Le ministère des Peshmergas (combattants kurdes) de la région autonome du Kurdistan a dénoncé les bombardements des “zones civiles” par l’aviation turque depuis mercredi, tout en s’engagent à exercer son droit de légitime défense en cas d'attaque contre la région kurde. Les kurdes de Turquie formeront demain un bouclier humain sur la frontière pour protester contre les bombardements.
« Avant tout, le bombardement des territoires du Kurdistan est illégitime » a affirmé Jabbar Yawar, le secrétaire général du ministère des Peshmergas, dans une interview accordée vendredi 19 aout à l’agence kurde Diha, basée en Turquie.
L’aviation et l’artillerie turque bombardent depuis 17 aout les zones sous contrôle du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), où se trouvent également des centaines de villages loin des positions de la guérilla.
LES ZONES DU PKK
Les zones du PKK s'étendent sur des centaines de kilomètres, entre la Turquie, l’Iran et l’Iraq, couvrant huit régions: Qandil, Metina, Zap, Xakurke, Xinere, Haftanin, Garê et Zagros. Les guérillas ne disposent pas de camps fixes et la plupart des combattants du PKK se trouvent à l’intérieur de la frontière turque.
La Turquie a lancé 25 opérations terrestres transfrontalières contre le PKK, dont la première en 1983 et la dernière en février 2008. Le but de chaque opération était la liquidation définitive du PKK, mais cette organisation armée, considérée comme un groupe « terroriste » par de nombreux pays, est sortie renforcée après chaque opération terrestre, gagnant la sympathie des millions de kurdes dans tous les partis du Kurdistan et en Europe.
352 OBJECTIFS BOMBARDES SELON L’ARMEE
Les avions turcs ont bombardé 28 objectifs et l'artillerie a pilonné 96 autres dans la région, lors des attaques menées jeudi, selon les autorités militaires turques, qui affirment faire « attention à la protection des civils ». L'armée turque avait annoncé avoir frappé mercredi soir 60 objectifs par les avions et 168 autres par l'artillerie.
BOMBARDEMENT DES VILLAGES KURDES
« Il y a plusieurs villages dans les zones bombardées et les habitants de ces villages sont des civils » a déclaré le haut responsable kurde. « Les attaques se soldent par la destruction de plusieurs maisons des villageois, tuent leurs bétails, causent des dégâts matériels dans les fermes et contraignent les habitants à quitter leurs maisons. »
DES VILAGOIS PRIVES D’ELECTRICITE
Selon des sources locales, les bombardements effectués 19 aout à 9h30 sur la région Qandil a provoqué le feu dans les fermes du village de Kozine, causant d’importants dégâts matériels et privant les habitants d’électricité. Lors des bombardements du 17 aout contre le village de Zargele, dans la région de Qandil, une maison avait été détruite.
Kwestan Ahmed, le responsable de la région Werte, toujours à Qandil, a affirmé que les maisons construites loin des villages par les habitants ont été la cible des attaques de l’aviation turque, cité par l’agence kurde Firat. « C'est de la cruauté » a-t-il dit, affirmant que les attaques ont causé d’importants dégâts dans les villages.
LE PROBLEME EST POLITIQUE ET NON MILITAIRE
Le secrétaire général du ministère des Peshmergas a averti que le gouvernement kurde s’engage à exercer son droit de légitime défense en cas d'attaque contre la région kurde. «En tant que gouvernement kurde, nous considérons ces attaques comme une violation des droits de nos citoyens. Nous estimons que ce problème ne sera jamais résolu par les attaques aériennes et de l’artillerie. Il s’agit d’un problème politique et au bout du compte il sera résolu par la voie de dialogue, selon le gouvernement fédéral du Kurdistan. »
BOUCLIER HUMAIN CONTRE LES BOMBARDEMENTS
Les kurdes de Turquie formeront samedi 20 aout un bouclier humain contre les bombardements, organisant une marche vers la frontière de la région autonome du Kurdistan. Il s’agit de quatrième action de bouclier humain depuis 2004. La marche débutera samedi à Hakkari et à Sirnak, deux villes frontalières.
PREPARATIFS MILITARES SUR LA FRONTIERE IRANIENNE
Par ailleurs, l’armée iranienne déploie de nouveaux renforts sur la frontière avec l’Irak, selon des sources kurdes. Le 16 juillet, le régime iranien avait lancé une opération d’envergure en coordination avec la Turquie en tout au long de la frontière sous prétexte de combattre le PJAK, Parti pour une vie libre au Kurdistan, une organisation armée et politique kurde qui réclame autonomie démocratique dans un système confédéral.
Des violents combats avaient eu lieu pendant environ trois semaines qui se sont soldé notamment par la mort de 3 généraux et 7 responsables militaires de haut rang dans les rangs de l’armée iranienne. PJAK avait affirmé avoir tué plus de 250 soldats, repoussant toutes les tentatives iraniennes de franchir la frontière dans la région de Qandil.
Au moins trois civils kurdes, dont un enfant de dix ans, avaient été tués par les bombardements iraniens sur les villages de Hajj Omran et Sidekan, dans la région autonome du Kurdistan irakien. Onze autres civils avaient été blessés, 35 villages endommagés et des centaines de personnes déplacées, selon les autorités kurdes.