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Billet de blog 16 août 2009

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La loi sur le séjour des étrangers est totalement périmée

Le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et Demandeurs d’Asile (CESEDA) est la loi qui est supposée encadrer la vie des étrangers en France. Après avoir subi d’innombrables retouches, surtout depuis 2002, il se réduit à un outil de refus de séjour aux mains d’autorités encouragées à être imaginatives pour atteindre les objectifs qui leur sont fixés. La vérité est qu’il est totalement inadapté aux conditions actuelles de la mobilité internationale et aux réalités du travail.

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Le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et Demandeurs d’Asile (CESEDA) est la loi qui est supposée encadrer la vie des étrangers en France. Après avoir subi d’innombrables retouches, surtout depuis 2002, il se réduit à un outil de refus de séjour aux mains d’autorités encouragées à être imaginatives pour atteindre les objectifs qui leur sont fixés. La vérité est qu’il est totalement inadapté aux conditions actuelles de la mobilité internationale et aux réalités du travail.

L’appareil législatif et réglementaire qui régit actuellement l’entrée et le séjour des étrangers est le n-ième avatar d’un édifice fondé en 1945 mais dont les fondations remontent aux années 1930. Il a évolué par à-coups selon les perceptions des gouvernements qui se sont succédé depuis. La période récente a été particulièrement productive. Le GISTI (Groupe d’Information et de Soutien des Immigrés) recense sur son site Internet les lois, décrets, arrêtés et circulaires réglementant la vie des étrangers en France. Concernant le droit au séjour, entre 1994 et 2002, on compte une seule loi, mais depuis 2003, on trouve quatre lois et plus de vingt décrets, arrêtés et circulaires. Pour la réglementation du travail, cinq décrets, arrêtés ou circulaires de 1994 à 2002, mais plus de vingt décrets, arrêtés, ou circulaires depuis 2003.

Malgré ces "améliorations", on rencontre toutes sortes de situations de vie auxquelles la loi n’offre aucune issue.

  • La procédure de regroupement familial avait été introduite pour permettre aux travailleurs immigrés qui avaient réussi à s’établir, de faire venir femme et enfants restés jusque là au pays. Ce schéma de migration ne correspond plus à la réalité d’aujourd’hui, et la loi n’a rien de raisonnable à proposer aux couples étrangers qui se sont formés à la suite d’une rencontre en France. Sans parler de la vieille mère, veuve (parfois d'un ancien ouvrier immigré) qui veut finir ses jours auprès de sa fille, résidente de longue durée ou même devenue française.
  • Les mariages franco-étrangers impliquant un ressortissant hors Union Européenne sont l’objet d’une suspicion systématique de la part des autorités. Au-delà du soupçon de mariage blanc, les conditions de régularisation peuvent aller jusqu’à exiger la séparation temporaire du couple, en envoyant le partenaire étranger chercher un visa au pays, ce qui peut prendre des mois de démarches et d’attente. Les PACS ne sont pas mieux tolérés (voir un précédent billet).
  • Les jeunes lycéens et étudiants étrangers ont souvent été envoyés en France pour poursuivre des études inexistantes dans leur pays d’origine. Ils arrivent ici à la fin d’un cycle scolaire, entre 13 et 17 ans. A leur majorité, ils se trouvent engagés dans la vie sociale normale de leur classe d’âge. Au moment où ils vont pouvoir apporter leurs compétences et leur désir de réussite au pays d’accueil, la loi actuelle ne leur permet pas de rester en France après 18 ans.
  • Les migrants sont venus avec l’intention de vivre normalement et de travailler. Alors que ces hommes et ces femmes, célibataires ou vivant en famille, sont sur les chantiers, dans les cuisines, auprès des petits enfants et des vieux, l’administration ne leur permet pas de travailler légalement. En invoquant la peur d’un prétendu "appel d’air" dont la vraisemblance reste à prouver, on rend de plus en plus difficile l’entrée et le séjour légaux. Résultat : plus de circulation entre pays d’origine et pays de migration. Comme on sait qu’on ne pourra sans doute pas revenir, on reste, en acceptant des conditions de vie et de travail souvent désastreuses.
  • Le 13 juillet 2009, le Réseau Education Sans Frontières (RESF) soulevait publiquement la question des familles démembrées (un parent expulsé, le reste de la famille restant en France) : "ces expulsions génèrent des situations dramatiques : séparation, parfois définitive, des couples et des familles, traumatismes des parents et des enfants, souvent perte totale des ressources, prise de risques du parent expulsé pour revenir à tout prix. L'expulsion d'un parent semble conçue par l'administration comme le moyen d'acculer le reste de la famille au départ "volontaire" en la réduisant à la misère".
  • Malgré les assurances officielles d’humanité du traitement des enfants pris dans les filets des préfectures, les situations regrettables se répètent inévitablement (voir un précédent billet, et cela commence à en choquer certains, tel Michel Tubiana , président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme.

Le rôle de la loi est d’organiser la vie collective. Le CESEDA, vieux vêtement maintes fois rapetassé, ne joue plus ce rôle. Bien au contraire, il sert à empêcher la vie. Il est donc urgent de l’abroger, tout simplement.

Martine et Jean-Claude Vernier

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