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Billet de blog 29 octobre 2014

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Terreur d'Etat

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je viens de traverser ma ville, et plusieurs bâtiments sont balafrés de graffitis, comme mon esprit happé par des bouffés de rage et d'abattements. Ces graffitis appellent à manifester jeudi soir, et à en découdre avec la police, en la mémoire de Rémi. Je ne sais pas si ce sont des gens révoltés par ce décès, ou si c'est encore une manigance policière pour faire dégénérer des rassemblements en sa mémoire. Je sais juste que, moi aussi, j'ai les boules, je me dis qu'un gamin de 20 piges vient de laisser sa vie juste parce qu'il est allé manifester son intérêt pour la cause de la Nature. Nous savons quel genre d'activiste était Rémi, un genre qui aime à regarder les arbres et les oiseaux, à manifester pacifiquement, et qui une fois au Testet s'est retrouvé sous le déferlement de la rage policière, organisée par l’État. Il est probable que cette violence l'a poussé à réagir, à tenter de se défendre, à se battre peut-être, puis ce fut une grenade, l'explosion, et la mort soudaine.

Je sais juste que ce qui s'est passé ressemble plus à un assassinat qu'à un accident.

Qui peut croire à la thèse d'un accident ? Des policiers qui sont placés sans avoir rien à défendre, ni peronnes ni biens, et qui font usage d'une force brutale face à des manifestants pacifistes, puis qui, au final, balancent une grenade dans le tas. Mais ceci ne serait qu'un tragique accident, inexplicable, sans aucune raison, ce ne serait que le résultat d'un malheureux jeu de circonstance.

Pourtant, la raison est bien là et elle s'appelle raison d’État. Justement, le gouvernement, lui, nous estomaque par son assourdissant silence. Il doit certainement être trop occupé par les funérailles d'un roi du Pétrole, et plutôt que d'engager une enquête sur le champ pour faire toute la lumière, il se complaît à stigmatiser ceux qui trouvent cet acte intolérable.

A écouter cette valse là, le message est bien clair : quiconque tentera de s'opposer aux projets de l’exécutif, même les plus aberrants, contrevenant au droit et à l'intérêt commun, même pacifiquement, prend un risque énorme : celui de perdre la vie. C'est le retour de la terreur. Celle-là même qu'on nous vend comme étant l'apanage de groupuscules armés. D'ailleurs tout militant qui s'accroche est tendancieusement assimilé à cette catégorie. Ainsi a-t-on pu entendre dire, à la préfecture du Tarn, que des drapeaux de l’État islamistes flottaient chez les ZADistes du Testet.

Aujourd'hui, j'ai un peu honte. Pas tellement d’avoir voter Hollande, je crois que je me suis fait une raison maintenant. Non, j'ai honte de laisser les ZADistes du Testet, ceux de Notre Dame des Landes, ou bien encore les Faucheurs Volontaires d'OGM et les opposants à la ferme des milles vaches agir pour mes idées, sans que je n'agisse avec eux. Au fond de moi s'insinue cette peur qu'ils ont réussi à m'instiller, celle de risquer quelque chose si je participe à une manifestation publique, celle de risquer d'être traduit en justice, de prendre des coups. L'objectif du pouvoir politique est atteint : nous faire taire, tuer la révolte dans l’œuf. Il est encore atteint au Testet : la zone humide est en grande partie détruite. Les experts du Ministères de l’Écologie semblent prêts à le dire : ce barrage est contestable, l'argent de la communauté va être utilisé pour l'intérêt de quelques particuliers, mais il est trop tard pour revenir en arrière.

Je ne suis pas d'accord. Nous ne devons pas poursuivre des projets parce qu'on les a entamés, s'ils ne portent pas d'intérêt. Nous ne devons pas non plus laisser la rue aux imbéciles, et rester chez nous parce qu'il y a des risques de débordement. Nous ne devons pas laisser la mort de Rémi impunie, et lutter pour que toute la lumière et la justice soit faite.

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