Depuis plus de 30 ans, le législateur restreint l'horizon des étrangers vivant en France. L'administration peut se montrer très imaginative pour leur opposer des obstacles qui fragilisent sans cesse la vie et les projets des familles, des mineurs isolés, des jeunes majeurs. Et pourtant, ils sont là, ils vivent parmi nous, comme nous. Trop, c'est trop. Collectifs et associations tentent de faire comprendre aux candidats aux élections qui viennent qu'il n'est pas question de continuer à entretenir cette précarisation ciblée.
L'histoire a déjà circulé: à la fin du dispositif d'hébergement d'urgence hivernal, une famille de Lyon avait obtenu du tribunal administratif l'obligation faite au préfet de lui fournir un hébergement. Le 10 avril 2012 ils sont donc dirigés vers un hôtel. Ils ne sont plus à la rue. Ce sont des kurdes d'Azerbaïdjan qui avaient déjà fui la guerre avec l'Arménie en 1992. Leurs deux enfants sont nés en Ukraine. Ils sont venus demander asile en France. La protection leur ayant été refusée, ils avaient "vocation" à retourner... en Azerbaïdjan, qui n'a que faire de Kurdes. D'où leur "hébergement", dès le 12 avril, dans un Centre de Rétention Administrative, où l'on enferme les étrangers en voie d'expulsion. C'est plus pratique.
En région parisienne, des adolescents étrangers sans famille errent, privés de protection. "Depuis quelques mois, la situation des mineurs isolés étrangers a connu une nouvelle dégradation. Jamais autant de ces enfants n’ont été laissés en errance, à la rue jour et nuit, y compris au plus fort de l’hiver. Pour ces jeunes, l’accès à une protection relève du parcours du combattant. Soupçonnés en permanence de mentir sur leur âge ou sur leur situation, ils font face à la défiance et au rejet des institutions en responsabilité de les accueillir, à commencer par les conseils généraux." Le 16 avril 2012, quinze organisations interpellent le Défenseur des Droits. Elles "lui demandent d’agir le plus vite et le plus fortement possible pour exiger des pouvoirs publics la protection effective de ces mineurs dans le respect de leurs obligations légales comme des plus élémentaires principes d’humanité. Il y a urgence."
En janvier 2012, le Réseau Education Sans Frontières (RESF) s'est adressé aux citoyens, aux candidats à la présidentielle et aux législatives, demandant que soient prises des dispositions précises dans une révision complète du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et l'abandon des multiples circulaires qui viennent encore rétrécir le dispositif légal: "Il ne doit plus y avoir en France de citoyens, français ou étrangers, sans accès aux droits!" Quatre des candidats à l'élection présidentielle leur ont répondu. Classés à gauche, ils reconnaissent l'apport du RESF, "essentiel à la construction d'une France fidèle à ses valeurs, ouverte, tolérante et solidaire" (Eva Joly), saluent des actions qui ont "permis de modifier profondément dans l'opinion le regard porté sur les personnes en situation administrative irrégulière" (Jean-Luc Mélenchon), insistent sur leur soutien à son action et leur accord avec ses revendications (Philippe Poutou), saluent "votre mobilisation, qui touche aux droits des enfants et des familles, quelle que soit leur nationalité, sur notre sol " et annoncent "une autre politique migratoire, une politique responsable, fondée sur des règles transparentes, stables et justes" (François Hollande). Chacun, dans sa tonalité, proclame une proximité avec les vues du RESF.
Toujours en janvier 2012, La Cimade a demandé aux candidat-e-s à l'élection présidentielle de se positionner sur ses 40 propositions pour une politique d'hospitalité. et d'indiquer les premières mesures qu'il ou elle souhaiterait mettre en oeuvre en matière d'immigration. Six candidat-e-s ont souhaité répondre à cette demande. Leurs réponses peuvent être consultées ci-après: Nathalie Arthaud, François Bayrou, Nicolas Dupont-Aignan, François Hollande, Eva Joly, Jean-Luc Mélenchon, Philippe Poutou.
Martine et Jean-Claude Vernier
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