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Billet de blog 18 décembre 2014

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Sortir de l'Otan, c'est possible - par Alberto Fazolo

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15.12.14 - La sortie de l'Italie de l'OTAN a été pendant des décennies un objectif stratégique pour beaucoup de formations politiques d'orientation et typologie différentes. Malgré que cet objectif fusse largement partagé par des secteurs transversaux de la société et des institutions, non seulement il n'a pas été atteint, mais il n'a même jamais été effleuré.

par Alberto Fazolo

Avant la chute du Mur de Berlin et de la dissolution de l'Union Soviétique, le monde était nettement partagé entre deux Blocs : le socialiste et le capitaliste occidental. Cette répartition était le fruit des accords de Yalta signés par les vainqueurs de la Deuxième Guerre Mondiale (Unions Soviétique, Usa et Grande Bretagne). Bien qu'il y ait eu plusieurs tentatives de parcourir des voies "tierces" par rapport à cette répartition, celles-ci n'ont pas réussi (sinon marginalement) à altérer les équilibres atteints.

Le déconcertant schématisme du scénario a été pour la plupart défini et renfoncé par la "Guerre Froide", soit par l'évidente opposition entre deux Blocs, chacun desquels s'était doté d'une alliance militaire, le Pacte de Varsovie hégémonisé par l'URSS et l'OTAN hégémonisé par les USA.

Dans ce contexte se ranger dans l'une des deux alliances signifiait surtout choisir dans lequel des deux Blocs se situer (malgré qu'aucun Pays de chaque positionnement, n'ait peut-être jamais pu réellement "choisir"). Pendant la Guerre Froide, les USA n'auraient jamais pu accepter l'éloignement de leur propre sphère d'influence d'un Pays stratégiquement important comme l'Italie. En même temps, très probablement l'URSS n'étaient pas particulièrement inquiète à l'idée d'altérer les équilibres de Yalta et un éloignement de l'Italie de l'OTAN soutenu (plus ou moins directement par l'URSS) n'a jamais été une hypothèse vraisemblable. D'autant moins qu'il n'aurait pas été plausible un éloignement autonome, fruit de l'autodétermination du peuple italien.

Dans ce cas-là les USA auraient été prêts à intervenir militairement, à travers le soutien à un coup d'état voire même par une action militaire directe ; il n'y a pas de raison d'exclure que dans les deux cas l'URSS aurait préféré ne pas rester impliquée dans cet affrontement là.

En résumé, avant la chute du Mur de Berlin un éloignement de l'Italie de l'OTAN aurait été une hypothèse extrêmement improbable.

Après la dissolution du Bloc Socialiste et la capitulation du Pacte de Varsovie, le monde s'est radicalement transformé et se sont créées les conditions théoriquement plus favorables pour la sortie de l'Italie de l'OTAN. Aujourd'hui le scénario géopolitique est encore plus articulé et il y a des marges de manoeuvre potentielles bien plus grandes par rapport à il y a quelques années.

Pendant la Guerre Froide l'abandon de l'Alliance de la part d'un Etat comme l'Italie aurait été vu par les USA comme une inadmissible trahison et par une partie de l'opinion publique comme un saut dans l'inconnu, tandis qu'aujourd'hui la chose n'aurait pas le même impact émotionnel dans la mesure où elle est libre du fardeau idéologique fruit de l'opposition entre les Blocs. De plus l'OTAN ne peut même plus compter sur la couverture idéologique précédente, associée à sa fonction théoriquement défensive et d'opposition à l'autre bloc militaire, mais il est évident pour la plupart qu'elle se consacre à mener des guerres de rapine et à pratiquer des ingérences politiques, constituant peu plus qu'un groupe d'intérêt économique et raisonnant en termes entrepreneuriaux sur la base d'analyses coûts/bénéfices. Si les USA se rendaient compte que faire barrage à la sortie d'un pays de l'OTAN lui coûterait plus des avantages que sa présence garantit, probablement elle le laisserait partir.

Même sur le plan stratégique, l'Italie apporte une contribution non essentielle à l'OTAN. Nous avons des Forces Armées qui pendant tout le deuxième après-guerre ne se sont jamais distinguées pour l'efficacité ou la capacité offensive. En outre, le fait que l'Italie sorte de l'OTAN pourrait ne pas avoir nécessairement des conséquences directes sur la présence USA dans la Méditerranée, dans la mesure où les bases de l'Alliance dans notre pays probablement resteraient de toute manière sous leur contrôle.

Il ne semble pas possible de penser que les USA soient prêts à réaliser un putsch traditionnel dans un pays UE, ni d'autant moins à tenter une intervention militaire directe. Donc en cas d'abandon de l'Alliance de la part de quelques pays de l'UE, même le spectre de la réaction militaire semblerait s'être évanoui. Evidemment, cela ne signifie pas qu'il n'y aurait pas de réactions, des rétorsions et des représailles politiques et/ou économiques.

Aujourd'hui en Europe l'OTAN ne jouit pas d'une grande popularité. Elle est perçue comme un vieux résidu belliciste rouillé et déglingué. Nombreux sont ceux qui se demandent à quoi cela peut servir de garder sur pied un semblable (très très cher) appareil après la fin de la Guerre Froide. A cette interrogation la principale réponse est celle de doter les puissances occidentales d'un instrument pour leurs guerres impérialistes de rapine. Mais cela fait exploser l'une des contradictions les plus insoutenables au sein de l'OTAN : de plus en plus les différents membres se disputent pour le partage du butin. USA et UK se garantissent constamment les parts les plus riches et cela engendre l'intolérance de beaucoup de partenaires, et tout d'abord de la France.  

Dans beaucoup de pays adhérents à l'OTAN est en acte un vif débat sur la possibilité d'abandonner l'Alliance et dans certains cette position pourrait dans un bref délai devenir majoritaire.

Aujourd'hui en Italie il y a beaucoup de forces politiques qui (du moins verbalement) veulent sortir de l'OTAN, à côté des traditionnelles s'ajoutent des nouvelles : tout le Mouvement (anti-OTAN,ndt), la presque totalité de la Gauche, presque tous les pacifistes, des secteurs marginaux des partis de gouvernement, des composantes des partis engendrées par le MSI, presque tous les mouvements néo-fascistes, une partie consistante du M5S et la Ligue du Nord. Bien qu'aucune de ces forces (ou leurs coalitions possibles) puisse en aucune manière être hégémonique, on note qu'une très large partie de l'Italie serait prête, dès maintenant, à sortir de l'OTAN. Evidemment, les forces politiques mentionnées sont incompatibles entre elles, donc il est à exclure (avec le soulagement de nombreux) toute possibilité de construire un mouvement unitaire anti-OTAN. Ceci ne signifie pas cependant que les forces progressistes ne doivent pas s'organiser pour construire un parcours de lutte qui lui soit propre.

Aujourd'hui l'OTAN est dans une grave crise de prestige et montre aux yeux du monde toute sa faiblesse soit pour les nombreuses défaites sur le plan militaire, soit pour des raisons économiques et aussi pour des raisons politiques. C'est le moment juste pour s'en aller. L'OTAN, avec tous les problèmes qu'il a, pourrait ne pas faire résolument obstacle à la sortie d'un partenaire comme l'Italie. Aussi parce qu'elle est aussi considérée comme un partenaire lâche peu fiable et arrogant.

Depuis plus de 10 ans les Forces de l'OTAN collectionnent les défaites militaires et ont dû fuir "la queue entre les jambes" de plusieurs pays qu'ils ont envahi.

De plus l'OTAN, (mal conduite par les USA), à l'aube du nouveau millénaire était convaincue d'avoir crée un gap technologique insurmontable entre son armement et la capacité militaire de quiconque d'autre. Elle se sentait prête à ouvrir de nouveaux conflits ultra technologiques dans lesquels elle aurait pu employer de nouvelles armes très sophistiquées et un nombre réduit de soldats. En réalité, cette technologie n'est pas encore au degré de maturation vantée par les USA, mais surtout le gap technologique a été amplement récupéré par plusieurs pays parmi lesquels  (même si seulement pour certaines technologies) la Chine, la Russie et l'Iran.

La crise économique qui a investi les pays occidentaux s'est inévitablement retournée aussi sur l'OTAN. Les Etats sont particulièrement affaiblis et sont en train de chercher un "souffle" en essayant de couper le plus possible la dépense publique. Inévitablement, parfois ces coupes peuvent (bien que de manière réduite) concerner aussi la dépense militaire. La course aux nouvelles technologies militaires, les aventures néo-coloniales, une armée de professionnels très bien rémunérés, etc., représentent des coûts difficiles à soutenir en une période de crise économique si profonde. En Italie quelques coupes ont été faites, mais il s'est agi pour la plupart d'opérations de maquillage.

Cependant l'OTAN est sérieusement préoccupée pour cette tendance aux coupes de la dépense militaire des gouvernements partenaires. A ceci il faut ajouter que les Etats destinent un pourcentage de leur PIB à la dépense militaire, mais la crise a fait diminuer sérieusement la valeur absolue du PIB, par conséquent le quota variable destiné aux armements s'est inévitablement comprimé. Pour faire face à ces réductions de la dépense, l'OTAN est en train de demander à ses propres partenaires d'augmenter le pourcentage du PIB destiné aux armements. En Europe, il y en a beaucoup qui considèrent la demande pour le moins inopportune étant donné qu'elle arrive dans une période dans laquelle on coupe sans scrupules et sans mesure sur l'état social, l'instruction, la recherche, la protection de l'environnement, etc. Cette indifférence est aussi alimentée par le fait que les USA exploitent impunément leur propre hégémonie au sein de l'OTAN pour imposer aux partenaires des acquisitions pour le moins non rentables. L'exemple le plus connu et éclatant est celui relatif aux F-35, des avions très chers qui présentent des qualités techniques controversées.

Dans cette phase on se trouve dans un contexte particulièrement propice pour engager un processus de sortie de l'OTAN aussi en vertu de l'actuel scénario politique international. L'Alliance est affaiblie, les conflits internes sont en train de la dévorer, elle se présente comme déséquilibrée et elle montre de graves points critiques ou contradictoires émergés dans au moins cinq différents théâtres de guerre : Libye, Kurdistan, Palestine, Ukraine et Tchétchénie.

En Libye est arrivé un fait aussi grave qu'inédit : des membres de l'Alliance (France et UK), sans l'autorisation des USA, ont déclenché une offensive à un pays (la Libye) allié stratégique d'un autre membre de l'Alliance (l'Italie). Ceci pas seulement a lésé les intérêts nationaux italiens, mais a pour la première fois mis aussi en discussion l'hégémonie USA.

Pour arrêter l'avancée du soi-disant "Etat Islamique" (ISIS) sans pour autant être impliqué dans un conflit qu'ils n'auraient pas pu gérer, les Pays de l'OTAN ont délégué aux Kurdes la guerre. Ceci s'est traduit par l'envoi des soi-disant fournitures d'armements à différentes formations kurdes. La Turquie (qui est la deuxième armée de l'Alliance pour le nombre) n'a pas perçu positivement ce choix, parce qu'elle est parfaitement consciente que après l'expulsion de l'ISIS (avec laquelle elle montre nombreuses connivences), ces armes serviront aussi à libérer le Kurdistan turque.

En 2014 des Pays occidentaux (parmi lesquels certains appartenant à l'OTAN) ont engagé le processus de reconnaissance officielle de l'Etat de Palestine. Ceci à engendré la colère du gouvernement israélien, qui dans la mise en acte de ses propres représailles finira par déchirer ultérieurement la tenue de l'Alliance. Pour différentes raisons Israël est pour l'OTAN d'importance fondamentale : pour sa capacité d'influence sur le gouvernement USA, pour sa propre contribution au développement des technologies militaires, pour sa position stratégique, etc.

En Ukraine les USA ont soutenu un putsch qui a enclenché une grave crise contre la Russie et qui pourrait avoir des conséquences désastreuses pour l'humanité entière. Beaucoup de pays OTAN, (par intérêt économique ou parfois aussi par bon sens), essaient de ramener Obama à des conseils plus indulgents, qui cependant continue follement à "jeter de l'huile sur le feu". Beaucoup d'observateurs soupçonnent que la réactivation de l'affrontement en Tchétchénie ait été déclenchée par les USA avec pour but d'ouvrir un deuxième front sur lequel engager l'armée russe. Cependant le soutien aux milices tchétchènes n'est pas toléré par l'opinion publique occidentale, ou du moins par cette partie qui ne fait pas semblant d'avoir oublié le massacre des enfants dans l'école de Beslan. Encore une fois, l'OTAN a commissionné le "sale travail" aux pires espèces de criminels, exactement comme il avait fait en : Afghanistan, Yougoslavie, Syrie, Ukraine, etc. Sans cependant apprendre la leçon plus importante, soit que ces criminels tôt ou tard se seraient retournés contre eux.

Maintenant l'OTAN est dans sa phase de majeure faiblesse. Nous nous trouvons devant la dernière occasion pour en sortir, et même dans quelques mois ça pourrait être trop tard. L'OTAN est plus qu'éprouvée, mais elle est en train de se réorganiser et est en train de trouver une plus grande vigueur par le nouveau rôle qu'on lui confiera : être le bras armé du TTIP. A ce point, toutes les contradictions qui la déchirent seront mises de côté (bien que non refoulées) au nom des intérêts économiques colossaux qui découleront de cet accord si mystérieux. 

Si on perdait cette occasion probablement nous resterons sous le joug américain pour beaucoup d'autres décennies. 

source : 

http://contropiano.org/interventi/item/28114-uscire-dalla-nato-si-puo

coût : 72 millions par jour (et bientôt 100 millions)

STANDING ARMY - un documentaire d'Enrico Parenti & Thomas Fazi (2010) 

langue : anglais

Au cours du siècle dernier, les États-Unis ont silencieusement encerclé le monde avec un réseau de bases militaires incomparable à tout autre dans l'histoire. Aucun continent n'est épargné. Ils ont façonné la vie de millions de personnes, mais cela reste un mystère pour la plupart. 

Avec Gore Vidal et Noam Chomsky.

https://www.youtube.com/watch?v=Vm3JA9GOYf0 

Standing Army (Armée de métier, permanente) explore le déplacement historique des populations indigènes, y compris l'Italie, à Diego Garcia (une île de l'océan Indien) et le Moyen-Orient. Le film pose que si la définition traditionnelle du terme empire signifie la possession de colonies, la fondation d'un «empire américain» est basée sur un réseau mondial de bases militaires.

Tandis qu'ils étaient habituellement utillisés comme simples supplétifs dans des conflits de quasi-guerre, ils ont été souvent formés lors des lendemains des interventions des USA en conflit, soulevant la question de savoir s'il s'agit là d'une stratégie intentionnelle. 

Le film présente plusieurs données et conclut avec la théorie de Chalmers Johnson, ancien conseiller de la CIA, qui estime que ce nouveau type d'impérialisme contient une force de recul auto-destructrice qui conduira à moyen terme à un déclin et la ruine de la suprématie américaine dans le monde. 

la fiche wikipedia du film :

http://en.wikipedia.org/wiki/Standing_Army_(film)

sur l'armée de métier :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Armée_de_métier

http://en.wikipedia.org/wiki/Standing_army

Sur Chalmers Johnson :

http://en.wikipedia.org/wiki/Chalmers_Johnson

en français (ave des erreurs) :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Chalmers_Johnson

en italien (avec une liste de vidéos-interviews) :

http://it.wikipedia.org/wiki/Chalmers_Johnson

voir aussi ce site :

http://www.peaceandjustice.it/film-series.php

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