
Le mois de novembre est traditionnellement dans toute la France celui de l'économie sociale et solidaire. Marseille n'y échappe pas avec une "rafale" de manifestations. La transmission des entreprises était au cœur de la table ronde organisée par l'Union Régionale des Scop Paca Corse, le mercredi 10 novembre 2010 à Marseille. La Scop (Société Coopérative de Production) s'inscrit dans ce modèle économique, et permet une solution de reprise d'entreprise totalement méconnue de leurs responsables, notamment ceux nés au moment du baby boom et qui sont sur le point de partir à la retraite... La Scop est pourtant reconnue par les Pouvoirs publics qui la regardent avec les yeux de Chimène, pour préserver les emplois, sauver l'entreprise et en assurer la transmission, grâce au renforcement de leur compétitivité par l'innovation et par l'apport et le partage de valeurs modernes, comme la démocratie et la solidarité ! Cerise sur le gâteau : les emplois ne sont pas délocalisables.
La transmission des entreprises était au cœur de la Table ronde organisée par l'Union Régionale des Scop PACA Corse, le mercredi 10 novembre 2010, Station Alexandre à Marseille sur le thème : « Reprise de l'entreprise par les salariés dans le cadre de la transmission ».
Il s'agissait de présenter cette opportunité, hélas ! trop souvent méconnue de la reprise d'entreprises en phase de succession, y compris par ses propres salariés. Ce mode de transmission a pour mérite, principal et reconnu, la préservation des emplois. Il s'agissait aussi d'en voir les atouts sans en cacher les contraintes, de mettre le projecteur sur un problème qui va prendre de l'ampleur.
En ces temps de crise et de « frilosité » bancaire, qui va racheter les entreprises des "papies boomer" ?
« D’ici 5 à 10 ans, 40 000 entreprises seront confrontées à la transmission en Provence-Alpes-Côte d’Azur, ce qui représente plus de 250 000 emplois. Si l’on tient compte des transmissions qui s’effectueront pour d’autres raisons que le départ à la retraite du dirigeant, le nombre total de reprises devrait doubler sur cette période », avertit le Conseil Régional Paca qui a pris la mesure des enjeux. Il estime, non sans raison, semble- t-il, que la formule Scop (Société Coopérative de Production) des entrepreneurs salariés est la plus adaptée pour assurer le succès des transmission d'entreprises et préserver les emplois. Une opinion partagée par beaucoup de collectivités territoriales, pas seulement de notre région mais dans toute la France.
Les patrons partent à la retraite : qui va reprendre leurs entreprises ?
Sur le fond d'une crise financière dévastatrice qui impacte très fortement l'économie, la France est confrontée à des redoutables défis : les pressions conjuguées de la finance et de la concurrence mondiales qui entrainent de nombreuses fermetures d'entreprises, certaines jugées « insuffisamment rentables » par la finance internationale qui délocalise à tour de bras... Il y a aussi le prochain départ à la retraite de dizaines de milliers « papy-boomers », chefs de TPE et PME... C'est un véritable tsunami qui s'annonce !
Les enjeux sont colossaux : il s'agit chez nous de la survie de dizaines de milliers d'entreprises... Des centaines de milliers d'emplois de salariés, directs ou induits sont dans la balance, sans compter ceux des artisans, commerçants et professions libérales qui dépendent d'elles pour leurs activités. Tous nos territoires sont concernés, notre système économique, social, administratif, fiscal est en danger. Rien de moins !
Il n'est de richesses que d'hommes
Pour Patrick Lenancker, Président de la Confédération Générale des Scop, « la crise financière, d'une grande brutalité, a transféré ses bêtises dans le monde économique.... Son éthique, selon laquelle l'argent crée l'argent, est peu respectueuse des personnes et de la planète, c'est le moins qu'on puisse dire... Elle va même jusqu'à instituer une droit de polluer ! Son éthique est à des années-lumière de celle des Scop. » Jean-Luc Modica, le président de l'Union Régionale des Scop Paca et Corse, opine du chef. Le ton est donné.
Face aux menaces qui pèsent sur le tissu économique local, « le Conseil Régional Paca a décidé d'associer ses efforts à ceux de l'Union régionale des Scop Paca et Corse », rappelle Michèle Trégan, 2ème Vice-Présidente de la Région Paca, à la Commission Emploi, Développement Economique Régional, Enseignement Supérieur, Recherche et Innovation.
Elle remplaçait le Vice-président Christophe Castaner, retenu par une importante réunion sur la formation. Décidément, la région est sur tout les fronts pour mener la bataille de l'emploi !
Le point de vue de Christophe Castaner en matière d'économie sociale et solidaire, secteur auquel appartient la Scop, est bien connu. Pour lui, « il est urgent de redonner toute sa place au lien social qui doit être privilégié par rapport à l’argent. L’économie sociale et solidaire est une alternative aux modes marchands de production, de consommation, d’épargne, notamment, car elle repose sur des valeurs telles que la démocratie, le développement durable, la solidarité, la justice sociale, la répartition de la richesse, et une vision de la rentabilité sociale ou collective, et non pas seulement financière.» Une manière nouvelle de décliner un aphorisme de Jean Bodin, philosophe de la Renaissance : « Il n'est ne richesses que d'hommes ».
Lors de cette Table ronde, le représentant le Conseil Général de Vaucluse, Pierre Pastor, docteur en sciences de l'information et de la communication et enseignant au Cnam (Conservatoire des Arts et Métiers) et l'élue du Conseil Régional, Michèle Trégan, ont fait part de l’intérêt de leurs collectivités territoriales pour la reprise des entreprises par leurs salariés selon la formule Scop, « même si elle ne peut concerner que 15 à 20 % des cas. » Elle permet le développement équilibré en évitant « les déserts économiques ou de sièges de décision transférés en dehors de nos territoires... » La SCOP avec des associés attachés à leur enracinement local apparaît comme un bon garde-fou.
Les élus en conviennent : la solution coopérative semble particulièrement adaptée aux entreprises qui craignent de ne pas trouver de repreneurs et pour éviter les délocalisations. Patrick Lanancker enfonce le clou. : « Les Scop ont prouvé qu'elles représentent un modèle économique efficace avec ses co-entrepreneurs salariés qui partagent la même foi en la démocratie et la solidarité, et qui sont au cœur de l'économie sociale et solidaire, reconnue pour ses performances. Il s'agit pour la Confédération Générale des Scop d'aider, concrètement, les salariés à reprendre leur entreprise ». « Aider ? » Oui... mais comment ?
Convaincre les employeurs
Pour Michel Famy, directeur de l'Union Régionale des Scop Paca et Corse, véritable cheville ouvrière de l'organisation, « le premier obstacle, et il n'est pas mince... est de convaincre les employeurs ! Beaucoup ne souhaitent pas qu'on sache qu'ils sont en train de vendre leur entreprise ! Les employés découvrent le pot aux roses au dernier instant. » Mais ce n'est pas tout. « Des patrons surestiment souvent la valeur de leur entreprise, ce qui ne facilite pas la reprise. Et ils sont d'autant moins enclins à informer leurs salariés de ce problème qu'ils les considèrent comme insolvables... à tort ! car la solution coopérative est particulièrement adaptée aux entrepreneurs qui craignent de ne pas trouver de repreneurs classiques... Beaucoup n'y pensent pas, d'autres ont des préjugés sur la formule Scop » regrette-il. « Le taux de réussite des reprises d'entreprises sous le régime de la transmission par les Scop est de 84% au niveau national..» c'est le meilleur score pour ce type de reprise enregistré par l'Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques ! «En région Paca, pas d'échec connu ces dernières années ! » Alors pourquoi les patrons font-ils de la résistance ?
La Scop est une société commerciale, qu'on se le dise !
« Certains dirigeants d'entreprise, reprend Patrick Lenanker, assimilent l'économie sociale et solidaire... à un système collectiviste, voire totalitaire ! » Michel Famy résume la situation : « Pour eux, les entrepreneurs salariés sont des communistes, ils nous le disent... Tandis que pour les syndicats... les co-entrepreneurs sont des patrons ! Quelques fois, un salarié, un peu plus futé que les autres, se dit qu'il doit y avoir quelque chose de bon dans la Scop pour être rejetée comme ça... pour finalement réussir à convaincre ses collègues et son patron d'en adopter la formule ! Mais le plus souvent, c'est du corps à corps, nous devons convaincre de la modernité de la Scop ! On en trouve pourtant dans tous les secteurs d'activité : de l'usinage de pièces pour les sous-marins nucléaires à la vente de produits bio, en passant par les technologies de l'information et de la communication. Une reprise, c'est souvent l'occasion de faire rentrer de l'innovation dans l'entreprise pour renforcer sa compétitivité. »
Dans les faits, le statut de la Scop est souvent découvert « par hasard ». Il présente pourtant de sérieuses garanties, tout en mettant au cœur des entreprises l'innovation technologique mais aussi une autre forme de la modernité, à tout le moins chez nous : « la démocratie, le développement durable, la solidarité, la justice sociale, la répartition de la richesse, et une vision de la rentabilité sociale ou collective, et non pas seulement financière», toutes ces vertus chères au vice président Castaner qui font des miracles. « La Scop n'en reste pas moins, précise Michel Famy, une société commerciale qui peut recouvrir deux formes : SA (société anonyme - minimum 7 associés salariés) ou SARL (Société à responsabilité limitée - minimum 2 associés salariés). Dans les deux cas, les salariés sont les associés majoritaires. Comme toute entreprise, une Scop est soumise à la concurrence et à l'impératif de réaliser des bénéfices. » Pour être reprise en Scop, « une entreprise doit pouvoir être payée en cinq ans minimum et sept ans maximum. Il est en outre préférable d’avoir un potentiel de chiffre d'affaires suffisant pour rembourser les emprunts sans brider le financement des investissements nécessaires. » Enfin, dans les nombreux cas où le réseau Scop est contactée sur des dossiers de sociétés fragiles, « une évaluation d’expert est indispensable. »
La championne, c'est la Scop !
La Scop s'inscrit dans l'économie sociale et solidaire, dont elle constitue, l'expression la plus réactive et la plus dynamique, et aussi une des mieux organisées. Plus performantes que la moyenne française, les Scop font la nique aux crises et aux délocalisations. Elles représentent une élite de l'économie française qui ancre durablement les PME sur nos territoires. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. « Fin 2009, l'Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) dénombre 1 925 Scops (dont 89 Scic) qui emploient un peu plus de 40 424 salariés (hors filiales), soit 21 salariés par entreprise. Une moyenne bien supérieure à celle qu'en enregistre en France, toute entreprise confondue ! C'est aussi le double de la moyenne enregistrée pour l'ensemble du secteur de l'économie sociale et solidaire qui en 2006 comptait 200 000 établissements et employaient selon l'Insee 2,1 millions de salariés, soit 10% de l'ensemble des salariés ou encore 10,5 salariés par établissement. Des résultats déjà supérieurs à l'ensemble national en ce qui concerne les TPE/PME. » Pas mal du tout, quand on sait qu'en France un peu plus de 2 millions d'établissements (sur un total de 3,5 millions) n'ont aucun salarié ! Mais ce n'est pas tout : « Les salariés des Scop disposent de salaires supérieurs à ceux de leurs collègues d'entreprises classiques. » Les chiffres que nous énonçons datent des années précédentes. Qu'en sera-t-il pour 2010 ? « Il risque d'y avoir de la casse, reconnaît le directeur régional. Mais les Scop sont mieux armées que les sociétés classiques grâce à leurs réserves obligatoires, l'esprit d'équipe de leurs salariés, elles peuvent compter sur leurs partenaires et le réseau Scop. »
« Il reste tout un travail de communication à effectuer en direction des entreprises qui n'ont pas encore trouvé de repreneur. Sans attendre, insiste Michel Famy, car la sagesse commande de préparer quelques années à l'avance une transmission. Pour commencer, il y a un gros travail d’information à effectuer auprès des experts-comptables... » Le directeur régional n'a pas tort. Après tout, voilà une corporation bien informée... et intéressée par leur survie. Ne représentent-elles pas leur gagne-pain ?
"S'y prendre tôt"
On l'aura compris, plus tôt un entrepreneur s'y prend pour transmettre l'entreprise à ses salariés, mieux ça vaut ! Ce n'est pas sans raison : « Entre le premier contact du futur cédant avec l’Union régionale et l’achèvement du processus de transmission aux salariés, il faut souvent compter dix huit mois d’évaluation et de préparation à tous niveaux économique, juridique, financier, social et psychologique, argumente Michel Famy. Il faut notamment estimer de manière précise la valeur de la société à transmettre. » Mais il existe d'autres nécessités, comme celle d'examiner la santé de l’outil industriel, car « une cession aux salariés est difficile à envisager en cas d’investissement massif en cours ou en projet sur les premières années ».
Il s'agit aussi d'évaluer le potentiel humain : « la prise en main d’une entreprise par ses salariés suppose d’évaluer leur réceptivité à se transformer en associés de l’entreprise ; il faut savoir identifier la ou les personnes aptes à succéder au dirigeant en place. » Tout en procédant à la mise en condition financière et fiscale de l’entreprise, car « tous les dividendes doivent être à jour ».... Comment faciliter la mutation d’une SARL ? « Il est possible de la transformer en Société anonyme par actions simplifiées (l’imposition au moment de la transmission est moins élevée)... Il faut aussi s’assurer de l’existence éventuelle d’autres porteurs de capital, et de leur accord pour ce type de transmission. » Une opération qui peut prendre beaucoup de temps ! « Prévoir un minimum de six mois pour mener à bien l’opération, d’autant qu’il faut continuer à gérer l’entreprise en parallèle. Ce n’est qu’après évaluation et mise en conformité fiscalo-financière que la reprise peut être proposée aux salariés. » Il ne faut pas hésiter à faire appel à un conseil, « une tierce personne est souvent mieux placée que vous pour mener la négociation avec les salariés.... L’Union régionale des Scop s'avère encore le meilleur appui pour représenter le chef d'entreprise et finaliser la transmission. »
Convaincre les salariés
Deuxième obstacle : les salariés ! « Eux aussi ont souvent tout à gagner à se préparer à la reprise, quand elle est possible, sans attendre le dernier moment, car elle est gage de la pérennité de leur emploi... Nous intervenons selon deux axes, continue Michel Famy. Nous leur prodiguons des conseils de gestion, car chez les entrepreneurs néophytes la naïveté gestionnaire est loin d'être une rareté. Et comme les salariés n'ont pas beaucoup de capitaux, il faut les aider par des apports. L'Union régionale des Scop a donc une activité de conseil, à la fois pour la création et la validation des projets, le suivi se faisant sur 2 ou 3 ans selon la taille de l'entreprise. L'apport de capitaux s'effectue à travers trois sociétés : une société de caution mutuelle qui cautionne le prêt bancaire : « Sofiscop Sud-Est. Elle cautionne à 50% les emprunts bancaires en partenariat avec le Conseil Régional Paca ». Puis une société de capital risque : « Pargest intervient sur l'ensemble de la région et plus particulièrement sur les départements des Bouches-du-Rhône et de Vaucluse, avec l'appui de leur Conseil général, de la Caisse des Dépôts et Consignations, du Conseil Régional, de la caisse d'Épargne, du crédit Mutuel... » Enfin, il faut une société qui accorde des prêts en fonds de roulement : « Socoden s'en charge sur 5 ans... ce que les banques ne font pas », précise Michel Famy.
1 homme : 1 vote
« Au moins 51% du capital et 65% des droits de vote sont obligatoirement détenus par des salariés, selon le principe un homme une voix : voilà ce qui fait l'originalité de la Scop !» Mais la formule n'est pas rigide, comme le montre la Scic ( Société coopérative d’intérêt collectif) dite encore « Scop Plus », qui démontre toute la souplesse et versatilité du système coopératif.
Dans les Scop comme dans les Scic, il peut y avoir des associés extérieurs mais la majorité du capital est détenu par les salariés. « Alors que dans une société classique, il y a d'une manière habituelle, les actionnaires d'un côté et les salariés de l'autre, dans une Scop, il y a vocation à avoir identité entre les deux », précise Michel Famy. Et la Scop fait tout pour l'encourager. Un salarié qui rentre a vocation, après une période de probation (généralement 1 à 3 ans), à prendre des parts du capital. Dans les faits, « on constate que 80% des salariés sont actionnaires au bout de 3 ans », c'est à dire qu'ils ont rang d'entrepreneurs salariés, ils sont « coopérateurs ». Mais, « quelle que soit la quantité du capital détenu, chacun de ses coopérateurs ne dispose que d'une seule voix lors de l'assemblée générale de l'entreprise. Par contre, pour les associés extérieurs, il peut y avoir des droits de vote proportionnels au capital obtenu mais ils ne peuvent dépasser 35% du capital. » De fait, cette disposition verrouille les manœuvres extérieures hostiles et, bien entendu, les délocalisations. Ce pas dans une Scop qu'on voit des salariés partir au travail la trouille au ventre !
Un statut ambivalent mais pas ambigüe
Dans le pire des cas, celui où l'entreprise manquerait son challenge, le coopérateur reste aux yeux du Pôle Emploi... un salarié ! Il bénéficie donc de tous ses droits au chômage. Un statut ambivalent mais pas ambigüe. Mais par principe, le salarié qui prend le statut de coopérateur s'investit de manière très positive dans son travail. Ce n'est pas pour aller au chômage qu'il bosse ! L'assemblée générale de l'Union Régionale des Scop Paca et Corse, qui a précédé la table ronde, a montré un aperçu de l'appui et du conseil prodigué. Aide à la création, d'abord et pas simplement pour les entreprises saines rachetées par les salariés. Les créations nouvelles (ex nihilo), comme les entreprises en difficultés peuvent en profiter. Les entreprises bénéficient d'un suivi post création, pendant 2 à 3 ans afin d'être mises sur de bons rails. Des conseils en gestions sont prodigués pour appuyer les Scop en difficultés ou en restructuration et les adhérents sont audités annuellement. Enfin, les dirigeants et associés bénéficient de formations gestionnaires, commerciales et d'animation d'équipe. Pas si simple d'échouer sous le régime de la Scop !
« Ce qui est mis de côté... est mis de côté! »
Pour la Scic, les mécanismes coopératifs et participatifs sont identiques à ceux de la Scop. Toutefois, la Scic fait appel à des partenaires extérieurs de toutes natures : salariés mais aussi celles et ceux qui souhaitent s'impliquer dans le projet : clients, bénévoles, collectivités territoriales, partenaires privés, etc. pour la constitution de son capital, « jusqu'à 50% mais pas plus. Et ces partenaires externes ne peuvent détenir plus de 35% des droits de vote, conformément à la formule qui veut que les salariés-coopérateurs soient associés majoritaires de l'entreprise. » La formule Scic est organisée en collèges et deux sont obligatoires : celui des salariés et celui des usagers de la Scic. Cette obligation, jointe à la modicité du dividende et l'obligation de constituer des fonds de réserves limitent les appétits des partenaires extérieurs. D'autant que, comme dans 100% des Scop, le partage du profit est équitable : une part pour tous les salariés, sous forme de participation et d'intéressement ; une part pour les salariés associés sous forme de dividendes ; une part pour les réserves de l'entreprise. Et ces réserves sont définitives : « ce qui est mis de côté est mis de côté ». Les co-entrepreneurs sont rémunérés de leur travail et de leur apport en capital, mais à leur départ, celui-ci leur est remboursé sans plus-value. L'assemblée générale, qui a lieu une fois par an, fixe les grandes orientations de l'année à venir et renouvelle le mandat du dirigeant. Hé oui ! La Scop a un patron !
Avec la Scop, la solidarité n'est pas un vain mot
On a entendu de nombreux témoignages, émanant de la tribune ou de la salle, plus de 250 personnes assistaient à cette table ronde : représentants de Scop, experts comptables, avocats d'affaires mais aussi élus de collectivités territoriales. Le représentant le Conseil Général de Vaucluse Pierre Pastor, a évoqué l'entreprise Secmmi d'Avignon. « Spécialisée dans la maintenance industrielle, la mécano-soudure et l'usinage, la Secmmi a été reprise sous forme de Scop en 2004 par ses cadres et 80 salariés. Celle entreprise, ex-filiale d’un grand groupe, a connu un nouvel essor. Une réussite remarquable. »
Daniel Aurouze, Pdg d'Etec, une entreprise gapençaise de travaux publics, en a retracé la reprise en 1999 par ses 53 salariés (sur 55). Son bouclage financier n'a pas pris 15 jours ! Elle vient d'être désigné par le journal Le Moniteur comme meilleure entreprise des régions Paca et Languedoc- Roussillon pour ses performances économiques et sociales.
Maurice-Stéphane Bertaud, Directeur Régional du Crédit Coopératif a confirmé l’appui de son établissement aux reprises de cadres et salariés, tout en soulignant la rapidité de décision et l’accueil positif fait aux dossiers des Scop. La Caisse des dépôts et consignations, en la personne de Jacques Terrasse, son directeur interrégional adjoint en charge des activités universités, économie et développement durable pour l'interrégion Méditerranée confirme qu'elle apporte son appui financier pour les reprises en transmission avec la formule Scop. Voilà un très bref aperçu des témoignages.
Congrès national des Scop : à Marseille en 2012 ?
La Délégation Régionales des Scop Paca et Corse avait choisi un lieu singulier pour organiser cette Table ronde, la station Alexandre à Marseille, un joyau architectural (attribué à Gustave Eiffel) magnifiquement restauré, qui témoigne du passé glorieux de la métropole phocéenne. Cette structure soutenait la gare de triage de l’huilerie que Victor Régis, armateur et négociant marseillais avait fait construire juste avant la première guerre mondiale. Un leg de la « Belle Époque » qui croyait à l'amélioration du destin de l'humanité, grâce à la démocratie, au progrès technique, à la liberté d'entreprendre... et au droit de s'associer, un droit cher aux coopérateurs. Fallait-il voir dans le choix de la Délégation régionale des Scop de Paca et Corse un clin d'œil à l'histoire, pour la 8e édition régionale (et 2e nationale) du mois de l'économie sociale et solidaire qui se déroule traditionnellement en novembre ? Car c'est à la « Belle Époque » que la première coopérative a vu le jour en France, tandis que l'Alliance coopérative internationale était fondée en 1895 (le siège est à Genève). Un clin d'œil à l'histoire qui est aussi une promesse d'avenir, car on apprendra de la bouche-même du président Lanancker que « la candidature de Marseille avait été retenue pour l'organisation du Congrès national des Scop en 2012 » et il nous a semblé comprendre qu'elle avait de grandes chances de remporter le challenge.
La Scop : une aventure humaine avant tout
Les propos du président Lanancker confirment l'excellence du travail accompli en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Nore région compte aujourd'hui 200 Scop dont 18 Scic. Autre preuve ? Un Trophée de la Provence vient d'être décerné à Usis de Tarascon, une Scop spécialisée dans l'usinage de précision et la fabrication de pièces lourdes dont le diamètre peut atteindre 6 mètres et un poids de 40 tonnes. Son dirigeant, Mathieu Odaimy, reconnaît avoir découvert la formule Scop « par hasard », au lendemain de graves inondations qui avaient mis l'usine à l'agonie. Il a relevé le challenge avec 45 salariés. Et un nouvel état d'esprit : celui qui caractérise les Scop, des entreprises de l'économie sociale et solidaire qui renouent avec la croissance, se renforcent et développent l'emploi. En pleine crise, Usis s'est portée au secours d'une autre Scop, AFP (Aciéries et Fonderies de Provence) située à Argentière-la- Bessée, sauvant 44 emplois sur 59. C'est aussi cela l'esprit Scop ! AFP et Usis forment à présent Usis Groupe. En vue : le rachat d'un bureau d'études et de nouvelles créations d'emplois... L'aventure humaine continue ! Philippe LEGER
Un lien plutôt utile pour approfondir la problématique de l'économie sociale et solidaire :
http://blogs.mediapart.fr/blog/vincent-verschoore/291010/de-l-economie-sociale-et-solidaire