Ce n'est pour l'instant pas grand chose: une simple déclaration écrite signée par 387 eurodéputés exigeant plus de transparence dans la négociation de l'accord commercial anticontrefaçon (ACTA) et le respect du principe de subsidiarité. Mais il sera transmis au Conseil et à la Commission qui n'en reçoit pas tant (5 depuis le début de l'année sur 55 déposées). Et pourrait même se doubler, avant le début du dernier cycle de négociation, fin septembre à Tokyo, d'une résolution du Parlement, pour s'assurer que les négociateurs européens comprennent bien ce que les eurodéputés attendent d'eux.
Car si ni la déclaration écrite ni la résolution ne sont contraignantes pour l'exécutif européen, le traité de Lisbonne prévoit que le parlement européen doit donner son consentement à tout accord signé par l'Union, faute de quoi il n'entre pas en vigueur. Plus de la moitié des eurodéputés ayant signé la déclaration, c'est donc pour le commissaire au commerce, le Belge Karel De Gucht, une bonne indication de l'humeur des parlementaires à l'égard de cet accord multilatéral. Et un appel du pied pour que les négociateurs européens tentent in extremis d'infléchir le texte pour faire prévaloir les garanties de la procédure judiciaire, les droits fondamentaux, la vie privée et la liberté d'expression sur la protection des droits d'auteurs et des brevets.
Déjà, les parlementaires européens avaient obtenu du commissaire qui venait de s'installer d'être régulièrement informés de l'avancement du dossier. C'est désormais le cas puisque, si les versions provisoires ne sont pas communiquées systématiquement, ils reçoivent régulièrement des états des lieux en commission du commerce ou dans les réunions de groupes politiques.
Mercredi 8 septembre matin, lors du débat sur l'ACTA en assemblée plenière, Karel De Gucht a tenté de montrer aux élus qu'il avait repris la main politique sur un dossier géré auparavant par l'administration de la Commission. Il s'est également montré sceptique sur l'issue des négociations: «Si l'UE se trouve face à un traité international qui n'apporte aucune valeur ajoutée, il faudra reconsidérer notre participation». L'eurodéputé italien Niccolò Rinaldi (Alliance des démocrates et des libéraux) a abondé dans ce sens: « 64 % des contrefaçons viennent de Chine, qui ne prend pas part aux négociations. Faut-il ainsi souscrire à un tel accord?»Le socialiste français Kader Arif a exigé «plus de transparence» et le Vert allemand Jan Philipp Albrechts souligné que la proposition d'accord serait trop vague et risquerait d'«ébranler la législation européenne».
Les groupes politiques devraient décider la semaine prochaine s'il doivent lui donner un mandat plus marqué en votant une résolution avant le début des négociations de Tokyo.