N. Chomel (avatar)

N. Chomel

Abonné·e de Mediapart

29 Billets

0 Édition

Billet de blog 7 mars 2014

N. Chomel (avatar)

N. Chomel

Abonné·e de Mediapart

Carton rouge à l’ « Ayraultport » de Notre Dame des Landes

N. Chomel (avatar)

N. Chomel

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Samedi matin 22 février, deux autocars quittaient Laval avec une centaine de militants de la Mayenne partis rejoindre  la grande manifestation nantaise contre le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes. Déjà, sur la route le convoi des 520 tracteurs agricoles était bien visible et sur place on a compté plus de 50000 personnes.

Soutenu par l’Etat, le département de Loire Atlantique et la Région des Pays-de-la-Loire ce projet est un non sens économique et écologique et une insulte à la démocratie. L’argument majeur des promoteurs du projet est la saturation de l’actuel aéroport de Nantes Atlantique situé au sud de la capitale ligérienne, lequel enregistre entre 3 et 4 millions de voyageurs par an. Or, il semblerait que l’aéroport de Genève d’une taille assez semblable accueillerait, lui,  près de 17 millions de voyageurs sans que sa saturation ne soit évoquée. A y regarder de plus près c’est plutôt la capacité d’accès et de stationnement à l’aéroport de Nantes qui pose problème et cette « saturation » là pointe une spécificité bien française dans l’organisation des aéroports : la plupart ne sont accessibles qu’en voiture et en taxi (seuls Roissy, Orly et Lyon Saint-Exupéry sont desservis par une gare Sncf). Dans ce contexte, les parkings sont de véritables vaches à lait pour les gestionnaires d’aéroports et on comprend pourquoi ils s’opposent à la création de gares, ce qui est tout à fait possible dans le cas de Nantes Atlantique (Une voie ferrée existante passe devant l’aérogare). Cette « gestion » des aéroports étant de plus en plus concédée par les chambres de commerce et d’industrie à des grands groupes du BTP comme Vinci dans les cas des aéroports de Nantes et Saint-Nazaire (délégataire pour 55 ans), ceux-ci défendent bec et ongles leurs sources de profit. L’enjeu du projet de NDDL est donc bien une affaire de gros sous et de confusion entre l’intérêt général et les intérêts privés des actionnaires du géant bétonneur. Quand on nous répète à longueur de journaux et d’antennes que les finances publiques sont dans le rouge et qu’il faut réduire la dette, les chiffres du projet d’aéroport laissent songeurs : environ 560 millions d’euros de travaux sans compter les liaisons routières prévues financés pour une petite moitié par des subventions de l’Etat et des collectivités locales (Communes, Agglos et Régions Bretagne et PdlL), le reste par Vinci, dont 1/3 par les usagers (clients de Vinci) et 1/3 par des emprunts contractés par Vinci et cautionnés par les collectivités locales et 1/3 sur fond propres (avec une rémunération contractuelle de 12% l’an !). La pancarte brandie par les manifestants mayennais affichait « Pour une année 2014 sans grands projets inutiles » ; elle ne pouvait pas mieux dire. Ce projet d’aéroport est un triple scandale, économique d’abord et on a vu qu’il est inutile. C’est aussi un désastre écologique à la fois par le saccage du bocage nantais et de l’activité agricole qui s’y trouve, et parce qu’il s’inscrit dans l’anticipation d’une augmentation du trafic aérien dans une période marquée plutôt par la raréfaction des ressources pétrolières et la gravité du changement climatique.  Enfin, c’est une insulte à la démocratie car ce projet, construit dans la logique des « Partenariats Public Privé » revient à confier la gestion d’un espace public largement financé par la collectivité à un groupe privé dont les actionnaires vont tirer une rente pendant 55 ans, et ce sans aucun mandat clair confié par les citoyens. Toutes ces raisons expliquent que 56% de nos concitoyens soient opposés à ce projet pharaonique comme le révèle le récent sondage de l’IFOP

On peut se demander si ce projet est une affaire strictement nantaise ou s’il interpelle les citoyens qui se préparent à voter pour les élections municipales à Laval ou ailleurs. La réponse est simple. D’abord, les élections des 23 et 30 mars prochains ne sont pas, comme la doxa politico-militaire voudrait nous le faire croire, strictement locales puisque tous les électeurs sont appelés à s’exprimer le même jour. NDDL vient nous rappeler combien c’est tout l’aménagement du territoire qui est ainsi confié à la logique de la rente capitaliste et qu’il se décide à huis clos entre quelques notables élus et des dirigeants de grandes entreprises loin de toute délibération publique. Enfin, ce qui se passe près de Nantes avec l’aéroport se passe aussi tout près de Laval où le projet titanesque de LGV se déploie sous le regard ébahi des citoyens au profit d’un autre géant du BTP : Eiffage.

Evidemment, les médias n'ont vu de cette manifestation nantaise que saccages et dévastations comme le relate cet excellent reportage :

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.