Le ministre en charge de l'immigration n'a pas de chance avec ses invitations. Plusieurs mouvements de soutien aux étrangers en quête de titre de séjour refusent de franchir son seuil. Ils s'en expliquent.
Déjà, le 3 septembre 2010, les associations présentes dans les centres de rétention administrative, ASSFAM, La Cimade, Forum Réfugiés, France Terre d’Asile et l’Ordre de Malte, qui avaient été reçues à la demande du ministre de l'immigration afin d’échanger sur le projet de loi relatif à l’immigration, avaient déclaré ensemble tout le mal qu'elles pensent de l'aggravation de la répression des migrants prévue par le projet de loi sur l'immigration.
Le 6 janvier 2011, le GISTI, Groupe d'information et de soutien des immigrés, dont le second ministre de l'immigration estimait la crédibilité quasiment nulle, était tout de même invité à rencontrer le ministre de l'intérieur.
L'invitation a été déclinée, en termes précis.
"Monsieur le Ministre,
Vous avez proposé de rencontrer le Gisti le 6 janvier prochain. Nous préférons décliner cette invitation, pour plusieurs raisons. Lors de notre précédente entrevue, le 11 juin 2007, nous avions souhaité, documentation à l’appui, faire part au nouveau ministre de l’Immigration que vous étiez alors des principes qui, selon notre association, devraient fonder toute politique migratoire. Parmi ceux-ci, l’abolition de toutes les mesures faisant obstacle aux possibilités de regroupement familial, la régularisation des migrants sans papiers et, au plan international, le renoncement à la politique sécuritaire et répressive, ce qui implique notamment l’abandon de l’« externalisation » des contrôles aux frontières. Sans prêter la moindre attention à nos préoccupations, vous nous aviez parlé de votre projet de restreindre l’accès des étrangers au regroupement familial – ce qui a été réalisé avec la loi du 20 novembre 2007. Vous nous aviez également assuré, lors de cette rencontre, qu’aucune réforme de grande ampleur du Ceseda n’était en vue. Le soir même, nous apprenions que le Conseil d’État était saisi pour avis du projet que vous avez présenté quelques jours plus tard au Conseil des ministres."
Le 13 janvier, c'était au tour du Réseau Education Sans Frontières (RESF) d'être invité à rencontrer le ministre. Le RESF a, lui, aussi, décliné l'invitation:
"Monsieur le Ministre, vous avez souhaité rencontrer le Réseau Education Sans Frontières, RESF.
Le Réseau dans sa diversité aussi bien géographique que philosophique, politique, spirituelle, refuse de désigner en son sein quelque représentant que ce soit pour venir au ministère. Le gouvernement que vous servez et vous-même avez pris le parti d’une politique du rejet de l’étranger, non pas celle d’un accueil des familles et des jeunes présents en France par la délivrance d’un titre de séjour pérenne, mais celle de l’expulsion à tout prix avec des objectifs précis fixés préfecture par préfecture, prime de résultat à l’appui. Le nombre d’expulsions a été de plus en plus important d’une année sur l’autre. Vous avez choisi de devenir ce que nous appellerons « ministre de la Rafle et du Drapeau », vous l’avez fait, avez-vous dit, « sans état d’âme ». Vous avez rempli vos objectifs. "
Rappel: le projet de loi sur l'immigration a été adopté par l'Assemblée Nationale le 12 octobre 2010 par 294 voix contre 239 (avec impossibilité pour l’opposition d’intervenir à partir de l’article 44, du fait d'un règlement découlant de la réforme constitutionnelle de 2008, celle qui "renforce les pouvoirs du parlement", nous répète-t-on). Il doit être examiné par le Sénat début février. Toutes ces associations, et bien d'autres, s'y préparent.
Martine et Jean-Claude Vernier
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