
Cheick Tidiane Seck foulera les planches de l’Alhambra, samedi 9 février, à l’occasion du festival parisien Au fil des voix. Claviériste du mythique Rail Band de Bamako, alter ego de Hank Jones, auteur d’albums jalons, le musicien malien présentera sa nouvelle production : Guerrier.
Alors qu’une crise sans précédent déchire aujourd’hui son pays, Guerrier, le dernier album du malien Cheick Tidiane Seck résonne avec clairvoyance. Une épreuve du destin pour le claviériste qui, à mille lieues des messages belliqueux, prône l’unité africaine. Une démarche fédératrice que ce dernier travaille depuis plus de quatre décennies.Tout d’abord à Bamako où il a longtemps officié au sein du prestigieux Rail Band du buffet la gare. Moins connu aujourd’hui que Salif Keita ou Mory Kanté, les deux chanteurs de la fameuse formation, le personnage n’en reste pas moins fondamental. Son goût pour les musiques afro-américaines, le jazz mais également le blues la soul ou le hip hop, tisse un lien salutaire entre africains et américains. Il est le tampon entre un répertoire africain désormais placé sur la carte internationale et nombre de jazzmen en quête de racines. Il suffit d’observer l’intérêt accordé par des personnalités comme Ornette Coleman, Joe Zawinul ou Dee Dee Bridgewater pour comprendre l’aura qui émane du Black Buddah. Enregistré sous sa férule, Red Earth, l’album de la chanteuse est un retour aux sources particulièrement émouvant.
Pierre d’angle de la discographie de Cheick Tidiane Seck, Sarala anticipe les réunions auxquelles participeront, par la suite, Ry Cooder avec Ali Farka Touré, puis les soneros cubains avec leurs homologues sénégalais lors du projet Afrocubism. Fruit de la rencontre entre le musicien toucouleur et le pianiste jazz Hank Jones, cet album reste un modèle du genre La production est soignée, le jeu de l’interprète se mêle avec fluidité à l’orchestration africaine. Le balafon, la kora les djembés ou le chant du griot Kassemady Diabaté répondent, avec évidence, aux improvisations de Hank Jones. C’est vrai sur Komidiara et le morceau titre. Alors que Hank Miri se construit comme une battle d’excellence entre piano et orgue Hammond. Une fusion subtile, jamais bavarde contrairement à d’autres tentatives. Un travail qui puise sa force dans le talent d’arrangeur de Cheick Tidiane Seck. Un album important, au delà des musiques.
Ses récents disques, MandinGroove et surtout Sabaly, sont le résultat d’une maturation lente mais puissante. Pour cet album, Cheick Tidiane Seck fait fonctionner son carnet d’adresse. La réunion est impressionnante. Du guitariste Djelimady Tounkara à Amadou et Mariam en passant par Oumou Sangaré et Toumani Diabaté, c’est un véritable bottin musical malien qui illustre ce disque. Les différentes sessions opérées avec les jazzmen précités sont soigneusement sublimées à l’image de Oh Lord, morceau gospelisant. Les références aux musiques urbaines sont nombreuses. Des rappeurs côtoient les instruments traditionnels. Les mélodies tissent sur un canevas rythmique envoûtant. Comme pour mieux contrebalancer ce Who’s Who, Cheick Tidiane Seck vient d’enregistrer son dernier album en solo. Les quelques titres écoutés dévoilent un disque au caractère urbain affirmé. C’est le cas de Mali Den (people) et de sa mélodie tournoyante aux faux airs de Stevie Wonder.
Invité de la compilation Mali all stars avec le titre Sibalan Koné, Cheick Tidiane Seck côtoie des interprètes tel Ali Farka Touré, Rokia Traoré mais aussi Damon Albarn ou Bjork. Composé de 28 titres et d’un DVD, ce coffret retrace l’histoire du studio Bogolan à Bamako, un lieu unique et doté de moyens professionnels. Un cadre symbolique, situé à même la terre africaine. Et un indicateur de la richesse culturelle ambiante comme le rappelle Olivier Kaba, patron de Métis Records et co-responsable de l’infrastructure concernée : " Le travail de Cheick Tidiane Seck, et plus généralement des artistes présents sur cette compilation, reflète le Mali, un pays grand comme une fois et demi la France et où vivent des peuples aussi différents que les mandingues, les songhaïs, les griots soninkés et les touaregs. Cette diversité est est un réservoire évident qui explique le boom malien de ces dernières années et la fascination qu’exercent ces musiques auprès du public occidental " .
Soldier Universal Jazz (Sortie le 4 février 2013)
Mali All Stars : Bogolan Music Métis Records / Universal
Vincent Caffiaux