Donc, j'écoute la radio.... là, c'est sur RFI, où il y a cette émission "C'est pas du vent", que j'écoute en différé d'ailleurs, sur Internet...
Qui est cette femme dont je veux parler dans notre édition "Vert-Tige" ? je l'avais déjà remarquée dans le film de Coline Serreau " Solutions locales...." je crois, ou le film sur Monsanto....:
Présentation par Lionel Astruc, dans son livre "Vandana Shiva : Victoires d’une Indienne contre le pillage de la biodiversité "
"L’histoire de Vandana Shiva est d’abord celle d’une grosse erreur de parcours suivie d’une rédemption personnelle. Celle d’une spécialiste brillante de la physique nucléaire, qui se retrouve du jour au lendemain face à son destin et décide de changer de vie. A ses débuts, cette marcheuse anonyme qui évoluait seule, de village en village, pour collecter ses tout premiers sachets de graines locales et en assurer la préservation, semblait ridicule. D’autant qu’à la même époque, les semenciers fourbissaient déjà le scénario d’un monopole planétaire. Mais face au raz-de-marée des grands groupes mondiaux inondant les campagnes de produits chimiques et de graines « miraculeuses », le combat de Vandana Shiva s’est lui aussi étendu à tous les continents, déployant ses arguments sur une scène médiatique planétaire. Tissant son histoire dans la trame du mouvement altermondialiste, Vandana Shiva fut à l’origine du tout premier rassemblement antiglobalisation à Bangalore. Ce mouvement se propagea ensuite dans Seattle, Cancún, Gênes, etc. Avec en tête de cortège une femme reconnaissable à l’énorme bindi ornant son front.
Mais ces manifestations spectaculaires et la renommée de Vandana Shiva cachent le véritable coeur de l’action de cette militante : Navdanya. Navdanya c’est une ferme biologique où se tient la première banque de graines créée par Vandana Shiva avec un vaste réseau de distribution gratuite et d’échange de semences. Navdanya c’est le siège d’une ONG ayant pour mission de protéger ce patrimoine, d’essaimer les variétés locales de riz, blé, orge, légumes et autres plantes médicinales. La vie de Vandana Shiva se résume en mille combats. Fidèle à la dualité de cette militante, aussi présente dans la lutte internationale qu’obsédée par son enracinement local, ce livre nous plonge à la fois dans la révolte épique d’un petit village tribal contre l’usine Coca- Cola, qui assèche ses puits, et dans la croisade antiglobalisation qui, de procès en manifestations, mène Vandana Shiva aux quatre coins du monde. À l’échelle locale comme mondiale, les armes de cette épopée non-violente sont la désobéissance civile, la pédagogie par l’exemple, la révolte et l’action en justice."
Cliquer ici pour écouter son interview sur RFI (qui date apparemment de janvier 2012).
...un petit film d'une dizaine de minutes :
"Que faire" ? Réponses de Vandana Shiva un entretien dans lequel elle présente de façon concise ses motivations et ses engagements. Dans le cadre d'une émission d'Arte, dont voici la transcription :
« Aujourd’hui, la démocratie est moribonde. La démocratie est censée être le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. Pourtant, des millions de gens ont beau manifester contre la guerre, tous les gouvernements des pays riches envoient des troupes en Irak et en Afghanistan. À travers le monde, les gens disent : « Empêchez les grandes banques de continuer à voler notre argent », mais les gouvernements se bornent à renflouer les banques, et les gens se retrouvent plus vulnérables encore. Quand des entreprises influencent chaque décision gouvernementale, quand des lobbyistes se substituent au peuple, on obtient un gouvernement des entreprises par les entreprises et pour les entreprises, et le peuple est réduit au rang de quantité négligeable. C’est cette menace qui pèse sur la démocratie. Voilà pourquoi nous devons réinventer la démocratie, et promouvoir ce que j’ai appelé la « démocratie de la Terre ».
La globalisation a changé la donne. L’agriculture s’est retrouvée exposée à l’avidité mondiale, à l’avidité de l’industrie agro alimentaire mondiale. Des multinationales comme Monsanto ont eu toute liberté de vendre des semences OGM brevetées aux agriculteurs indiens, et parallèlement des multinationales comme Cargill ont pu faire du dumping sur le marché indien, et réduire le prix du pétrole, du coton, entre autres.
La main mise de Monsanto sur les semences a de nombreuses conséquences. Les semences, qui étaient autrefois gratuites, ou que les fermiers payaient 5 ou 6 roupies le kilo [env. 0,12 €], leur coûtent maintenant 1 800 roupies les 450 grammes, ce qui revient à environ 3 600 roupies le kilo [env. 58€]. Sur ces 1 800 roupies, Monsanto récupère 1 200 roupies de royalties1. Le coton transgénique, appelé « coton BT », est censé résister aux parasites, mais comme cette technologie est violente et peu fiable, elle perturbe les mécanismes de défense propres à la plante, qui se retrouve menacée par d’autres parasites. Quant au parasite ciblé, le ver de la capsule, il a maintenant développé une résistance. En fait, les attaques parasitaires augmentent. D’après notre étude, on utilise 13 fois plus de pesticides dans les plantations de coton OGM. Le coût élevé des semences et l’emploi accru de pesticides ont provoqué l’endettement des fermiers. Ils ne se sont pas endettés auprès du gouvernement ou des banques, mais auprès des agents des multinationales. Quand ces agents viennent prendre procession de leurs terres, les fermiers boivent du pesticide pour mettre fin à leurs jours, parce que pour eux, la terre est une mère. Aucun fermier ne peut imaginer vivre sans la terre. Le jour où on vient leur confisquer leur terre à cause des dettes qu’ils sont incapables de payer, les fermiers se suppriment. Voilà l’histoire du suicide des fermiers indiens. 200 000 fermiers indiens se sont suicidés. Si l’on établit la carte des États et régions où se produisent les suicides, et la carte des régions où Monsanto vend son coton BT, on obtient la même carte. Même si Monsanto refuse d’admettre ce lien, les faits sont là, sur le terrain.
En 1984, les événements m’ont poussée à m’intéresser à l’agriculture. Dans l’État du Punjab, la Révolution verte était censée avoir été vecteur de prospérité et de paix. C’est sur ces valeurs que Norman Borlaug, son investigateur, avait reçu le prix Nobel de la paix [en 1970]. Au lieu de ça, le Punjab était déchiré par la violence. En 1984, il y a eu 30 000 morts et notre Premier ministre, Indira Gandhi, a été assassinée. Je me suis donc demandé pourquoi ce déchaînement de violence avait remplacé la paix attendue. Cette année-là, au mois de décembre, 3 000 innocents qui dormaient dans les bidonvilles de Bhopal, ont été tué par une fuite de gaz dans une usine de pesticides, propriété de Union Carbide, et maintenant de Dow Chemical. Il y a eu des milliers d’estropiés et des enfants sont nés infirmes. Je me suis alors interrogée sur l’agriculture : pourquoi ressemblait-elle à une guerre ? J’ai écrit mon livre La violence de la Révolution verte après une étude complète sur le sujet, ce qui m’a valu d’être invitée à des conférences bien que n’étant pas agronome.
En 1987, une conférence a réuni les grands noms de l’industrie : BASF, Bayer, Ciba et Sandoz [en 1996, la société Sandoz a fusionné avec Ciba-Geigy pour former Novartis]. Ils ont exposé leurs projets d’avenir : cinq multinationales contrôleraient l’alimentation et la santé, la moindre semence serait brevetée et génétiquement modifiée. Je me suis dit : « Ce contrôle de la vie sur Terre est une dictature. Que puis-je faire ? »
Navdanya est un mouvement que j’ai initié en 1987. Ça veut dire « 9 semences », c’est symbole de diversité, mais ça signifie aussi « le nouveau don ». Les semences sont au cœur même du travail de Navdanya, parce que c’est ce qui manquait aux fermiers. S’ils ont leurs propres semences, les fermiers ne s’endettent pas, parce qu’ils n’ont ni semences, ni pesticides à acheter. Nous avons donc créé des banques de semences, et nous avons aidé les fermiers à renouer avec l’agriculture biologique, et à trouver des débouchés équitables pour leur coton. La combinaison de ces trois éléments : les semences, l’agriculture biologique et le commerce équitable, permettent aux fermiers de gagner dix fois plus que ceux qui cultivent du coton BT. Notre action a porté ses fruits.
Les grandes fermes à soja et à maïs des États-Unis passent pour les formes d’agriculture les plus productives que l’humanité ait jamais inventées. Mais il n’est pas très intelligent d’insuffler dix unités d’énergie dans un système pour produire une seule unité de nourriture, ce n’est pas viable. En revanche, si on mise sur la biodiversité et ses effets induits, on peut produire quatre à dix fois plus que ces exploitations industrielles américaines qui sont exportées à travers le monde comme un modèle d’agriculture de pointe. On ne peut pas raisonner en terme de rendements. Bien sûr la monoculture qui se concentre sur une seule donnée aura une production supérieure, et la biodiversité produira moins de cette denrée donnée. Mais la biodiversité produit plus de nourriture à l’hectare que la monoculture. Nous avons des centaines de données chiffrées qui prouvent que les polycultures biologiques ont une productivité beaucoup plus élevée en terme de production de nourriture par hectare.
La société actuelle a été construite sur l’idée que la nature est morte [sans vie, inerte], d’où cette profonde crise de survie. Mais la nature n’est pas morte, elle est bien vivante dans toute sa diversité. Prenez une poignée de terre : elle contient des millions et des milliards d’organismes qui travaillent à rendre le sol fertile. Un sol vivant, voilà ce qui nous donne de la nourriture, et non pas les toxiques produits par des usines explosives [en France, l’usine chimique de fertilisants AZF a explosé à Toulouse le 21 septembre 2011, tuant 30 personnes] , pas le phosphate dont nos réserves ne sauraient excéder vingt ans, pas les combustibles fossiles déjà utilisés en quantité excessive ! Les turricules [ou excréments] de vers de terre apportent sept fois plus d’azote que les sols classiques, onze fois plus de potassium, cinq fois plus de phosphate. Un ver de terre qui, selon Darwin, est l’espèce la plus miraculeuse dont l’humanité ait jamais dépendu, est plus efficace que toutes les usines d’engrais du monde. Tâchons d’en prendre conscience. C’est formidable. Les pollinisateurs reviennent, les oiseaux aussi. Nous produisons davantage de nourriture sans utiliser de pesticides, et nous utilisons 70% moins d’eau qu’à nos débuts, parce que le sol fertilisé par les vers de terre agit comme un réservoir dans lequel l’eau est retenue.
Les réserves de semences peuvent être réduites à néant en une seule saison. Dans les régions où les fermiers se suicident, il ne reste plus de semence, ni de semence de coton, ni d’aucune culture vivrière, parce que Monsanto a lancé un programme de remplacement : on encourage les fermiers à livrer leurs stocks, Monsanto leur distribue même de l’argent contre leurs semences. Alors, les fermiers se disent : « Je leur vends les miennes, et je récupère les leurs. » Tous les fermiers, les uns après les autres, et au bout du compte, plus personne n’en a. En une saison, il y a pénurie de semences. En vingt ans, les réserves mondiales seront réduites à néant. Chacun aura beau être libre de faire ce qu’il veut, il n’y aura plus de semences. C’est pour ça qu’il faut interdire le brevetage des semences. L’humanité, dans sa grande majorité, n’a aucune envie de poursuivre sur cette voie de destruction de notre avenir. On force les gens à s’engager dans ce projet d’anéantissement pour servir la cupidité à court terme d’une toute petite minorité.
En premier lieu, l’humanité doit reconquérir sa capacité à concevoir la liberté, sa capacité à exercer une démocratie véritable et profonde. Ensuite, l’humanité doit aussi prendre conscience que l’être humain ne peut sûrement pas être sur Terre pour s’enrichir et faire des profits. Préserver la vie, la vie de notre espèce, la vie de la planète, l’écosystème qui permet toute vie sur Terre, voilà l’objectif suprême qui doit guider notre action. »
1 Le salaire minimum indien est de 2€/jour, mais les agriculteurs gagnent moins.
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Au moment où les instances règlementaires de la Communauté européenne viennent de battre en brêche la liberté de produire à partir de semences non soumises aux règles des "marchés", inspirons-nous de ces actions et défendons à notre tour la liberté d'une l'agriculture sans OGM ni produits chimiques.
