées de France, il n’y a plus de surveillants d’externat ou de maîtres d’internat, majoritairement remplacés par des assistants d’éducation ou, dans une mesure moindre, par des personnels en contrat aidé.

Pourtant, dans les établissements scolaires, les personnels, les élèves, les parents continuent de parler des « surveillants », et les assistants d’éducation eux-mêmes se présentent comme "surveillants".

Cette première constatation en dit long sur l’écart entre une décision politique et son incarnation dans la réalité et dans les représentations du public et des personnels concernés eux-mêmes.  Les modèles politiques d’éducation sont plus fortement enracinés qu’on ne le croit, et le modèle français n’a jamais considéré l’éducation comme mission première de l’école, chargée de l’instruction. A l’école, il y a des élèves, et non des enfants. Les élèves sont instruits par leurs maîtres et les enfants éduqués par leur famille. Dans ce modèle –là, il y a place –subalterne, cela va de soi- pour des surveillants chargés du maintien de l’ordre et de la discipline des élèves, mais point pour des assistants d’éducation.

Il existe bien, depuis 1970, des conseillers d’éducation et conseillers principaux d’éducation (CPE), qui ont succédé aux surveillants généraux. On ne  parle plus de « surgé » dans les établissements, mais pour autant, la représentation que l’on se fait des CPE reprend pour l’essentiel celle des surveillants généraux : pour bien des parents, élèves et personnels, un CPE est d’abord et avant tout, si ce n’est exclusivement, responsable de l’assiduité des élèves et de leur respect de la discipline.

A ce premier constat s’en ajoute un second, que peut faire tout observateur de la vie des établissements scolaires. Quand, dans l’établissement scolaire, on parle d’un personnel, on parle tout naturellement de « Madame X » ou « Monsieur Y ». Cette règle de civilité commune s’applique à tous, sauf aux assistants d’éducation, qui n’ont pratiquement jamais de nom, mai sont appelés Ahmed, Claire, Kevin, Sonia, que ce soit à l’oral, ou dans les documents qui présentent l’organisation du service de la vie scolaire.

On touche là à une question de fond. Ces jeunes personnels sont symboliquement considérés comme mineurs, et cela s’exprime aussi dans le fait, par exemple, que les assistants d’éducation référents d’une classe ne sont pas automatiquement conviés à participer au conseil de classe, ni même parfois à y assister. Dans certains établissements, il ne va pas de soi que ceux que l’on considère comme des « surveillants » et des mineurs soient perçus par des personnels enseignants comme susceptibles d’apporter une contribution de qualité à l’aide aux devoirs des élèves. L’idée, quand on est professeur,  de se concerter  avec le CPE à propos du suivi des élèves a progressé dans les esprits, celle de travailler avec les assistants d’éducation n’est pas encore acquise partout.

Il aura fallu attendre 2011 pour qu’un ouvrage soit exclusivement consacré aux assistants d’éducation et à leur contribution au projet éducatif de l’établissement[1].

On ne s’étonnera pas qu’à sa manière, l’édition 2013 du dictionnaire Petit Robert confirme ces constats[2]. Elle persiste en effet à manifester l’inexistence, dans la langue couramment parlée et écrite, des assistants d’éducation, qui ne sont pas mentionnés à l’article "assistant", alors qu’y figurent "assistante de direction, assistant commercial, technique, dentaire, assistante sociale, assistante maternelle", et, pour l’enseignement supérieur, "assistant d’économie, maître assistant", et, ère numérique oblige, "assistant personnel, numérique, assistant électronique".

Excellente fin  d’année à tous, et rendez-vous en janvier 2013 pour de nouveaux billets.


[1] Barbier, Christophe, Assistants d’éducation, quelle contribution au projet éducatif de l’établissement, SCEREN, 2011

[2] Voir à ce sujet notre billet du 22 février 2012 http://blogs.mediapart.fr/blog/jean-pierre-veran/220212/l-edition-2012-des-dictionnaires-une-ronde-instructive

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