Un policier est suspecté d'avoir subtilisé 52 kilos de cocaïne au sein de la préfecture de police. Il ne s'agit pas de quelques grammes que l'on peut facilement soustraire au regard des gardiens. Il paraît loufoque de vouloir prétendre qu'une seule personne ait pu ainsi sortir 52 kilos d'un coup. RTL rapporte que " Insatisfait par l'évolution de l'enquête, Bernard Cazeneuve demande un audit approfondi de la brigade des stupéfiants ". Le ministre de l'intérieur a raison d'exiger "une enquête minutieuse" et peut légitimement s'interroger sur le sérieux des explications qui lui sont été données.
A quoi ressemblent 52 kilos de cocaïne ?
A des sacs de poudre blanche, comme 52 kilos de farine, de talc, ou des gros pains d'un kilo, comme un paquet de sucre. Chacun peut ainsi se faire une idée du volume et du poids à transporter.
Le doute naît d'imaginer qu'une personne, chargée comme un bourricot, ait pu sortir tout cela d'un local prétendument surveillé et traverser les couloirs du quai des Orfèvres, soit-disant tout aussi contrôlés, sans susciter la curiosité, et emprunter facilement les trottoirs de Paris.
Ce n'est plus un vol, c'est un gag. Ils nous refont la "Traversée de Paris" avec des valises super-costaudes pour 26 kilos de marchandises dans chacune d'elle... C'est le modèle représentant de commerce en enclumes... Où aller avec des millions d'euros de cocaïne ? Pas trop loin, vu le poids. Cette actualité démontrera peut-être que les porteurs de valises évoluent, eux aussi.
L'affaire Neyret avait mis au jour une faiblesse dans la gestion des saisies de drogue. Le Point révélait un modus operandi de détournement pratiqué par la hiérarchie : " Affaire Neyret : la piste de la "déchetterie" ".
Combien de kilos ont été ainsi détournés ? Où en est l'affaire ? Est-ce toujours possible ?
Cela inquiète le ministre dans La Croix : " "Il est des cas où la conservation de simples échantillons s'avère tout à fait suffisante à l'instruction judiciaire, dès lors qu'une quantification précise du stock saisi a été opérée et consignée dans un acte de procédure. La plus grande partie de la saisie peut alors être détruite. Mais c'est l'autorité judiciaire, le magistrat qui dirige l'enquête et lui seul, qui a le pouvoir de décision à cet égard."
La communication de la police sur le suspect pose également question.
Elle présente un policier "bien noté" et très sérieux (il téléphone au service même quand il est en vacances) tout en parlant d'un "beau gosse", qui se « comporte comme un cador ». A vouloir se dédouaner de toute responsabilité, la surenchère policière va bientôt conclure au fait que la brigade des stups était infiltrée par la mafia... Mais personne n'en n'avait rien vu. Voilà des policiers qui manquent singulièrement de flair.
Il y a comme une incohérence. Soit la hiérarchie est nulle et incapable de faire la différence entre un ripoux et un policier sérieux, ce qui expliquerait ses bonnes notations, soit elle raconte n'importe quoi. Si ce policier était vraiment coupable, cela finirait de démontrer que sa hiérarchie est nulle.
La police affirme aussi que le suspect ne veut rien dire.
Qui saurait le lui reprocher quand on se rappelle de l'affaire Philippe Pichon et de sa plainte pour faux contre ... l'IGPN (Les soutiens de l'ex-policier Philippe Pichon dénoncent «une affaire d'Etat») et de l'affaire Yannick Blanc, préfet, et de sa plainte pour faux contre... l'IGS (Affaire de l'IGS: la défense plus que bancale du préfet Gaudin) ; sans parler des faux policiers qui émaillent les affaires de Tarnac (Tarnac: instruction pour faux dans un PV des enquêteurs) et autres (L'affaire de Bobigny ou la rupture du Pacte républicain, ...).
Ce n'est pas d'aujourd'hui.
La situation actuelle de Dominique Loiseau - policier parisien incarcéré contre lequel l'administration s'acharne depuis plusieurs dizaines d'années pour couvrir une enquête de IGPN tout aussi douteuse... - l'illustre encore.
La police affirme avoir trouvé 20 000 euros en liquide.
C'est effectivement beaucoup d'argent, mais on ne peut pas parler d'une grosse somme en comparaison de ce que devrait rapporter la vente de 52 kilos de cocaïne. Le suspect se serait-il fait sinon rouler dans la ... farine ? 20.000 euros, ça ne fait que deux mois de frais de Claude Guéant.
Enfin, la police insiste sur le fait que le suspect serait propriétaire de 7 biens immobiliers (sans les préciser).
En quoi cela devrait-il être un élément à charge ?
Il existe un nombre considérable d'investisseurs immobiliers en France ayant fait fortune grâce à des revues spécialisées (Par exemple : Mieux Vivre votre argent). Un brigadier de police n'a pas les facilités de la haute fonction publique de la police pour toucher des sommes en liquide. Rien n'interdit de penser qu'il ait pu pallier cet inconvénient par l'intelligence d'investir dans l'immobilier. Surtout que la polcie est venue ensuite corriger que ces biens viennent de sa femme... N'y aurait-il pas une certaine jalousie dans la police ?
En conclusion, une fois encore, on s'étonnera de la diligence dans la police à matraquer le petit personnel quand tout indique que la hiérarchie n'est pas à la hauteur.
La procédure de la Bac Nord de Marseille s'est soldée par une purge dans le petit personnel, mais, comme par hasard, pas un officier ni un commissaire n'est responsable de quoi que ce soit. Ils n'ont rien vu. Comme pour les 52 kilos de cocaïne... Sachant que la procédure de la Bac Nord soulève également un problème de faux en écriture publique (Bac nord de Marseille: la justice cherche toujours ses ripoux).
La question de la négligence hiérarchique se pose pareillement dans la poursuites des mutilations infligées par l'usage du Flash-ball et celle des faux dans la répression des manifestants de Nantes.
L'actualité montre avec constance que les soutiers de la police passent facilement au tourniquet mais, qu'en revanche, la rigueur pénale et administrative témoigne d'une grande mansuétude - tout aussi constante - pour la crème policière.
L'ancien directeur de la police judiciaire de la préfecture de police renseignait un ministre sur une procédure judiciaire et le conseillait pour répondre aux juges qui le convoquaient (Financement libyen : le coup de fil qui compromet le patron de la PJ parisienne). Il n'y a pas eu d'enquête ni de poursuite disciplinaire.
L'affaire Neyret est sortie des écrans radars. Toni Musilin se demande où sont passés les deux millions et demi disparus. Paris Match avait soulevé le doute. Ca fait combien de kilos ?
L'ancien directeur de la police judiciaire est parti pantoufler dans la banque immédiatement après sa mise à la retraite au mépris du code pénal et de la prohibition du conflit d'intérêt (Un flic à la Fédération Bancaire Française : Compétences et conflits d’intérêts). Personne ne s'en est ému malgré l'affaire Cahuzac et l'adoption de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique renforçant la prohibition très stricte du conflit d'intérêt (Loi transparence : le dernier décret anti-conflits d'intérêts enfin publié). Il n'y pas eu de poursuite non plus. C'est carnaval.
Les commissaires de l'IGPN et de l'IGS poursuivis pour faux en écriture publique ne sont pas inquiétés par la justice ni suspendus par l'administration. La commission d'une infraction criminelle dans la police ne suscite beaucoup moins d'émotion dans la classe politique qu'une publicité pour les poulets.
Il n'y a pas de procédure administrative d'ouverte dans le trafic de billet au sein du ministère de l'intérieur révélée par l'affaire Guéant (Frais d'enquête: 34 millions d'euros pour le cabinet du patron de la police en dix ans). Il faut motiver la hiérachie pour faire cogner sur les manifestants et la détention de forte sommes en argent liquide n'est répréhensible dans la police que pour le petit personnel. On ne parlera pas des propriétés immobilières...
Voilà un ministère de l'intérieur qui démontre que la lutte des classes est toujours d'actualité et que l'ordre repose sur l'imposture de l'illusion des apparences.
Après le viol en réunion de la touriste canadienne et la violation du secret de l'instruction par le directeur de la police judiciaire (Affaire Kadhafi : ce que disent les écoutes de Brice Hortefeux ), la disparition de 52 kilos de cocaïne conduit à s'interroger très sérieusement sur le fonctionnement de la préfecture de police et ses cadres et justifier le courroux du ministre " Insatisfait par l'évolution de l'enquête, Bernard Cazeneuve demande un audit approfondi de la brigade des stupéfiants. ". Compte-tenu du doute existant sur l'IGPN, Bernard Cazeneuve ne devrait-il pas plutôt solliciter l'ouverture d'une instruction (art. 15-2 du code de procédure pénale) ?
Le moins que l'on puisse dire est que nous n'avons pas une police d'orfèvres. Elle ne risque pas de le devenir tant que les chefs bénéficient d'une telle impunité. Il serait temps d'arrêter de se moquer du justiciable et de prendre l'opinion pour une imbécile.
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Perpignan. Le rugbyman cachait 171 kg de cocaïne
Saisie exceptionnelle de 110 kg de cocaïne à Neuilly, 4 arrestations
Le temps où l'Etat avait le monopole de la production et de la vente de l'opium.
" C'est l'accès à l'armoire forte des scellés qui intrigue les enquêteurs. Comment le suspect aurait-il pu se procurer les clés qui permettent d'accéder à la drogue ? Seuls trois policiers - chef de service, adjoint et chef d'état major - sont en effet possession de ces clés, affirme le JDD. "
http://lci.tf1.fr/france/faits-divers/cocaine-volee-a-la-pj-le-policier-interpelle-nie-les-faits-des-8461928.html