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Billet de blog 17 juillet 2015

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Gisela João, allège le poids de la tradition aux Suds

Rencontre en toute simplicité avec l’icône du fado contemporain. Dans l’antre familière de la médiathèque d’Arles, Gisela João, jeune femme souriante à la tenue colorée, s’avance vers nous. Nous déplaçons les chaises pour nous faire face et je remarque ses chaussures orange flashy ; cette fadiste vit avec son temps et nous surprend par sa modernité. 

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Rencontre en toute simplicité avec l’icône du fado contemporain. Dans l’antre familière de la médiathèque d’Arles, Gisela João, jeune femme souriante à la tenue colorée, s’avance vers nous. Nous déplaçons les chaises pour nous faire face et je remarque ses chaussures orange flashy ; cette fadiste vit avec son temps et nous surprend par sa modernité. 

Illustration 1

Elle semble gracieuse et douce, sa présence est apaisante.

Nous faisons face à l’égérie, l’ambassadrice du fado moderne, une véritable icône dans son pays, héritière d’une tradition presque bicentenaire ; et je suis surpris de réaliser que je suis à mon aise et déjà certain de partager un moment spontané. 

On pourraît croire le fado contraignant ; une musique nostalgique et codifiée, presque folklorique et réduite à l’état de rumeur ou de souvenir. Face à Gisela on réalise que c’est tout l’inverse, on sent chez elle la joie profonde de chanter, de livrer ses émotions au public et son goût du partage. On me dit qu’il faut faire l’entretien en anglais mais lorsque je me présente elle me coupe avec une fraîcheur désarmante: "En français s’il vous plaît, je veux m’exercer, j’ai besoin de pratiquer la langue".

Gisela, nous sommes très heureux de vous accueillir à Arles…

G.J. : Je suis arrivée hier, j’ai pu voir le théâtre c’est magnifique ; j’en avais les larmes aux yeux cette ville est d’une beauté rare. 

Est-il difficile pour vous d’être tout à la fois l’ambassadrice et l’icône du fado contemporain?

G.J. : Je vais être très honnête avec vous, j’adore chanter, et ce qui m’importe ce n’est pas de faire une performance, ce n’est pas d’avoir de l’argent ou du succès même si je sais apprécier. Ce qui m’est précieux c’est d’être juste, d’associer chaque mot que je chante à la véritable émotion qui s’y rattache. Ma plus belle récompense est de constater que cette énergie se transmet et circule, de recevoir ce retour dans les yeux des gens. J’attache une grande importance à l’échange avec le public qui est incroyable ! Je m’en occupe aussi souvent que possible personnellement. Il arrive que certains fans me demandent même conseil pour leur vie ou témoignent de ce que la musique reflète sur leur propre parcours. 

Le fado est une musique intense , est-il parfois lourd pour vous de rester concentrée sur cette tension, n’avez vous pas parfois envie d’exploser ? 

 G.J. : Mais j’explose tout le temps ! Je ne fais que cela ! Je suis obligée de me mettre dans un certain état, de faire appel à mes souvenirs et à mon vécu. Je ne travaille pas ma posture ou mes expressions scéniques. Je me souviens d’une fois où un spectateur est venu me féliciter tout en me disant de faire attention car mon visage grimaçait. Je m’y refuse car cela est accessoire et pour moi ce serait prendre le risque d’oublier l’essentiel. Chanter c’est très intense: parfois après un concert, je veux rester seule car j’ai besoin de relâcher cette tension. Je suis véritablement touchée par ce que je chante et j’en vit le reflux. Je me retrouve un peu submergée... 

Votre carrière à connu un succès plutôt fulgurant, en quoi cela a-t-il changé votre vie ?

G.J. : Le plus important c’est de rester la personne que je suis ; de conserver l’authenticité. Je suis la même avec mes amis pourtant je constate que ma trajectoire les intimide. Mais ils se rendent bien compte que je reste fidèle à ce que je suis. Tellement de choses nous écartent de ce qui est important, des vrais valeurs. Il faut savoir les préserver. 

Quand j’étais petite à Barcelos je rêvais d’ailleurs, je voulais connaître le monde. J’ai des cousins français qui nous rendaient visite pour les vacances. Ils venaient avec des friandises que nous n’avions pas au Portugal ; il faut comprendre que mon pays est resté longtemps replié sur lui même, que j’habitais en province. Cette ouverture me permettait de m’évader. 

Le paradoxe c’est qu'aujourd’hui, je voyage dans le monde entier et ce qui me manque c’est mes amis, la cuisine de ma grand mère… Je suis très entourée et pourtant je me sens quelquefois bien seule...

Ne trouvez vous pas autour de vous, dans votre équipe cette chaleur et cette proximité pour soulager ce sentiment ? 

G.J : C’est ma deuxième famille ! Mais ce sont tous des hommes, ils sont adorables et ce que je vis à leur côté est merveilleux. Cela dit j’aimerais bien aussi passer du temps avec des copines ; pour partager des trucs de filles… 

Nous prenons congé de Gisela que nous invitons à revenir prendre le temps d’arpenter nos rues; elle semble égale à ce qu’elle montre: chaleureuse et amicale. En nous quittant nous l’entendons converser avec son staff avec un grand sourire et en Français dans le texte: “On fait quoi maintenant ? Que dois je faire ?”. Gisela est ainsi toujours disponible.

Propos recueillis par Jean-François Van Migom pour l'Optimiste

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