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Billet de blog 21 octobre 2014

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La nouvelle forfaiture de François Hollande ?

Le Nouvel Observateur annonce : " Le délit d'entrave n'enverra plus les patrons jusqu'en prison ". Le titre est trompeur. Ce n'est qu'une proposition. Reste que cette proposition viole le droit et qu'il s'agit d'une forfaiture politique que les syndicats ont les moyens de dénoncer et de combattre.

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Le Nouvel Observateur annonce : " Le délit d'entrave n'enverra plus les patrons jusqu'en prison ". Le titre est trompeur. Ce n'est qu'une proposition. Reste que cette proposition viole le droit et qu'il s'agit d'une forfaiture politique que les syndicats ont les moyens de dénoncer et de combattre.

Le président de la République n'a pas la possibilité de modifier la loi.

L'Assemblée nationale a une compétence exclusive en matière législative, dont elle ne peut pas se défaire (incompétence négative), comme le juge le Conseil constitutionnel dans sa décision 84-173 DC du 26 juillet 1984, considérant 4 et 5 en application de l'article 34 de la Constitution.

En l'espèce le délit d'entrave est défini et sanctionné par l' Article L2328-1 du code du travail (partie législative).

Il faut donc qu'une loi soit votée par l'Assemblée pour modifier cet article, ce qui ne peut pas être fait par voie règlementaire au risque sinon d'être écarté par la Cour de cassation, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel précitée.

C'est ce qui est arrivé récemment avec le décret n°2004-1364 du 13 décembre 2004 que la Cour de casation a ignoré et refusé d'appliquer en raison de la violation de la compétence exclusive du législateur et donc du principe de séparation des pouvoirs.

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 26 juin 2013, 12-81.646, Publié au bulletin

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 26 juin 2013, 12-88.265, Publié au bulletin

De plus, une telle atteinte à l'effectivité de l'action syndicale est impossible.

L'action syndicale est un droit de l'Homme civil et politique selon la CEDH

L'Etat a une obligation positive d'en garantir l'effectivité selon la même CEDH au visa de l'article 1er de la Convention européenne des droits de l'Homme et du citoyen.

La proposition de François Hollande est donc une régression sociale qui est prohibée par le droit international public contraignant ratifié par la France. Cela a été exposé et soulevé à l'Assemblée nationale. Le législatif et l'exécutif ne peuvent donc plus l'ignorer. C'est publié au Journal officiel de la république.

La Convention de Vienne sur le droit des Traités impose le respect des conventions et la bonne foi :

Art. 26 : " Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi "

Enfin, si François Hollande ne peut pas faire une telle proposition, aucun parti politique français ne peut ps non plus la voter sans violer la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen : De l'obligation des partis politiques d'agir pour défendre les droits sociaux

C'est une obligation de résultat, sans laquelle l'action politique et la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen n'ont aucun sens.

Les élus de la Nation doivent nécessairement respecter les obligations juridiques de leurs mandats qu'ils sollicitent des électeurs, au risque, sinon, de perdre toute légitimité et de porter gravement atteinte à la confiance de l'opinion dans les institutions démocratiques.

Un personnel politique qui ne défend pas les droits fondamentaux est le premier responsable de la corruption.

En l'espèce, ce nouvel exemple d'inversion normative faisant prévaloir un intérêt économique particulier sur l'intérêt général consacré par les droits de l'Homme est très significatif de l'inertie corruptrice. La banalisation de la violation des normes fondamentales doit inspirer l'indignation de tous ceux qui appellent à résister par des pétitions : "Nous, citoyens contre la corruption".

Il appartient donc aux partis politiques véritablement démocratiques de s'exprimer clairement et d'agir pour se distinguer d'un adversaire que leur inertie les amène à s'y confondre et à en faire les complices.

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