«Espèce de Bac plus 5...» Il y a quelques jours, c'est ainsi que j'ai été désigné, moqué, et sans aucun doute provoqué, par un élève dans un couloir...
Le fait que je suis titulaire, notamment, de deux DEA était manifestement inconnu de cet élève. Le fait que l'ensemble de mes collègues le soit aussi, tout autant. Le prof ne peut être qu' un " Bac plus 5"... C'est son identité. Son marqueur social. L'équation est limpide : prof= bac + 5...
Et le résultat est un zéro pointé.
"Bac plus 5" est désormais une insulte. Comme l'enseignant, aujourd'hui, est souvent insulté, l'avanie doit gagner en originalité et en force. Le connard ne suffit plus. La preuve, il est même entré dans le dictionnaire. C'est dire ! Ne voulant pas être dans ces murs rabelaisien, je tairais les autres reçues...
L'essentiel est ailleurs. L'essentiel réside dans le fait que, désormais, être diplômé apparaît comme une tare. Cela souligne amèrement combien la culture universitaire est dépréciée, déconsidérée, tout juste bonne à occuper des esprits incapables d'avoir un "vrai métier". Le plus 5 souligne le temps occupé à ne rien faire de concret et d'utile. Passe ton bac et travaille de suite, telle est l'antienne nouvelle. On paie ainsi la course aux diplômes, censés élargir l'horizon des possibles et qui la restreint. Aujourd'hui le Bac plus 5, s'il n'assure plus la reconnaissance sociale, s'il ne garantit pas l'avenir, semble même les compromettre.
Essayer d'expliquer à cet élève que, d'avoir des enseignants très bien formés, avec une culture générale étendue, et qui ne font pas que regarder des émissions de Prime Time sur de chaînes privées, est une chance, aurait été tentative purement vaine. Il estime valoir moins, désireux d'une éducation au rabais, sans doute plus concrète, plus ancrée dans ce monde globalisé si fascinant, où tout est normé, lisse, et identique.
Qu'il se rassure...
Cette éducation arrive...