Profession de foi remise à l'Organisation des élections du CNRS le 25 avril 2012 :
Section 01 – Collège B1 – GONZALEZ-MESTRES Luis
PROFESSION DE FOI
de Luis GONZALEZ-MESTRES, CR1 CNRS
(Physicien, Section 01, UMR 5814, Téléphone : 0450091664 ; Portable : 0620601187,
lgm_sci@yahoo.fr , http://scientia.blog.lemonde.fr )
CANDIDAT DU COLLECTIF « INDEPENDANCE DES CHERCHEURS »
http://science21.blogs.courrierinternational.com , indep_chercheurs@yahoo.fr
POUR LE DEUXIEME TOUR DE L'ELECTION (Collège B1, 2012) A LA SECTION 01 DU COMITE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE
Mes communiqués de campagne électorale : http://www.mediapart.fr/club/blog/Scientia
Cher (e) Collègue,
La situation de la recherche fondamentale devient de plus en plus inquiétante. C'est pourquoi ma profession de foi pour le premier tour, accessible à l'adresse http://blogs.mediapart.fr/blog/scientia/100412/luis-gonzalez-mestres-profession-de-foi-2012-section-01-cnrs , commençait par ces mots d'ordre :
NON A LA PRIVATISATION ET A LA MARCHANDISATION DE LA RECHERCHE ET DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR !
NON A LA MARGINALISATION DE LA RECHERCHE FONDAMENTALE, AU DEMANTELEMENT DU CNRS ET AUX CONFLITS D'INTERETS !
ABROGATION DES LOIS, DECRETS ET AUTRES MESURES METTANT EN CAUSE LES SERVICES PUBLICS ET LEURS AGENTS ! SUPPRESSION DE L’ANR, DE L’AERES, DE LA BIBLIOMETRIE, DES « SUIVIS POST-EVALUATION » ET DE LA « MANAGERISATION » DE LA RECHERCHE !
TITULARISATION DES CHERCHEURS PRECAIRES ! HALTE A LA RGPP !
SUPPRESSION DE LA SEPARATION DES CHERCHEURS EN DEUX CORPS !
NON AUX « -EX » ET A LA SUPPRESSION DE NOTRE INDEPENDANCE !
RESPECT DE LA CREATIVITE ET DES INITIATIVES DES CHERCHEURS !
RETRAIT DU CONTRAT D'OBJECTIFS 2009-2013 DU CNRS AVEC L'ETAT !
CONFIDENTIALITE DES RAPPORTS D'EVALUATION !
NON A LA TUTELLE IMPOSEE PAR L'UNION EUROPEENNE, AU TRAITE DE LISBONNE ET AU « MECANISME EUROPEEN DE STABILITE » (MES) !
LES SECTIONS DU COMITE NATIONAL DOIVENT SE SAISIR DE L'ENSEMBLE DES PROBLEMES DE LA RECHERCHE
Ma profession de foi du premier tour, dont je ne peux que confirmer le contenu, soulignait notamment la crainte croissante des citoyens de voir la France « finir comme la Grèce » et la catastrophe économique et sociale sans précédent qui a découlé de la « politique unique » instaurée depuis les années 1980 : « libéralisation », privatisations... J'évoquais à ce sujet la débâcle historique résultant de la politique de démolition du patrimoine des Etats et de marchandisation des services publics organisée au niveau européen depuis 1985 environ, alliée à la création de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1994 avec signature de l'Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS). Cette politique a conduit à la destruction pure et simple des économies de pays jadis « riches ». La recherche scientifique et technologique a directement fait les frais de la politique européenne et des délocalisations. Je me propose, dans cette profession de foi du second tour, d'aborder un certain nombre de questions connexes.
L'IMPORTANCE DES PRECAUTIONS ETHIQUES
Sans point chercher à mettre en cause des collègues dont le travail est clairement très difficile et méritant, il m'apparaît tout aussi difficile de ne pas évoquer le fiasco récent de la très forte campagne médiatique autour de l'annonce expérimentale de septembre 2011concernant une possible vitesse supraluminale du neutrino associé au muon. Comme bien d'autres, mais sans doute de manière plus « voyante », cette affaire me semble amener inévitablement la question des précautions éthiques dans de telles situations.
Je semble avoir été le premier (dans l'introduction de mon article 28 septembre 2011 arXiv:1109.6308) à signaler les possibles sources d'incohérence du résultat expérimental annoncé : I) les désintégrations spontanées du neutrino supraluminal, notamment par émission de paires électron-positron ; II) l'éventuelle impossibilité, pour le pion avec une vitesse critique égale à celle de la lumière, d'émettre un tel neutrino supraluminal. Le lendemain, un calcul plus précis d'Arthur Cohen et Sheldon Glashow (arXiv:1109.6562) confirmait le bien-fondé du point I), et mon deuxième article (arXiv:1109.6630) confirmait et développait devantage le point II). Mais la « communication » pratiquée en France ne semble avoir guère pris en considérations ces avertissements scientifiques. Mes deux articles ont été complètement ignorés. Il s'agit pourtant d'un travail diffusé une semaine après l'annonce du prétendu neutrino supraluminal et qui aurait dû inciter à une modération très substantielle de la campagne de propagande menée autour d'un résultat expérimental clairement préliminaire. Six mois plus tard, et juste après la diffusion par ICARUS de son résultat infirmant une possible vitesse supraluminale du neutrino, le Department of Energy des Etats-Unis adressait au directeur de Fermilab un courrier (http://www.fnal.gov/pub/today/images12/031912-brinkman-oddone.pdf) rejetant le projet LBNE sous sa forme soumise à l'Office of Science de cette administration.
Parallèlement, la déclaration The Cost of Kowledge mettant en cause le coût des revues marchandes dites « avec comité de lecture » d'une importante maison d'édition, voir http://thecostofknowledge.com/ , a dépassé les 10.000 signatures de chercheurs de tous pays et disciplines. Et au même moment, la montée des rétractations d'articles suite à des erreurs scientifiques, dénaturations de contenu et faux volontaires inquiète de plus en plus sérieusement les éditeurs de ce type de revues. Voir, par exemple, l'article du 16 avril 2012 du New York Times intitulé « A Sharp Rise in Retractions Prompts Calls for Reform » à l'adresse : http://www.nytimes.com/2012/04/17/science/rise-in-scientific-journal-retractions-prompts-calls-for-reform.html . Un mois plus tôt, toujours à propos des revues dites « avec comité de lecture », le même journal a consacré à la question des conflits d'intérêts éditoriaux l'article « A Drumbeat on Profit Takers », http://www.nytimes.com/2012/03/20/science/a-drumbeat-on-profit-takers.html. De manière fort inquiétante, la presse scientifique française garde pour l'essentiel le silence sur ce type d'informations et de débats.
Le Comité National de la Recherche Scientifique peut-il valablement fermer les yeux devant une telle situation et se dérober à un tel débat ? Je ne le pense pas, et sans vouloir ignorer le rôle du COMETS, je vous propose d'agir ensemble pour que ces questions de fond soient abordées dans la transparence.
BIBLIOMETRIE, EMBAUCHES, PROMOTIONS...
Logique « de groupe », lobbying, course à l'influence... sont autant de « solutions faciles » trop souvent cautionnées mais dont les résultats s'avèrent néfastes sur le long terme. Quelle que soit la taille des « grands projets » présents dans une discipline, le respect de la créativité des individus et des « petits groupes » reste indispensable à sa survie et à son progrès scientifique. De même, la créativité scientifique ne peut en aucun cas être valablement évaluée par un décompte des publications dans des revues marchandes dépourvues de véritable légitimité institutionnelle et auxquelles, trop souvent, sont transférés les droits d'auteur d'un travail effectué avec l'argent des contribuables. Quant aux embauches et promotions, la titularisation des chercheurs précaires doit avoir lieu sans concours et avec un statut de fonctionnaires. La séparation en deux corps doit être supprimée. Un examen critique du fonctionnement des jurys de concours est également indispensable : conflits d'intérêts, lobbying, dépendance indue par rapport à hiérarchies et groupes influents... doivent disparaître dans l'intérêt de la recherche.
Cordialement
Luis Gonzalez-Mestres
Groupe de discussion : http://groups.yahoo.com/group/problemes_des_scientifiques