A l'instar de Guy Mollet, Président du Conseil socialiste qui avait été accueilli par une pluie de tomates devant le monument aux morts d'Alger le 6 fevrier 1956, François Hollande s'est fait huer sur les Champs Elysées alors qu'il allait ranimer la flamme du soldat inconnu à l'occasion de la commémoration du 11 novembre 1918.
Ce grave incident, qui s'ajoute à tous les faits de révolte et de désobéissance civiques de ces dernières semaines est un signal d'alarme.
Non seulement le symptôme d'une décomposition nationale mais aussi et surtout le signal d'un début de putréfaction de notre société qui ne s'y retrouve plus dans une démocratie dont les contours et les règles ne semblent plus du tout adaptés au temps présent et à son évolution.
De plus, même si la perspective souhaitable d'une nouvelle forme de République serait en mesure de couper court à ce malaise endémique, il convient d'examiner sérieusement les raisons profondes de cette chûte brutale de la popularité du Président, c'est à dire de la clé de voûte du dispositif constitutionnel.
On peut évidemment gloser à l'infini et jongler avec les chiffres sur les raisons de cette disgrâce. Mais il en est une qui me semble prédominante : le fait que l'électorat de François Hollande a la pénible impression de se retrouver aujourd'hui trompé, bafoué, grugé...
Mis devant le fait accompli d'une "ligne politique" qu'il ne comprend pas ou plutôt dont il n'aperçoit ni le bien-fondé ni la cohérence.
D'où cette incohérence des mouvements protestataires qui, sous couvert de l'usurpation du bonnet rouge, sont en réalité un avatar saugrenu d'un poujadisme new look.
Par ailleurs, le Saint-Simonisme rampant et technocratique* du pouvoir en place s'inscrit dans le cadre de cette Europe libérale honnie qui est sous la coupe d'un pays dont on vient de commémorer la défaite, avec des trémolos patriotiques : un curieux paradoxe !
"Le clairon de la revanche" de Déroulède sonnerait-t-il le "sauve-qui-peut" ?
* dont l'une des formules-choc était : "il faut substituer au gouvernement des hommes l'administration des choses"