C'était le 30 octobre 1979 à 8 h 40 du matin... Les gendarmes découvraient le corps mort d'une "personnalité" dans l'Etang rompu, petit étang calme d'à peine quelques dizaines de centimètres de profondeur inséré dans un lacet d'une départementale des Yvelines, entre Montfort l'Amaury et Saint-Léger au beau milieu de la forêt de Rambouillet.
Puis trente minutes à peine après leur découverte, ils furent dessaisis de l'enquête. Soit, 9h10...
Dépêche AFP, 9h34 :
Le corps de Robert BOULIN retrouvé sans vie à l'étang rompu...
Puis les radios, les télés, les journaux sans même attendre les conclusions de l'enquête développèrent :
Suicide par noyade. Une sombre histoire de terrain à Ramatuelle, déprime, ... alors absorption de barbituriques, et... "plouf" dans cinquante centimètres d'eau. Puisqu'on a retrouvé des lettres photocopiées expliquant ce geste, Robert BOULIN en était forcément l'auteur... (Dans la précipitation de l'emballement médiatique, on n'analyse pas la frappe typographique des lettres en question).
Conclusions expéditives. Fin de l'histoire. Point final.
Un train peut en cacher un autre. Cela se vérifie aussi en matière d'actualité, Moins d'une semaine plus tard, le 2 Novembre 1979, Jacques MESRINE était abattu le jour même des obsèques du Ministre BOULIN...
La France était donc Place de la Porte de Clignancourt le jour de ses obsèques en Gironde. Voila un Ministre mort dans l'exercice de ses fonctions, premier Ministrable, que l'on enterre dans la discrétion... CHABAN, était là bien sûr...Libourne aussi, la ville dont BOULIN était le maire estimé depuis vingt ans lui rendra hommage. Mais l'écho médiatique était si faible ce jour là, que l'on ne percevait pas les chuchotis le long du cortège funéraire, démentant la thèse officielle du suicide... On ne remarqua pas davantage ceux qui brillèrent par leur absence, jusqu'au Président de la République qui pourtant avait placé le Ministre sous les feux de la rampe médiatique dans cette même ville de Libourne, quelques mois à peine plus tôt. Un agenda surchargé sans doute.
Non. Ce jour là, MESRINE aussi s'était probablement "suicidé", se penchant vers l'avant sous le volant de sa BMW pour attraper une grenade à ses pieds. Un suicide à dix-huit impacts de balles sur le pare-brise, chassera donc de l'actualité un autre par noyade dans cinquante centimètres d'eau quatre jours à peine avant. Curieuse semaine de la Toussaint 1979...
Et la France gobera. Comme on cherche à cacher les affaires d'adultes qui ne concernent pas les enfants dont on veut préserver l'innoncence, la classe politique a pris l'habitude de laver son linge sale en famille :
Les "affaires" d'Etat ne concernent pas les citoyens ordinaires dont on veut préserver l'idéal républicain. Un vieux principe, une règle non écrite mais bien pratiquée, sous la Ve République. Il faut sauver les apparences et s'étonner à chaque élection, affaire après affaire, de l'absentéisme civique croissant lors des convocations aux urnes, ou de la "montée des extrêmes" et autres "votes rejets"...
Revenons à l'affaire BOULIN et ses récents développements. C'était le 3 Février 2011. Un des gendarmes présents lors de la découverte du corps à l'étang rompu ce fameux matin déclarait lors d'une interview exclusive :
"Robert BOULIN n'est pas mort noyé. Oui, je suis catégorique. Robert Boulin n'est pas mort noyé. Ce n'est pas possible. Il était quasiment à quatre pattes. La tête hors de l'eau. Ma conviction, c'est qu'il tentait de ramper jusqu'à la berge. Et puis, il avait des traces sur le visage. Comme des griffures rouges."
Plus de trente ans ont passé. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Les griffures rouges remarquées par ce gendarme sur le visage de Robert BOULIN, on les retrouve sur les clichés de l'identité judiciaire... Alors ?
Alors, plus de trente ans de pressions sur la famille BOULIN, de contre-enquêtes de journalistes d'investigation, de témoignages, d'intimidations, de disparition de dossiers, de destruction d'archives, de mises au placard, de carrières brisées de journalistes un peu trop curieux... de vol de scellés, puis récemment de perte de pièces à conviction.
Des pièces égarées donc, pour finir par les retrouver comme par enchantement... non sans avoir au préalable court-circuité la décision d'un procureur... sur la demande de ré-ouverture de l'enquête par Fabienne BURGEAT-BOULIN. C'était quelques mois avant le remaniement, avant l'affaire de l'opportune rencontre d'un homme d'affaire tunisien sur le tarmac de Tunis, qui passait justement par là avec son jet. On connait la suite... C'est cela que l'on appelle servir avec dévouement et honneur la République, sans doute.
A ce jour, ce n'est pas moins de soixante quinze anomalies que l'on relève s'agissant de l'enquête officielle ayant conclu au suicide d'un Ministre en exercice à la longévité record sous De Gaulle, Pompidou et Giscard d'Estaing...
Alors, s'il ne fait aucun doute que la manifestation de la vérité a été entravée depuis trente ans, que Robert BOULIN ne s'est pas suicidé, cela pose question aux citoyens que nous sommes :
- D'abord, sommes nous encore dignes d'être appelés "citoyens" ?
- Que cela signifie-t-il si nous sommes convaincus que la vérité est cachée, dès lors que nous en sommes informés, conscients ?
- N'est-ce pas là le but recherché au fond, à savoir nous déposséder de cette citoyenneté, nous le faire savoir entre les lignes, pour mieux nous contrôler encore ?
Mais alors, quel est donc la valeur du vote ? Pour qui votons nous, si "on" assassine impunément un Ministre en exercice quel qu'en soit la raison, si l'omerta prévaut sur les Lois et les valeurs de la République ?
Bien sûr, d'autres questions se font jour. Il s'agit de la mort d'un homme. Qui l'a assassiné ? Pour quel motif ? Dans quelles circonstances ?
Et j'en viens aux questions à mes yeux les plus importantes. Au delà de l'homme, du Ministre Robert BOULIN, n'est-ce pas au fond un système de valeurs entier que l'on a anéanti ce soir là ?
N'était-ce pas ce qu'incarnait Robert BOULIN que l'on voulait faire disparaître ? Ou plutôt, n'est-il pas mort en "résistant", lui qui avait osé mettre sa vie en danger pendant la guerre par idéal ? Certains hommes sont fait pour partie de convictions. Pour ma part, j'ai toujours pensé que l'engagement d'un homme pour ses idées était proportionnel à la force des convictions qui l'animait. Fort engagement, pour de fortes convictions au service de l'intérêt général, c'est ainsi que beaucoup présentent encore Robert BOULIN. Une espèce en voie de disparition, que dis-je... en voie d'extinction.
Il faut se replonger dans l'histoire politique des années soixante-dix pour comprendre... De la mort de Pompidou à l'avénement des libéraux dans le Monde, Reagan aux USA, Thatcher en Angleterre.
De 1974 à 1979, les années charnières qui pour moi expliquent le contexte politique de la disparition de Robert BOULIN. On ne transige pas avec le genre d'homme qu'était Robert BOULIN, on ne négocie pas... on n'achète pas son honneur, en l'échange de dossiers compromettants. Non, on le menace, on le salit publiquement en montant une affaire qui n'en n'est pas une, on cherche à le déstabiliser, puis on lui tend un piège, on le passe à tabac et on le tue ! Puis on maquille son assassinat en suicide, pour le tuer une seconde fois, et au passage semer la terreur parmi "ceux qui savent", ou "ceux qui se doutent". "Alors, faites sauter la République !", a dit devant témoin Achille PERRETTI, ancien maire de Neuilly à l'épouse du Ministre défunt.
La croix de Lorraine symbolise la France libre, la résistance.
Il y en a deux en France.
L'une à côté de Courseulles sur Mer, sur la plage où le Général de Gaulle a débarqué en 1944.
L'autre à Colombey les deux Eglises. En sa mémoire.
Il me plaît à penser qu'une belle croix de Lorraine édifiée à l'Etang rompu aurait toute sa place... qu'elle serait bien jolie à voir depuis le service de l'Etat Civil de la commune de Saint-Léger-en-Yvelines, par exemple... au hasard*. Ne serait-ce que par ce que ce symbole fut utilisé comme logo par le RPR... Vous vous souvenez certainement en ce mois de Mars 2011, de ce parti dont on a changé le nom ?
Lorsqu'on a célébré en Novembre dernier, les quarante ans de la disparition du Général de Gaulle, j'ai eu une pensée pour Robert BOULIN, sur la tombe duquel seul l'un des rares "Gaullistes sociaux" ou "Gaullistes de gauche", Philippe SEGUIN, s'était incliné en 1987.
Je tiens à préciser que je ne suis pas gaulliste. Seulement petit fils d'un résistant gaulliste du côté de Vaucouleurs en Lorraine, marqué par l'histoire familiale où l'on m'a appris entre autres, à ne pas courber l'échine devant l'intimidation et à respecter les opinions des autres. Je suis donc avant tout un citoyen français, Républicain, viscéralement attaché aux valeurs de la République, plutôt anarchiste de gauche, ayant du mal avec toute forme d'autorité, attiré par les idées de Proudhon. La République rassemble au-delà du clivage gauche/droite.
Un des plus beaux poèmes que je connaisse est celui d'Aragon, "La Rose et le Réséda". L'idée que des hommes différents, d'opinions politiques ou de croyances différentes se rassemblent pour défendre des valeurs communes m'exalte. J'y crois. J'y crois encore, j'y croirais toujours.
Alors, j'ai eu l'idée avec quelques amis qui partagent cet attachement aux valeurs républicaines de créer sur un réseau social une manifestation : "Que la lumière soit faite".
Nous citoyens français, invitons chaque citoyen se sentant concerné à se présenter à l'étang rompu avec une bougie, un lampion pour une cérémonie en la mémoire de Robert BOULIN "afin que la lumière soit faite" chaque 29 Octobre de chaque année à 18 h, tant qu'un juge d'instruction indépendant ne sera pas nommé pour instruire ENFIN l'affaire BOULIN dans les conditions dignes d'une Justice libre et indépendante.
Voici l'adresse URL du groupe soutenant cette manifestation : https://www.facebook.com/event.php?eid=101435426605190&ref=ts
Les bougies, les lampions seront disposés à terre, pour former une croix de Lorraine, symbole des "français libres"...
Qu'on se le dise, prenez date, c'est un samedi. Et venez nombreux !
* Dans les jours qui suivirent le décès de Robert BOULIN deux inspecteurs débarquent à minuit au domicile du maire de Saint-Léger-en-Yvelines. Ils lui demandent de les accompagner à la mairie, en pleine nuit, afin de leur donner accès au registre d'Etat Civil, où sont inscrits l'heure et le jour de la mort de Robert BOULIN.