
Les différents jurys se sont réunis les 4 et 5 septembre 2008 à Perpignan pour décerner les trois Visa d’Or des catégories news, magazine et presse quotidienne . Le plus prisé est le Visa d’Or News qui a été décerné pour la seconde fois à Philip Blenkinsop de l’agence Noor. Il avait déjà été honoré en 2005. Le Visa d’Or Magazine a été attribué àBrent Stirton de Getty images, et c’est le « Dallas Morning News » avec la photographe Mona Reeder qui a remporté le Visa d’Or de la Presse quotidienne. Mais au delà de ces récompenses quelque peu convenues, la vraie surprise est venue du Bangladesh !
Incontestablement c’est le très jeune Abdul Munem Wasif, 25 ans, qui à l’applaudimètre a recueilli le plus de succès et, même les « youh youh » d’un club de ferventes jeunes femmes séduites, comme tous, par le sourire, la bonne humeur de cet espoir du photojournalisme diffusé depuis avril dernier par l’agence Vu.

Remise du prix de la Ville de Perpignan à Munem Wasif par Jean-François Leroy
Décerné pour la troisième année consécutive par des directeurs photos de magazines internationaux, le prix du jeune reporter de la Ville de Perpignan est attribué au meilleur travail publié ou non, produit en 2007/2008. Le prix est doté de 8000 Euros par la Ville de Perpignan qui marque ainsi un véritable engagement dont il faut la féliciter.

Abdul Munem Wasif est originaire de Comilla une ville du Bangladesh à une centaine de kilomètres de la capitale Dhaka. Il est né en 1983 et a, selon ses dires au magazine Photo, fait des études peu brillantes. Il s’inscrit dans une école de photographie locale et une exposition itinérante du World Press Photo va bouleverser sa vie. Comme professeur de photographie il a alors un homme « des années soixante, fan de Bob Dylan » qui va changer son regard sur le monde et l’ouvrir à une nouvelle vie.
Il part pour la capitale du Bangladesh, suit les cours et est diplomé de l’école de photo Pathshala, travaille pour un quotidien en langue anglaise le Daily Star où il se retrouve à faire des photographies qui ne le passionnent pas. Il rejoint pendant deux ans, une agence de photo Drik News où il commence alors des travaux plus personnels notamment sur les Rohingyas, une minorité birmane chassée de son pays, sur « Tainted Tea », la propriété en 2005. En 2007, il réalise « Un conte de paradis perdu : les réfugiés climatiques » un grand travail sur les conséquences pour son pays, submergé par la misère et l’eau, du réchauffement de la planète.
Un regard d’humain derrière le capteur numérique

Il travaille aussi sur « Les ouvriers des manufactures de jute » dont il dit : « La manufacture de jute Adamjee se dressant sur plusieurs étages est fermée depuis 2003, suivant les ordonnances de la World Bank et d’autres donneurs. Après tout, c’est facile de fermer des manufactures et usines dans l’intérêt de l’efficacité et la productivité si chacun ignore le bilan humain..»
En 2007, Wasif est distingué dans le Roads Photography Program de la National Geographic Society pour son travail sur le vieux Dhaka. Son travail a été exposé tout autour du monde notamment au festival d’Angkor au Cambodge, la biennale internationale de photographie du monde islamique en Iran, FotoFreo, festival australien à Perth, au Musée métropolitain de photographie de Tokyo ou encore à la galerie Getty en Angleterre. Il a été également sélectionné parmi les trente photographes émergents dans le magazine américain Photo District News.

En 2007, il suit la Master class Joop Swart dans le cadre du World Press Photo dont le thème est le “fragile”. Son travail est alors remarqué par plusieurs picture-editors des magazines comme Le Monde 2, Asian Geographic, Issue magazineet, d’entretiens avec les rédacteurs en chef en conversations avec d’autres photographes, il se présente au début de l’année 2008 à l’agence Vu, fondée par Christian Caujolle, avec laquelle il signe en avril dernier.
Cette année, il a travaillé « Le Vieux Dhakan Puran Dhaka qui était un sujet plutôt invraisemblable. Du fait de son existence tout autour de moi. Je vis là. C’est comme essayer de voir l’inédit dans le quotidien. Le Vieux Dhaka m’avait fait apprécier la nourriture graisseuse bien cuisinée, l’argot le plus sordide, et c’est là où j’ai redécouvert l’impulsion propre aux petites villes de s’accrocher à des choses plutôt que de laisser aller ».
Laisser aller, ce n’est pas son style.
Le Prix de la Ville de Perpignan vient consolider une bourse italienne de la Fabrica qui va lui permettre de continuer son travail sur les conséquences du réchauffement de la planète, et suivre l’actualité des pays environnants, le Cachemire, l’Inde en espérant que les magazines vont suivre son ambition.
Son travail est encore exposé jusqu’au 14 septembre au Couvent Sainte-Claire à Perpignan. Il faut le voir et pour ceux qui ne peuvent se déplacer suivre les liens de ce billet. Dès la vue des premiers tirages, je suis tombé amoureux de son regard numérique en noir et blanc. Il y a une vraie sensibilité, une vraie proximité avec les photographiés, et pour tout dire un vrai talent qui espérons le, sera protégé par sa forte personnalité.
Il fut la vedette de ce Visa pour l’image qui fêta toute la semaine dernière ses vingt ans dans une chaleur étouffante pour finir en « eau de boudin » par l’annulation de la dernière projection – si attendue - du samedi soir et par la traditionnelle fête qui permet à tous de « se lâcher ». Dimanche matin au petit déjeuner, des reporters de Paris-Match commentaient laconiquement « Cette année, pas de viandes saoules, juste de la viande mouillée ». Après le choc des photos de maux, retour au poid des mots !

Munem Wasif et Christian Povéda de l'agence VU'
Reportage à Perpignan de Geneviève Delalot/Photos.Neteyes.frtParis, le 12 sep 2008
Visa pour l’image : une histoire de bêtes !
Paris, le18 sep 2008
20 ans de photojournalisme: Horst FaasRemerciements :
- A l'agence Vu qui nous a aimablement communquer les photographies de Munem Wasif pour ce blog. Vous pouvez voir cinq reportages de Munem Wasif sur le site de VU.
- A l'équipe de Visa pour l'image