La Turquie affirme sa dimension de puissance régionale, que beaucoup ne voulaient pas voir jusqu'à présent. Cela montre combien la Turquie peut rivaliser avec l'Europe. Les évènements révèlent l'importance de la Turquie dans la politique du Proche et du Moyen Orient, que l'Europe n'est pas apte à assumer et pour laquelle elle n'a d'ailleurs aucune légitimité (sinon celle de vendre des armes et des munitions à Israël pour tirer sur les Palestiniens). La diplomatie turque fait ici jeu égal avec les autres grandes puissances.
L'attaque des navires humanitaires par une marine de guerre dans les eaux internationales a des incidences juridiques.
C'est un acte illicite contre la sécurité de la navigation maritime (Convention de Rome du 10 mars 1988).
Une tel acte n'a aucune justification en l'espèce.
Israël ne peut pas prétexter a posteriori la présence de couteaux et de bouts de bois pour justifier son attaque et ouvrir le feu sur des civils. C'est disproportionné. La défense des civils est en revanche légitime. L'incident s'est produit dans les eaux internationales. Il n'y a eu aucune atteinte à la souveraineté israélienne justifiant une action de force. Il ne peut donc pas s'agir d'une riposte. Il n'y a pas légitime défense. L'agresseur est Israël. L'action de l'armée israélienne est illégale.
Les explications offcielles avancées par Israël sont donc irrecevables. C'est comme si un violeur, après s'être introduit de force dans une chambre à coucher, justifiait son meurtre parce que sa victime le griffait pendant le viol. Les lois ne crient pas quand on les violent. Il faut crier pour elles.
La bateau arraisonné par l'armée constitue un acte d'agression. Il s'agit d'un acte de guerre.
Les victimes du bateaux sont des civils. Le Statut de Rome défini le crime de guerre (Art. 8 § 2 a i) et le crime contre l'humanité (Art. 7 § 1 a et e) relevant de la compétence de la Cour pénale internationale. Le navire sur lequel se sont déroulés les évènement battait pavillon turc, mais la Turquie n'a pas ratifié le statut de Rome.
La Turquie n'est pas portée sur l'action de la Cour pénale internationale. Comme Israël ou les USA. Erich Incyian a montré récemment, dans deux articles (ici et là), que la France ne l'est pas non plus. Le ministre des affaires étrangères a déclaré que les droits de l'homme sont une entrave à sa diplomatie.
La France, à la différence des démocraties précédentes, a ratifié le Statut de Rome. Elle est tenue d'arrêter et d'extrader les auteurs de crime de guerre ou de crime contre l'humanité ou les juger sur son sol (aut dedere aut judicare).
Politiquement, l'arraisonnement meurtrier d'une flotille humanitaire dans les eaux internationales témoigne de l'incapacité d'Israël à développer une action politique normale, autrement que par l'intérmediaire de son armée. Cette tragédie inadmissible met un peu plus encore en cause la légitimité internationale de sa présence en Palestine. Israël parvient à lasser ses meilleurs alliés. Un pays reposant sur son armée et un état de guerre permanent est-il une démocratie ?