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Billet de blog 16 septembre 2012

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Le Stalag européen 2.0

C’était la survie ou la mort !

Jean Mézières

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Autrefois, le camp des nations prisonnières était une prison de luxe ; certes sous domination américaine mais un stalag européen où toute la Terre voulait vivre, faute de mieux. L'autodiscipline était faite par les anciens vaincus de 39-45. Sans être trop regardant sur la provenance des richesses chez  – ceux qui ne sont pas rentrés dans l’Histoire (N. Sarkozy) - , nous avions une Europe qui unifiait, qui avait des projets en commun comme par exemple la CECA.


Bref ! Le bonheur égoïste dans la plus belle des prisons ! Une prison où il n’était plus nécessaire de se salir les mains ; les réserves à sauvages étaient faites pour cela. Une prison où l'on pouvait voyager à grande vitesse à Mach 2.0 en Concorde. Une prison où on pouvait faire du travail intellectuel 2.0, de la finance 2.0, des jeux de guerres économiques 2.0, de l'horreur humanitaire 2.0, du Sim-Planète 2.0, du hyper-trading 2.0, du web 2.0. Du « deux point zéro » partout !  Le pied !

Certes il avait déjà les fortes têtes; les parrains qui faisaient régner la discipline dans les baraquements. On les appelait les parrain-fondateurs.


Devant le fayot allemand conservateur, le ridicule français prétentieux et le clown grotesque italien, personne ne bronchait. Les petits prisonniers ramassaient les miettes, les grosses miettes. Ce n’était pas si mal. Voulant rivaliser avec son voisin islandais - le mec qui promettait la lune et le paradis pour petits porteurs avec les « subprimes »  -, Il y avait même le petit irlandais qui se croyait futé en faisant de l’œil aux investisseurs hors taxes derrière les grilles du stalag. Sous peine d'exclusion du jeu, corrupteurs odieux, escrocs avides de prêts, évadés fiscaux paradisiaques, les parrains allemands et français faisaient chanter les plus faibles. Ainsi, le peureux grec redevable, avait l'obligation de collectionner des matériels militaires, des sous-marins, flambant-neufs. Ce n'était plus un arsenal mais la caverne d'Ali Baba aux 27 voleurs puissance mille (^1000).


Dans cette ambiance à la Mad-Max où il vaut mieux se taire, la vie dans le camp étaient réglée ainsi: certains faisaient les prostituées gavées de produits inutiles, d'autres les proxénètes débordant de suffisances. certains faisaient les fournisseurs, d'autres les clients. On ne plaisantait pas avec les parrains constamment la main sur la matraque !  L'univers carcéral était bien loin de la véritable démocratie. Seule la coquille parlementaire persistait pour donner l'illusion aux vieux.


Puis vint un drôle de prisonnier à la city-bourse bien remplie. On l’appelait « l’anglais le lèche-cul ». Ce véritable mouchard, toujours bien avec les matons, a toujours été douteux. On se posait des questions sur sa venue. Une taupe dans le camp ?


Soudainement  un jour, une rupture dans l’alimentation, dans ce fameux train de vie, arriva. Le Monopoly avait trop duré. Hélas, on a la fâcheuse tendance à l'oublier - l'hypocrisie ultime - : le capitalisme possède dans ses gènes le "RESET" obligatoire faisant des tueries planétaires (style "5ème Elément"; tout détruire pour tout reconstruire). Pour se disculper, d'aucuns essayeront sans conviction, de mettre la responsabilité sur des fous de passage, sur des peuples stupides. Alors l’administration du Stalag  eu l’idée de faire crédit aux prisonniers. Le crédit c’est la vie, c’est le monde qui bouge.


Bref ! « Il faudrait être con pour ne pas s’endetter puisqu’on gagne plus sans rien faire».


Alors, en avant la musique ! Tourner manège et la planche à billet ! L'argent-dette coulait à flot continu. On emprunte à 3 - voire 0 - et on fait crédit à 6% - voir 12 -. Génial ! Le jackpot !  En plus de l’apport extérieur de riches spéculateurs, c’était si facile de créer du faux-argent que, comme au Monopoly, les prisonniers, oubliant leur condition, se faisaient du crédit entre eux.  Les chiffres devenaient exponentiels mais tous continuèrent à jouer sans sourciller. La règle était « on s’en fout, c’est le jeu, la vie est belle ».


Seulement la cavalerie, le MONOPOLY infini, la gabegie de matières premières avaient une fin.  C’était trop beau. Un battement d’aile de papillon fit chavirer cette super-escroquerie à la " Madof ". Un couple de maton divorça et ne put vendre leur maison. Toutes la chaîne et les prêteurs des prêteurs étaient ruinés. Les subprimes étaient nés. Enfin, on se réveilla. le shoot orgasmique consumériste pris fin.


"Je veux mon argent"; les plus forts en premier - les escrocs évadées fiscaux paradisiaques - ainsi que l’administration du camp, demandèrent leur compte avant d’aller se coucher.


Ainsi commença le pugilat.  Sous peine de mourir de faim, les prisonniers du Stalag étaient sommés de tout vendre et se retrouvèrent à poil sur la paille dans leur baraquement. Passer d'une vie insouciante et à presque rien, fit un choc, une panique monumentale qui ébranla les bonnes âmes et réveilla les plus bas instincts de survie. Les vieux assassinant leurs enfants et les générations suivantes ! Du jamais vu !


C’était la survie ou la mort !


Malheureusement, les chiffres étaient encore trop astronomiques. L’administration nomma le fayot responsable, le prisonnier germanique,  pour mettre de l’ordre dans la boutique.  Hors de question de laisser s’échapper quelques sous du faux-vrai-argent ! Il y a des comptes à rendre et ce ne sont pas des prisonniers qui font la loi dans le stalag. Voulant redonner confiance, les 1000 milliards d'Euros, prêté à 1%, remis en jeu n'y suffirent pas. La méfiance, le doute étaient là, pour toujours.


Le traité MERKOZY - (TSCG & MES sans véritable croissance SVP) -  fut imposé par le leader sous peine de mettre le feu au stalag. Le premier qui bouge, la troïka lui tombe dessus avec le supplice de l’étranglement à petit feu. Une mort atroce !


Nous avions tout pour nous émanciper, pour nous libérer, pour réussir une référence harmonieuse sur la planète - charte sociale, etc... Malheureusement, depuis ce temps, les prisonniers n’ont plus que leurs yeux pour pleurer.  Avec cette nouvelle dictature eurocratique semant la zizanie, leur pseudo-liberté, leur monde joyeux se sont transformés en enfer éternel. Certains se bouffent entre eux, d’autres se laissent mourir; un vrai carnage dans une Europe qui n’a jamais été réellement libre et responsable, dans une Histoire qui redevient folle.


Comme prévu, même au bout du bout, les prisonniers refusèrent de se libérer de leurs chaînes, ils refusèrent la grande mutinerie salutaire "On en joue plus à ce jeu là, on devient sérieux, on réfléchit". Au bout de tous les systèmes, hélas, on refuse de changer maintenant.


Pauvre condition humaine ! A la fin, on dira encore que les peuples étaient des idiots ! 

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