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Billet de blog 23 octobre 2014

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Un bateau, une vigne, un olivier

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Bientôt, les touristes qui déferleront sur une Grèce au rabais dépasseront le nombre de ses habitants. Bientôt, acheter une maison dans ce pays permettra d’accéder à la citoyenneté grecque. Bientôt le « qui possède du pognon est grec » remplacera le fameux dicton antique « qui parle grec est grec ». Les fonds spéculatifs s’emparent des terres et des avenues dont l’âme marchande s’est éteinte, les Chinois des ports, les Allemands des usines, les Anglais et les Suisses des hôtels, les Qataris des aéroports, les aventuriers et autres arnaqueurs de ce qui reste. Les milliardaires grecs et les armateurs se paient - quant à eux - des banques dites en difficulté et sauvées par un Etat en faillite, les clubs de foot et les chaines de télévision. Cette harmonisation morbide aux dictats du marché, ce rapt de l’idée même de la grécité, ce viol collectif et impersonnel perpétré contre ce peuple font écho à un armateur poète - encore une espèce en voie d’extinction - qui écrivait :

…Et qu'à la fin tous trois ressemblent


À l'âme du nuage qui vogue


Au-dessus de la ville


De la nuée qui jubile et vibre et frémit


Dans les soupirs


Dans les secousses


De l'harmonisation du plaisir…


Un autre poète, prix Nobel, en des temps insoupçonnés - mais toujours aussi sombres -, disait : « Qu’est–ce la Grèce dans sa plus grande simplicité ? Un olivier, une vigne, un bateau. Il ne faudrait pas plus pour la reconstruire ».

Un long et pénible chemin attend ce peuple : l’apprentissage du refus des sirènes anthropophages bruxelloises, la volonté d’en fini avec le Procruste de la dette, l’initiation à une nouvelle odyssée, voyage semé d’embuscades et de coups de force des bailleurs, la volonté de dire non une fois encore et en payer le prix, et surtout, surtout la volonté d’en finir avec les récits destructeurs de l’uniformisation pour accoster, enfin, à Ithaque : un olivier, une vigne et un bateau. Mais qui osera - de ce peuple anéanti - d’affronter Cyclopes et Lestigones ?

Qui osera affronter les Chimères pour atteindre l’essentiel ?

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