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Billet de blog 9 novembre 2014

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Lenny Bottai : boxe et politique. Interview au "champion du peuple"- par Francesco Fustaneo

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9.11.14  -  Actuellement, Lenny Bottai est l'un des boxeurs italiens professionnels les plus forts : dans son palmarès il dénombre des titres comme celui de champion international IBO 2009, champion italien 2010, champion international IBF 2011, champion de la Méditerranée WBC 012 et champion intercontinental IBF 2014.

A 37 ans révolus et avec derrière lui une carrière  couronnée de succès la cerise sur le gâteau n'a pas tardé à venir : l'International Boxing Federation lui a en effet offert la possibilité de disputer en décembre aux Usa la mi-finale pour le titre mondial des super-welter. Lenny se battra à Las Vegas contre le texan Jermall Charlo (19 victoires dont 15 par kilo, 24 ans) et le gagnant du match pourra successivement affronter le champion Cornelius "K9" Bundrage, 41 ans, de Détroit.

Nous rencontrons Lenny une après-midi de fin octobre à Palerme : il est dans le chef-lieu sicilien pour présider un stage de boxe organisé par la Palestra Popolare Antifa (la Salle de Sport Populaire Antifa) et promu par le CoNaSP (Coordination Nationale pour le Sport Populaire). L'observer même seulement entraîner et donner des conseils à un groupe nourri de jeunes boxeurs dans les locaux occupés du centre social ex Pénitentiaire de la rue San Basilio, met les frissons : un physique sculpté par des années de séances d'entraînement, des tatouages voyants, le regard vitreux, un caractère de potache et la fierté typique de sa ville natale, la laborieuse et rouge Livourne.

Comme les crochets qu'il décoche sur le ring, non moins fermes sont ses idées politiques, mûries aussi grâce à la proximité en âge juvénile des milieux antagonistes livournais : des idées cohérentes avec les actions et les comportements qui, en symbiose avec le militantisme entre les files des supporters du stade livournais et les lignes d'arrivée atteintes, en ont fait l'une des idoles de la courbe Nord, les supporters les plus à gauche d'Italie. 

- Lenny quelle valeur attribuer à ta participation à un stage de boxe organisé dans le sud profond d'Italie dans des locaux occupés par des jeunes d'une Salle de Sport Populaire ?

Une signification immense. L'accessibilité au sport est une "bavardage" que toutes les institutions officielles aiment exhiber, mais la réalité dit bien autre chose. C'est-à-dire ce que signifie qu'une réalité sensible à certaines thématiques, développe un moment de maturation et de confrontation collective de qualité en parlant de sport et la rende accessible à beaucoup de jeunes, est quelque chose de vraiment important. C'est "faire", c'est "donner des réponses", c'est "créer".

- Faisons un bond en arrière dans le temps : qu'est-ce qui t'as poussé à pratiquer la boxe et quel a été le ressort  qui t'a donné la passion de la politique ?

A la boxe je me suis rapproché à 14-15 ans ; j'ai commencé par le kick boxing, parce que la salle de sport était proche de chez moi et je n'avais pas de mobylette. Puis je suis passé justement à la boxe et j'en suis tombé amoureux . Evidemment, je considère que tous les sports de combat sont fantastiques et chacun a un penchant pour l'un ou pour l'autre. Je pense que lorsque tu le sens à l'intérieur tu comprends.

Quant à la passion politique c'était simple : je suis livournais, donc par tradition urbaine j'ai une "inclinaison" précise, puis après les premières luttes à l'école l'étincelle a pris. Ce fut même grâce à une manifestation étudiante que j'entrai dans la première gestion du Csoa Godzilla ; après ma formation a eu lieu aussi et surtout dans la patrimoine familier bibliographique. Certains font des idées politiques un slogan, des drapeaux et des symboles, mais ce sont les idées, les grandes idées du 19e et du 20e siècle qui ont tout fait. Autrement ça serait quelque chose de semblable à fait le supporter pour une équipe de foot. Ce qui n'est pas mal, mais c'est différent.

Les déclarations données au cours de tes interviews, cette clé anglaise et le marteau tatoués sur la poitrine qui rappellent tellement le marteau et la faucille de "communiste " mémoire sont plus éloquents qu'une carte du parti : ta foi politique est évidente, mais penses-tu réellement que le communisme soit un idéal vers lequel la société actuelle devrait encore tendre ? 

Tout d'abord, ce ne sont pas une clé et un marteau : c'est un symbole soviétique et au delà du rappel purement historique, c'était joint à tous les secteurs techniques. Il symbolise justement que la force nécessite soin et précision. C'est un concept non seulement physique mais aussi idéologique. Au-delà de ça, il campe au-dessus d'un scène de guerre de la défense de Stalingrad et donc il est aussi une commémoration envers qui nous a sauvé de cette existence qui, si elle se serait affirmée, elle n'aurait permis de faire même pas cette interview. En revenant à ta question je retiens que Marx soit assez plus actuel que le capitalisme dominant d'aujourd'hui. Et en tous les cas, pour moi le communisme signifie essentiellement structurer une société sur des droits, les nécessités et les intérêts de la collectivité qui doivent toujours et de toute manière précéder les intérêts individuels. Par la suite, les applications sont autre chose. Le passé est passé, ce qui sert c'est un futur. Les masturbations mentales immenses qui accrochent les révisionnistes et les anti-révisionnistes, peut-être ont assez plombé les évolutions des nombreux mouvements de chez nous.

Boxe et engagement politique : un binôme possible ?

Bah… écoute, un boxeur, un athlète, est aussi un homme, donc s'il s'abandonne à l'invitation de ne penser qu'au sport, il ridiculise son existence. Il est évident et ça doit être clair, dans la salle de sport on fait du sport. Le militantisme après on le fait où on veut et où on le retient le plus opportun. Les deux aspects ne doivent jamais se limiter. Après les choix concernent l'homme, non l'athlète, mais il faut se rappeler que l'athlète est un homme, donc sa culture compte. Le problème est que souvent l'appartenance politique, n'est pas le fruit d'une culture mais de choix de commodité, ou bien encore pire, d'une superficialité. Il est évident que avoir les idées claires limite des possibilités dans la vie, donc aussi dans le sport. Moi j'en ai des claires. Je ne l'ai jamais caché (même en voulant…!!!) mais lorsque je suis dans la salle de sport, sur le ring ou dans le coin, je suis boxeur ou entraîneur. Lorsque je fais les cours je suis formateur. J'espère être jugé bien ou mal pour cela. Parce que je ne sais si ça me gênerait plus être méprisé dans cette fonction pour mes idées, ou bien être surestimé ou "mythifié" pour les mêmes. Le sport n'est pas un moyen de propagande, mais le sportif n'est pas un idiot qui ne doit pas avoir une "respiration" idéologique.

- Si tu devais indiquer deux exemples : le boxeur et l'homme de gauche qui t'a le plus inspiré.

Cette question me met en difficulté, parce que de boxeurs qui m'ont inspiré et que j'admire il y en a vraiment beaucoup. D'hommes "de gauche", pour s'entendre même si le terme est trop renzien…aussi. Puis en citant quelques uns parmi les deuxièmes je risquerai de planter la discorde. Disons pour rester tranquilles qu'un grand exemple récent duquel nous devrions apprendre beaucoup a été Hugo Chavez : il a actualisé et adapté beaucoup les idées que je considère comme fondamentales. Du point de vue de la boxe j'ai toujours été lié à la figure de Sonny Liston, parce que au-delà de la bravoure et peut-être fausseté médiatique de Ali, Liston était le noir parmi les deux. C'est pour ça qu'il a subi le racisme deux fois. La première par son état, et la deuxième par le sus-cité, qui n'a jamais perdu une occasion pour souligner que l' "ours moche" était le "noir méchant". Au-delà de ceci, son histoire a été incroyable, à seulement un peu plus de vingt ans il a enfilé les premiers gants de boxe en prison. Puis est devenu Sonny Liston.

Francesco Fustaneo 

Contropiano.org

http://contropiano.org/archivio-news/documenti/item/27401-lenny-bottai-boxe-e-politica-intervista-al-campione-del-popolo

La page facebook de Lenny Bottai :

https://www.facebook.com/pages/Lenny-Bottai/107888402622820?sk=timeline&ref=page_internal

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