Bernard-Henri Lévy a lancé une offensive, visant à discréditer le leader médiatique du Front de Gauche en l'accusant de populisme. Il est de plus en plus clair que Bernard-Henri-Lévy est un intellectuel politiquement engagé : au service de quelles forces politiques? C'est ce qui reste à analyser avec un peu plus de précision. Pour le philosophe, tout ce qui refuse la logique unilatérale du pouvoir économique et le discours monologique des "élites" est "populiste" (c'est-à-dire crypto-fasciste, crypto-stalinien etc.) Quant à l'argument selon lequel Mélenchon divise la Gauche, il n'est valable que s'il ne tend pas à établir l'hégémonie d'une Gauche soi-disant "responsable", c'est-à-dire de fait ralliée à la logique économiste des oligarchies dominantes - ce qui reste à prouver. Bernard-Henri Lévy pose à l'homme de gauche, et prétend jouer un rôle de vigilance morale et de leadership intellectuel de la gauche (et du centre) : pourquoi ne s'est-il jamais exprimé sur la question sociale?
En octobre, un débat était organisé aux Matins de France-Culture à l'occasion de la sortie du numéro spécial de Marianne autour d'un sondage sur la notoriété et l'influence des intellectuels français. "Pourquoi les intellectuels interviennent-ils si peu voire pas du tout sur les questions sociales, ou seulement de manière dispersée en tant qu'« experts » de tel ou tel sujet ?", se demandait à peu près Maurice Szafran à cette occasion (je ne le cite pas exactement). Sa remarque très pertinente n'avait pas été reprise, et même balayée de façon gênée.
Question connexe : pourquoi les intellectuels (dans leur grande majorité) refusent-ils désormais de considérer que la question sociale est la question politique majeure? Parce que depuis trente ans, on nous explique (particulièrement les « Nouveaux philosophes ») qu'ils ont été dans les années 50 les complices du totalitarisme stalinien ou du gauchisme irresponsable (voire du pétainisme ou du nazisme : l'affaire Heidegger ; mais laissons decôté l'engagement de droite ou d'extrême-droite : il est d'ailleurs assez peu dans la ligne de mire du soupçon français à l'égard des intellectuels, de manière très significative).
Tout propos critique généraliste, universaliste, sur l'état de la société est en conséquence accusé de reproduire un discours idéologique schématique d'opposition des classes sociales, qui a jadis servi à justifier le totalitarisme stalinien à l'est.Tout souci d'égalité sociale, ou de redistribution est immédiatement soupçonné de « stalinisme ». Comme si on ne savait pas que les régimes staliniens avaient généré une nouvelle classe sociale dominante dont la particularité était d'avoir accaparé l'appareil d'état, exploitant au profit de la reproduction de leur emprise l'ensemble des populations. Cette hégémonie politique des bureaucraties étatiques dans les pays où des partis de type stalinien ont pris le pouvoir n'est pas douteuse. Et les partis communistes de l'Ouest ont généré à leur grande époque des mini-bureaucraties, où l'on pouvait apercevoir en germe les évolutions de type totalitaire en cas de prise du pouvoir, aucun doute à ce sujet. Cela invalide-t-il pour autant entièrement le rôle de contre-pouvoir et de critique sociale qui a été celui des partis communistes dans les années 50, particulièrement en France ?
C'est précisément dans ce contexte que Sartre avait tenté de théoriser le rôle de l'intellectuel critique, capable de faire un double pas de côté pour se démarquer à la fois de la tentation oligarchique des démocraties parlementaires et de la tendance bureaucratique des partis staliniens. Cette tentative de double critique a pu se déconsidérer en paraissant donner carte blanche aux appareils staliniens ou à des groupuscules gauchistes maoïstes dans les années 60 et 70. Mais le problème de fond n'est pas dans les louvoiements sartriens impuissants à dépasser la logique bipolaire de la guerre froide. Il est de savoir si ce rôle de vigilance critique que Sartre avait théorisé est aussi dévalorisé qu'on le prétend par ses propres échecs pratiques. Qui a pris vraiment la mesure du gros effort philosophique de La Critique de la raison dialectique qui contient précisément cette double critique? Très significativement, Bernard-Henri Lévy, dans son livre Le siècle de Sartre (2000) avait balayé d'un revers de main les enjeux sociaux et politiques de ce livre, accusé un peu vite de néo-hégelianisme.
Bernard-Henri Lévy avait préféré insister sur le dernier Sartre, celui du dialogue avec son secrétaire particulier Benny Lévy, ex-leader de la Gauche Prolétarienne auto-dissoute en novembre 1973. Dans les années 70, Benny Lévy, rompant avec son activisme maoïste et effectuant son retour vers la pensée juive et la religion judaïque, tente de repenser à nouveaux frais la question politique en la confrontant aux interrogations métaphysiques et religieuses qui sont alors les siennes.
Ce dialogue ultime de Sartre avec l'ex-maoïste a été en effet un moment essentiel de l'histoire intellectuelle, et Bernard-Henri-Lévy avait raison en ce sens de le réhabiliter contre ceux qui ont cherché à le discréditer parce qu'il posait des questions gênantes. Il est vrai que Sartre avait été au plus haut point intéressé par les réflexions de Benny Lévy sur le « messianisme » : Benny Lévy l'avait invité à penser comme « messianisme » son engagement politique, dans un dialogue fécond avec la pensée juive du XXème siècle que Sartre découvrait àcette occasion.
Ce que Bernard-Henri Lévy avait cependant omis de préciser dans son livre, c'est que Sartre n'avait jamais renoncé dans ce dialogue à maintenir deux choses essentielles : 1. Son athéisme, 2. La finalité révolutionnaire de son discours. Mais en somme (et c'est ce qui a fort embarrassé les sartriens historiques), il acceptait la caractérisation de messianisme politique à propos de son propre engagement - sans pour autant y renoncer.
A contrario, Benny Lévy a développé à partir de ce moment-là, et davantage encore dans les dernières années de sa vie, une critique radicale du dit « messianisme politique », accusé d'être la racine profonde des régimes totalitaires du XXème siècle. Pour dire leschoses brièvement et clairement, il s'agissait de montrer que la politique, si elle se mêle de Promesse transcendantale, devient potentiellement totalitaire : elle dégénère en une espèce de néo-théocratisme sans dieu.
Cette réflexion renouvelait la pensée classique de séparation du spirituel et du temporel : il faut laisser à César ce qui appartient à César (le rationalisme du calcul et de l'emprise sur les choses), et à Dieu ce qui appartient à Dieu (le prix moral de la valeur des choses et des êtres, transcendant le calcul et la politique), nous disait en substance cette pensée du retour au religieux, qu'était devenue la philosophie de Benny Lévy.
Cette critique de Benny Lévy du « messianisme politique » a été intellectuellement victorieuse (même si elle n'a pas été en apparence au centre des débats), précisément parce qu'elle a été significativement reprise, entre autres, par Bernard-Henri Lévy, un des intellectuels les plus influents, si on en croit le numéro de Marianne d'octobre. De cette dévaluation du messianisme politique, est née l'idée qu'il faut laisser la gouvernance à des experts - c'est-à-dire à ceux qu'on appelle désormais les "élites". Corollairement, toute critique des dites « élites » était soupçonnée de néo-stalinisme et de crypto-totalitarisme, et taxée de "populisme".
Cette rupture philosophique avec le messianisme politique (dont il faut insister sur le fait qu'elle a pour fondement un retour du religieux) visait d'abord à invalider toute la pensée du mouvement socialiste et ouvrier née au XIXème siècle du saint-simonisme chrétien ou de la franc-maçonnerie (le premier communiste, Gracchus Babeuf, est d'abord chrétien), et au-delà, le marxisme, ou plus largement le "communisme", j'y reviens.
Mais du même coup se trouvait également invalidé l'esprit messianique de l'Etat et de la Nation napoléoniens, issu dela Révolution française, et qui en revendiquait les « principes » : à savoir le droit à l'égalité. Sauf les deux restaurations et le régime pétainiste, tous les régimes qui se succèdent jusqu'à la Troisième République s'établissent dans la continuité de cette visée messianique d'une égalité de droit entre des individus reconnus (plus ou moins largement) comme des citoyens. Aucun régime politique ne remettra en cause ce Principe en quelque sorte spirituel du pouvoir d'Etat (pas même le Second Empire, censé se fonder sur la souveraineté populaire) de tendre à l'égalité de droit principielle, à défaut d'établir l'égalité économique et sociale. C'est encore le principe essentiel du programme du Conseil National de la Résistance, et ce qui justifie la notion de « démocratie sociale » qui en était le coeur, visant à relancer la Promesse révolutionnaire d'égalité comme moteur spirituel et moral de l'esprit des institutions démocratiques.
Le marxisme revendiquera également ce principe, mais en critiquera l'idéalisme, cherchant les moyens de le réaliser (de supprimer la distance entre le principe et le fait) par une réforme drastique de l'état et du droit de propriété. Le marxisme fut ainsi aux démocraties ce que les millénaristes sont aux chrétiens ordinaires. Et ce millénarisme du messianisme politique qu'aura été le marxisme a de fait échoué sur les pratiques réelles du socialisme dit "réel".
Cela signifie-t-il que tout messianisme politique doive nécessairement dégénérer en totalitarisme ? Evidemment non : la pratique même des démocraties parlementaires en découle : leur philosophie du droit se fonde sur le messianisme politique issu de la Révolution française.
Ainsi la critique radicale du messianisme politique ne laisse plus rien debout de l'histoire réelle des démocraties, et c'est bien son vice profond. Jacques Rancière l'a montré, le danger dominant aujourd'hui, n'est pas je ne sais quel néo-théocratisme politique, mais bien la « haine de la démocratie » (cf. Jacques Rancière, La haine de ladémocratie).
Pour le dire en termes plus politiques : la tendance naturelle des sociétés est de concentrer tous les pouvoirs entre les mains d'une ou plusieurs oligarchies. Le messianisme politique issu de la Révolution française consiste à légitimer le combat perpétuel contre cette tendance oligarchique naturelle, en s'appuyant sur le principe en effet révolutionnaire et « messianique » de la démocratie sociale ou de l'égalité réelle.
Les bureaucraties staliniennes ont montré ab absurdo que ce combat n'est jamais gagné. Le discours de la prise du pouvoir des classes dominées ou du peuple est en lui-même une imposture, et c'est cette imposture qui est la base des régimes totalitaires. Les classes dominées, par définition, ne prennent pas le pouvoir ; elles ne peuvent être que représentées plus ou moins largement au sein des instances de pouvoir. La tendance naturelle de ceux qui les représentent, quels qu'ils soient, est de perpétuer leur position de pouvoir acquise grâce à cette mission, et indépendamment d'elle. Ainsi la tendance lourde de la bureaucratisation et de la production des oligarchies menace dès les plus petits niveaux de pouvoir à l'intérieur des partis politiques, quels qu'ils soient.
Autrement dit encore, le messianisme politique, dont je me réclame avec le dernier Sartre contre la critique religieuse qu'en avait faite Benny Lévy, et dont la fin est la démocratie, ne peut avoir comme visée qu'une perpétuelle vigilance exercée à l'encontre de tous les pouvoirs, quels qu'il soit, c'est-à-dire à l'encontre de ce que j'appelle la Logique du pouvoir. Le pouvoir est par nature au service de la force et des dominants : ceux qui possèdent les capitaux financiers, immobiliers, symboliques. Par le vote, par la pression sociale (grèves et manifestations), culturelle, morale, spirituelle et en définitive politique, que devraient pouvoir et vouloir exercer tous les citoyens, le Pouvoir peut être dialectiquement et momentanément contraint à prendre en compte l'aspiration à l'égalité et à la souveraineté. C'est ce qui s'est passé en France en 1870 avec la Commune de Paris, en 1936 avec le Front Populaire, en 1945 avec le Programme du Conseil National de la Résistance, en 1968 avec les grandes grèves et en 1981 avec la victoire de la gauche après trente ans d'hégémonie de la droite. Nécessairement dans ces moments, il change en partie de mains : mais les nouveaux gouvernants, quels qu'ils soient, sont pris par la Logique du Pouvoir, qui tend nécessairement à s'appuyer sur la force.
La Logique oligarchique du Pouvoir vient systématiquement et mécaniquement à bout de ces moments de « fusion » démocratique ? Certes. Mais il en reste toujours quelque chose : ce que nous appelons « nos acquis sociaux » ou l'abolition de la peine de mort, ont été intégrés à nos lois sous la pression de ces moments de ferveur démocratique. Et c'est énorme. Songeons que l'histoire des démocraties occidentales est peut-être en train de se terminer. Raymond Aron, le penseur humaniste de droite qu'on aime opposer à Sartre le disait : le capitalisme peut parfaitement se passer de la démocratie (et ce qui se passe en Chine aujourd'hui en est une preuve que personne ne contestera).
Faut-il se désespérer de l'action politique parce que de tels moments de ferveur démocratique semblent annulés par le retour tendanciel des oligarchies à exercer leur puissance d'action, par la force d'inertie qui veut que les mieux pourvus en capitaux symboliques et financiers (les plus forts) exercent plus ou moins leur Pouvoir sur tous les autres ? Non. Il faut travailler patiemment à ce que de tels moments de fusion démocratique reviennent, et montrer que la puissance des puissants n'est pas sans faille : ils regagnent toujours du pouvoir, mais ils peuvent aussi le perdre, l'histoire des deux derniers siècles l'a montré.
Faut-il espérer qu'une société « nouvelle » établisse un Pouvoir de type nouveau, où les forts ne régneraient plus jamais ? Je n'y crois pas. C'est la limite morale de mon « messianisme politique» : il n'est pas utopiste. Limite essentielle : aucun individu ni aucun régime n'est prédestiné à garantir l'égalité réelle. La Politique demeurera ce qu'elle est depuis l'invention de la citoyenneté par les Grecs : une Promesse et un perpétuel Combat. La Politique, c'est pour toujours le combat d'Antigone et de Créon, l'aspiration nécessairement spirituelle, transcendantale à la Justice (je la pose sachant précisément qu'elle n'est pas) contre la Logique du pouvoir. Toute la Politique est dans cette opposition intrinsèque (et non pas extrinsèque comme le veulent les tenants du retour au religieux) entre les aspirations spirituelles à la reconnaissance de la valeur de toute vie, et l'indifférence morale des logiques gestionnaires du Pouvoir. C'est l'opposition entre ces deux principes de la Croyance et du Pouvoir qui est universelle, et non les contenus de la croyance ou les modalités du pouvoir.
L'histoire des démocraties occidentales n'a pas été criminelle, lorsqu'elle l'a été, par exemple à l'égard des peuples colonisés, parce qu'elle leur imposait son « messianisme politique », mais au contraire, parce que les oligarchies qui tendaient à les gouverner n'ont pas permis aux peuples colonisés de se saisir de cette arme de la liberté qu'est le « messianisme politique », ou n'ont pas voulu reconnaître les formes que celui-ci prenait, modifié localement par la spécificité des luttes, des cultures et des religions.
A-t-on aujourd'hui en mains dans la société les outils conceptuels, politiques, moraux pour que de tels moments de fusion démocratiques puissent advenir ? Non : précisément parce que le « messianisme politique » est dévalué : « On n'y croit plus », dit-on. Force est de constater que la plupart des intellectuels choisissent de justifier les pouvoirs, les inerties, les intérêts dominants. Ils en retirent des bénéfices notoires. Ceux qui, au contraire, continuent à exercer leur vigilance démocratique à l'égard des pouvoirs, ou qui, mieux, théorisent la nécessité de cette vigilance démocratique, je pense à Jacques Rancière qui fait partie aussi des intellectuels influents nommés par Marianne, il est nécessaire de les faire connaître et de démocratiser l'accès à leur pensée. Il est urgent en effet de réhabiliter les intellectuels généralistes, les philosophes, les écrivains. Foucault l'avait montré, la spécialisation du discours des intellectuels est un des instruments au service de la Force dominante et de la Logique du pouvoir. Les experts peuvent être utiles, mais leur expertise tend à ne jamais poser les problèmes en termes politiques de luttes de pouvoir.
Le messianisme politique démocratiste est la croyance la moins nocive de l'histoire de l'humanité. Cette foi politique a des liens historiques, qu'il faut éclaircir, avec les religions monothéistes (c'est encore un des mérites du dialogue Sartre-Benny Lévy que d'avoir entamé cette réflexion) : se connaissant comme telle dans un nouveau « Je sais que je crois », elle est seule susceptible d'exercer une vigilance critique à l'égard des rationalismes étroits du calcul, tendant à mépriser la valeur de toute vie. Il n'y a pas de démocratie sans prise en compte de la foi en l'égalité à l'intérieur de la sphère de la gouvernance.
Mais davantage encore, il n'y a pas, d'un côté le rationalisme pragmatiste, auquel s'opposeraient de l'autre, les chimères de la croyance. La logique du Pouvoir est une logique de la Force, mais elle s'appuie en outre sur des idéologies qui sont elles-mêmes des croyances. Il faudrait montrer que le rationalisme comptable dont se réclament les oligarchies dominantes n'est pas moins une foi, dont l'idole a pour nom l'abstraction chimérique du "Marché". Cette foi vise à masquer les intérêts en jeu, qui ne sont ni abstraits ni anonymes mais se rapportent à des individus qu'il est possible d'identifier. Elle se redouble en général chez ceux-là d'une conviction profonde et révoltante qu'il y a deux humanités : les élites (auxquelles ils prétendent appartenir) et « ceux-d'en-bas ». Accréditer cette opposition des "élites" et du "peuple", qui reconduit la spatialisation inégalitaire des sociétés de caste (et pas seulement dans le vocabulaire employé), revient à nier la démocratie.
Warren Buffett, l'un des hommes les plus riches du monde, nous en a prévenus et cette phrase que les sociologues Pinçon-Charlot ont placé en tête de leur livre (qui est une analyse des puissances oligarchiques bénéficiaires du système actuel) est importante à penser : " Il y a une guerre des classes, c'est un fait, mais c'est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la gagner." Ainsi, si cette guerre est gagnée, les démocraties occidentales n'auront été qu'une parenthèse historique dans l'histoire de l'humanité : à ces sociétés chaudes, à histoire et soubresauts politiques, succéderont des sociétés froides, sans histoire et sans politique, dominées par des oligarchies qui se font la guerre entre elles sur le dos des peuples. Est-ce ce que nous voulons?
La Politique n'a pas à être prise à partie à l'extérieur d'elle-même par la Religion, comme le voulait en définitive Benny Lévy. Elle est la scène tragique d'un combat contre la victoire annoncée de la Force, et le messianisme politique aura été et reste le seul dépassement possible des replis identitaires et des fanatismes théocratiques, comme du pragmatisme autoritaire des puissants, et le seul fondement des luttes démocratiques pour la reconnaissance de l'égalité.
Oui, Sartre avait raison : Chaque homme est « Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n'importe qui ». Être un intellectuel de gauche aujourd'hui, c'est se revendiquer de la « démocratie sociale », c'est défendre concrètement les acquis du Programme du Conseil National de la Résistance et des autres luttes sociales du siècle, c'est refuser que le XXIème siècle soit pour les peuples le siècle de la régression sociale, et c'est se battre avec des armes conceptuelles et des prises de position publiques pour que la politique continue à avoir pour horizon la Promesse révolutionnaire de l'égalité. C'est en conséquence clairement prendre parti contre la dite « Logique du Marché » et pour la sauvegarde des états ou des regroupements d'états démocratiques, dont la vocation ne peut être que la redistribution des richesses et l'égalité des droits. Le jour où Bernard-Henri Lévy prendra clairement position en ce sens et soutiendra les luttes sociales, nous pourrons considérer sans réserve qu'il est un homme de gauche.