Pour la deuxième fois, l'ancien maire de Mexico se présente à l'élection présidentielle mexicaine du 1er juillet. Ce tribun de la plèbe naguère présenté comme un ami de Chávez revient devant les électeurs en gentil papa. Réussira-t-il à convaincre? Portrait.
Suite de notre série sur les élections mexicaines du 1er juillet: portraits des 4 candidats à la présidentielle. Nous commençons -par ordre alphabétique- avec Andrés Manuel López Obrador, candidat de la gauche.
Parcours : A 59 ans, cet homme de gauche originaire de l’Etat de Tabasco (sud du Mexique) a le militantisme dans le sang. Après des études de sciences politiques et d’administration à l’Université publique de Mexico (UNAM), il fait ses classes au Parti Révolutionnaire institutionnel (PRI), la formation issue de la Révolution mexicaine et qui a régné sans partage de 1929 à 2000. Il travaille pour le développement des communautés traditionnelles de son Etat, avant de monter à la capitale en 1984. C’est alors qu’il se range derrière Cuauhtémoc Cárdenas lorsque l’aile gauche du PRI fait scission. Le Parti de la Révolution Démocratique est né. En 2000, il est élu gouverneur de la ville de Mexico et applique des programmes sociaux qui ont forgé sa popularité : aide aux personnes âgées, cantines gratuites, promotion de la culture et développement des transports publics.
Dénonçant sans cesse la « mafia » au pouvoir, il devient l’un des plus ardents adversaires du PRI qui a perdu les élections en 2000. En 2006, celui qu’on appelle souvent par ses initiales (AMLO) perd l’élection présidentielle à 0.58% d’écart dans un climat de fraude avérée. Il refuse de reconnaître sa défaite, se déclare « président légitime », initie une traversée du Mexique et enchaîne les meetings en harangant la foule de son accent côtier.
Atout : Incontestable tribun, Andrés Manuel López Obrador a opéré un revirement en 2012. Pour cette 2e tentative d’accession à la présidence,il prend des aires de gentil grand-père (voir son clip de campagne avec son fils, plus bas), et se pose en candidat d’une « république amoureuse » dans un pays miné par une crise morale à tous les niveaux de la société. Une posture qui lui réussit : il s’est attiré le soutien du patronat qui avait pourtant financé une campagne de haine à la télévision contre lui en 2006. Dans les sondages, il est passé devant la candidate de la droite, la reléguant à la 3e place.
Propositions principales: Pour mettre fin à la corruption, l'injustice et la violence, le candidat de la gauche veut mener à bien une réforme fiscale, baisser de 50% les salaires des hauts fonctionnaires, maintenir le caractère publique de l’entreprise pétrolière PEMEX (vache à lait de l’Etat), en finir avec les monopoles de certaines grandes entreprises qui se partagent le gâteau comme dans le secteur audiovisuel. Il table sur une croissance économique de 6% par an pour générer 1.2 millions d’emplois dans un pays qui a durement été touché par la crise économique américaine.
Le candidat propose par ailleurs une plus forte participation du peuple via des référendums, la possibilité de révoquer le président à mi-mandat et l’initiative populaire législative.
Soutenu par bon nombre d’intellectuels et d’écrivains mexicains, Andrés Manuel López Obrador a promis de retirer les troupes militaires actuellement déployées dans le pays pour lutter contre le narcotrafic. Pour lutter contre ce fléau, il promet de s’en prendre aux circuits de l’argent sale, d’ouvrir une réflexion sur la dépénalisation de la marijuana, de purger la police et de réformer la nomination des juges; dans le but de mettre fin à torture et à la corruption.
Coups d’éclats : AMLO est à l’origine de mouvements sociaux jamais vus au Mexique. Il a mené plusieurs marches : l’une contre la fraude électorale du PRI aux élections locales du Tabasco, une autre contre la privatisation du pétrole. Mais c’est en 2004 qu’il remplit les rues de Mexico contre le pouvoir fédéral qui tente –en vain- de lui interdire de se présenter à la présidentielle via une chicanerie juridique. Après avoir été battu de très peu en 2006, il lance un Mouvement de régénération nationale (MORENA).
Ce qu’on lui reproche : de se présenter en messie, d’avoir recours trop systématique à la grève et aux blocages, d’être trop offensif contre ses adversaires. Et surtout d’appartenir au PRD qui, comme les autres partis politiques, n’est pas exempts de scandales. Le sous-commandant Marcos (leader des néozapatistes) lui repproche d'être à la tête d'un parti "avide de pouvoir" et intolérant.
Le clip de campagne de grand-pere obrador:
>Plus de détails sur le parcours d'Andrés Manuel López Obrador ici, pour les lecteurs hispanophones.
>Précédent billet sur la campagne présidentielle mexicaine: La révolte des jeunes contre les médias.
>Suivez la campagne mexicaine sur Twitter: @raphamoran, et via le mot-clef #Mexique2012<