Sur le contenu lui-même, il n’y a pas grand-chose à ajouter à ce qui a été dit précédemment, sinon que l’accent est mis cette fois sur la résistance à l’envahisseur et sur la lente reconquête, sans un mot toutefois pour la collaboration. On s’attarde ainsi longuement sur les 19 389 hommes et femmes de France qui ont sauvé des juifs en les cachant et en devenant de ce fait « Justes » après la guerre (« et les 42 millions d’autres français, » serait-on tenté d’interroger, « qu’ont-ils fait ? ») et on se contente de montrer des « Malgré nous » du front russe et des "femmes tondues" de la Libération, ce qui n’empêche pas les jugements de valeur qui sentent le lieu commun de la propagande : « Là encore, les anglais sont admirables de courage et de flegme », dit la voix off de Mathieu Kassovitz, ou encore « Hitler fait d’hypocrites obsèques nationales à Rommel après l’avoir poussé à se suicider ».
On aurait aimé en revanche un débat contradictoire d’historiens à l’issue du dernier épisode pour clôturer une série de 6 de 55 minutes chacun. Or, nous n’avons eu droit qu’à une brève interview des auteurs dressant un panégyrique de la télévision d’Etat pour son activité de mécénat dans le domaine de la conservation et de la reconstitution d’archives, puisque la production était de France 2 et le scénario de Jean-Louis Guillaud et Henri de Turenne, journalistes de télévision, sous l’œil bienveillant de Dominique Wolton, directeur de recherches au CNRS spécialiste des médias et de la communication politique, jouant ici le rôle du candide s’extasiant sur l’émotion accrue par la colorisation des films obtenue non par création pure mais à partir d’une authentique luminescence déjà perceptible dans le noir et blanc originel.
Comme il fallait s’y attendre, on en a donc été pour nos frais et il faudra se reporter à l’excellent article de François Ekchajzer pour avoir un avis un peu critique sur le sujet (1).
En effet, pour Dominique Wolton, le fait que 6,5 millions de téléspectateurs ont regardé l’émission prouve que la télévision d’Etat a bien joué son rôle pédagogique de rassembleur social en « nous donnant d’un coup le sentiment d’appartenance à une même humanité devant la banalisation du mal qu’on n’oubliera pas de sitôt». Quant à Isabelle Clarke et Daniel Costelle, les auteurs, ils se considèrent comme des « explorateurs de l’histoire », ayant retrouvé des images du monde entier grâce à l’effort financier de leur mécène dont 30 % étaient déjà colorisées (on comprend donc qu’elles provenaient de fonds américains au procédé Kodak ou allemands au procédé Agfa) et 70 % seulement en noir et blanc (d’autres provenances, comprend-on), ayant fait l’objet d’une restauration de la couleur, un travail complémentaire sur le son achevant de transformer le spectateur en acteur du conflit. Cet esprit collectionneur, digne des chasseurs de papillons, atteint son paroxysme quand, à la question de savoir comment l’épisode de Staline visitant des charniers à Katyn a pu être découvert, ils opposent un mutisme absolu en arguant du secret professionnel.
L’émission s’achève sur l’annonce d’une possibilité de retrouver la totalité des épisodes en achetant le coffret des trois DVD et le livre retraçant le scénario ou en se connectant au site de France 2 dédié à Apocalypse. Quant à l’histoire, elle continue sur la même chaîne, avec, sans transition, une fiction d’Oliver Hirschbiegel, intitulée La Chute, et retraçant les douze derniers jours d’Adolf Hitler, que Télérama qualifie de « Crépuscule des Odieux » (1).
Lincunable, 21 septembre 2009
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(1) « Les images d’archives peuvent-elles mentir ? » in Télérama n° 3114 du 16 septembre 2009.