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Billet de blog 13 janvier 2012

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Topos de laboratoire II

Le meilleur moment, quand on va dans un laboratoire faire une conférence, c’est souvent « le tour du labo ». Avant ou après le traditionnel séminaire (c’est comme ça qu’on appelle des conférences chez nous), un chercheur du labo emmène le visiteur, visiter.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le meilleur moment, quand on va dans un laboratoire faire une conférence, c’est souvent « le tour du labo ». Avant ou après le traditionnel séminaire (c’est comme ça qu’on appelle des conférences chez nous), un chercheur du labo emmène le visiteur, visiter. Hier encore, j’avais un visiteur (Hervé Arribart), et le conduisais à travers les passerelles, voir quelques expériences en cours au laboratoire Matière et Systèmes Complexes.

La visite commence en général par les bureaux, qu’il faut bien traverser. Voici un exemple de couloir à bureaux :  on sent déjà l’effervescence propre aux laboratoires de recherche, non ? Ici après, un théoricien en plein travail.

Au bout du couloir, une première salle d’expériences, la salle dite « méduses », et « embryons », où l’on élève des méduses, et des embryons de poulet, pour des recherches en biologie du développement, soit du développement des vaisseaux sanguins, soit de l’embryologie proprement dite.

Excusez, y’a du b…l, on vient d’installer une nouvelle hotte de sécurité. Si vous regardez bien sous la table : une cave à vin servant à stocker des embryons, en les maintenant à 14°.

Au fond de cette salle, un sas, qui donne accès à une salle de sécurité biologique de type « P2 », ou l’on pourrait en principe faire des choses plus dangereuses, notamment avec du sang humain. Hélas, suite à une explosion dans la salle d’à côté, les évacuations ont été raccordées, au moment de la remise en état, en dépit du bon sens, et maintenant l’air est expulsé directement sous le nez des collègues d’à côté, donc on ne peut plus maniper ici.

A côté, en suivant les portes ouvertes, une salle de chimie flambant neuve : c’est le cas de le dire, ça a cramé l’année dernière et tout a été refait (après de nombreuses inspections de sécurité).

De l’autre côté du plateau, une vaste salle accueille les expériences de Yves Couder, Emmanuel Fort, Constantin Heddi … sur l’hydrodynamique des gouttes rebondissantes, et retentissantes, puisque ces expériences proposent rien moins qu’une interprétation nouvelle de la mécanique quantique.

Dans la même salle, moins médiatisées, des expériences de jet d’eau oscillant à la surface d’une paroi vitrée, m’est-avis que ça a un rapport avec la pluie sur les pare-brises, mais j’en sais pas plus.

Dans un coin le classique tableau où l’on débat des hypothèses et des  résultats.

A remarquer : en haut de la photo, une douche d’urgence pour les blessés. Pour mémoire, il y a quelques années  j’ai failli perdre les yeux au cours d’une explosion d’une bouteille sous pression entre mes mains (c’était dans un autre labo) ; un collègue m’a ramassé (au sens propre), et m’a immédiatement jeté sous la douche. De ce moment où, à-demi inconscient, j’étais maintenu sous la douche les yeux grands ouverts, mais sans plus rien voir et momentanément persuadé d’avoir perdu la vue, j’ai gardé le souvenir d’une eau froide qui inondait mon visage, et coulait dans ma bouche en laissant un goût affreux de vieille eau rouillée. Mon conseil : avant de jeter quelqu’un sous la douche de sécurité, en particulier les yeux grands ouverts : faire couler l’eau un peu au préalable (vu que c’est une douche qui sert environ une fois tous les 20 ans).

Au même étage, des ateliers de mécanique, d’informatique, d’électronique, qui constituent le discret mais au combien important « support technique » du labo. Le mot support est bien choisi : sans eux, tout s’écroule. Et ils nous supportent !

Parmi ses caractéristiques architecturales, le bâtiment Condorcet est équipé de coursives, passerelles et escaliers métalliques en colimaçon (qui font blog-blong-blong quand on descend) permettant d’accéder aux étages supérieurs et inférieurs (moi je suis au 7e).

Au 8e, on trouve encore de  grandes salles, dont une où s’épanouissent nombre de végétaux étudiés par Stéphane Douady et d’autres. Stéphane et ses collaborateurs essaient de répondre à des questions relatives à la forme et à la dynamique de croissance des feuilles (phyllotaxie, forme des feuilles et repliement dans les bourgeons, mouvements d’oscillation ou de redressement en relation avec la gravité et les cycles jours/nuit). Il y a aussi des expériences en plein champ, pas à Paris XIIIe, évidemment, mais en collaboration avec l’INRA de Montpellier (je crois). Il paraît qu’il suffit d’attacher les plantes pour qu’elles poussent plus vite, ou moins vite, je ne sais plus (les oscillations dans le vent influent sur la vitesse de croissance, ça stimule la plante).

Ça par contre, c’est juste une plante verte dans un couloir :

 Ceci, ci-dessous, je ne sais pas si c’est une expérience, ou juste une plante verte :

Dans la même salle, une expérience stupéfiante de reconstitution de paysages de désert… dans une cuve d’environ 2 mètres de long.

Les mouvements de dunes posent des problèmes sérieux dans des régions comme la Mauritanie, où les dunes avancent et envahissent les route ou habitations, un peu comme la neige en hiver dans nos pays, sauf que les grains de sable ne fondent pas au printemps. Ces champs de dunes posent des questions fascinantes de physique, et en jouant avec les paramètres du problème (densité du fluide, densité du sable, vitesse etc.) on peut reconstituer à une autre échelle la dynamique de ces dunes, d’où cette cuve, assez grande pour une expérience de coin de table, mais si petite pour ceux qui aiment les déserts d’un si grand amour (un livre : « Des pieds et des mains », Champs Flammarion, offert au premier qui me dit à quoi cette phrase fait allusion).

Sous les tables, dans le bric-à-brac, des caisses de sables venant de divers (tous ?) déserts de la planète… qui sont probablement ce que les chercheurs dans ces salles ont de plus précieux (les chercheurs s’attachent à des choses bizarres, parfois).

Au 6e étage, des expériences de très grande précision sur des cellules uniques, sous des microscopes très précis, et dans des incubateurs sous atmosphère contrôlée etc.. Parmi ces expériences, des expériences de traction ou compression sur des cellules (Atef Asnacios), des expériences de « coinçage » de cellules dans des petites boites (les cellules changent de comportement si on les serre fort) –Sylvie Hénon des observations des forces de traction exercées par les cellules sur leur substrat (Pascal Hersen Benoît Ladouxet al.).

Plus loin, de la microscopie de force atomique sur des tissus végétaux, dont le but est de relier les directions de croissance, à la micro-organisation des parois végétales (en relation avec les différences d’élasticité (Alexis Paucelle)

Plus loin encore, à côté du secrétariat, une salle très propre ou Florence Gazeau, Claire Wilhelm et leurs complices essaient de fabriquer des vaisseaux sanguins artificiels. A partir de maquettes en polysaccharides, elles parviennent à fabriquer des tuyaux biologisés, en forçant des cellules à décorer le tuyau. Pour forcer les cellules, elles leur font gober des nanoparticules magnétiques, et une fois qu’elles (les cellules) ont avalé ça, « y’a plus qu’à » les tirer avec des champs magnétiques (« y a plus qu’à » mouahahahaha, je sais pas comment elles font… Vu de l’étage au-dessus, c’est génial).

Un billet de blog ne doit pas être trop long, et les visites de labo non plus, les visiteurs ayant souvent un train ou un avion à prendre, ou des enfants à aller chercher à la crèche.

Donc, voilà, c’était juste un petit tour d’environ un quart du labo.

PS1 : Je dédie ce billet à Patrice Flaud, qui en combattant les flammes à l’extincteur, alors qu’elles léchaient les armoires à solvant,  a sans doute, avant l’arrivée des pompiers, sauvé notre outil de travail.

PS2 : On peut lire également, en rapport avec les topos de laboratoire :

http://blogs.mediapart.fr/blog/vincent-fleury/051011/topos-de-laboratoire

PS3 : On peut lire également, en rapport avec l’adresse du laboratoire :

http://blogs.mediapart.fr/blog/vincent-fleury/271011/alice-domont-et-leonie-duquet

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.