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Billet de blog 1 février 2015

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DSK confirme la justesse des exigences de Jean-Marie Delarue à augmenter les moyens de CNCIS plutôt que le nombre de lignes

20 Minutes explique qu'une journaliste de Canal + a recueilli le témoignage annonyme d'un policier reconnaissant que DSK a fait l'objet d'une écoute adminsitrative illégale pendant des mois.

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20 Minutes explique qu'une journaliste de Canal + a recueilli le témoignage annonyme d'un policier reconnaissant que DSK a fait l'objet d'une écoute adminsitrative illégale pendant des mois.

L'avocat du commissaire divisionnaire de police, un des 13 prévenus aux côtés de Dominique Strauss-Kahn dans le procès de l'affaire de proxénétisme dite du Carlton, a annoncé samedi avoir déposé une requête en nullité devant le tribunal de Lille au motif d'une enquête "officieuse" présumée. Reste à en apporter la preuve. Ce qui n'est pas prêt d'arriver en l'absence d'enquête.

Il y a juste un problème juridique que ne peut pas ignorer l'avocat du commissaire divisionnaire de police, qui tente de tirer profit de la révélation, très opportune, d'un autre policier, anonyme.

Les écoutes administratives sont inconnues du juge d'instruction et il n'en a été ni l'instigateur ni le destinataire. Ces écoutes étrangères à l'instruction ne la remette donc pas en cause.

En revanche, ces écoutes illégales, si le policier anonymisé les confirmait par procès-verbal, pourraient donner lieu à l'ouverture d'une autre procédure pour en rechercher tant le commanditaire que ceux qui se sont compromis à les réaliser, en toute illégalité.

La révélation de Canal + confirme le doute sérieux existant à propos du contrôle des écoutes administratives.

Cette affaire confirme donc aussi la justesse des réserves émises par Monsieur Delarue à augmenter le nombre des écoutes comme le demande la police.

Mathilde Mathieu et Louise Fessard ont proposé une enquête détaillée sur ces écoutes administratives " Antiterrorisme et « grandes oreilles » : le contrôle des écoutes est un casse-tête ".

Des cadres du renseignement, après leur fiasco sanglant des assassinats à Paris, avaient accusé, pour se défausser, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) chargée d'autoriser les écoutes de les avoir "bridés", et même empêché d'écouter les frères Kouachi (alors qu'ils n'ont même pas été capables de savoir qu'ils s'étaient procurés des armes de guerre).

Ces mêmes fins limiers du contre espionnage et de l'antiterrorisme disent aussi qu'ils n'ont pas assez des 2190 lignes d'écoutes administratives.

La révélation de Canal + montre à l'évidence qu'ils en ont déjà de trop et qu'ils ne savent pas à quoi s'occuper utilement ; puisqu'ils ont pris le temps d'écouter et de suivre pendant des mois les batifolages d'une personnalité, qui n'avait rien d'un terroriste.

C'est à regretter que les frères Kouachi ou Coulibaly n'aient pas été présidents du FMI ou adeptes du dieu Priape. Les Français sont prévenus. Ils sont surveillés comme le lait sur le feu dans leur vie privée, ce qui forcément détourne la police et ses moyens de ses missions, de telle manière qu'il faut, in fine, compter sur la bonne volonté du GIGN ou du Raid pour récupérer les conséquences de l'ineptie d'une DGSI occupée à connaître les préférences sexuelles d'un ancien ministre ou espionner les journalistes.

Il serait étonnant que la justice accepte la demande de l'avocat du commissaire divisionnaire, parce qu'elle est étrangère à la procédure, à moins que le président du tribunal ne s'en saisisse et demande un supplément d'information sur ces faits en considération de leur gravité. La Constitution fait du magistrat judiciaire le gardien des libertés et l'article 111-5 du code pénal lui permet d'interpréter la légalité des actes administratifs, sauf que là, il lui faudra d'abord aller le chercher et le trouver.

Si l'avocat, sur les seuls dires de Canal +, est pris au sérieux par la justice, démonstration sera donc faite et acquise que les écoutes administratives servent à espionner la vie privée des personnes et à accumuler des informations sur leurs préférences sexuelles, et que tout l'argumentaire contre la CNCIS et l'absence de moyens est donc mensongère.

L'image de marque de la police ne va pas en ressortir grandie ni l'argumentation du premier ministre sur son impossibilité à garantir qu'il n'y ait pas d'échec.

Si la justice admet que la police a suffisamment de moyens pour espionner les batifolages de DSK, la police est donc fautive dans la perte du suivi des frères Kouachi.

En effet, il est difficile de soutenir pour un gouvernement, passé ou actuel, que DSK entre dans le cadre de la prévention du terrorisme et il est très étonnant qu'une autorisation ait pu être donnée pour des badinages, alors que les moyens sont prétendument limités.

Il y a comme une incohérence mais ce n'est pas la première fois que la police prend le politique pour un imbécile. Il a du mal à s'en offusquer.

Les révélations de Canal + imposent d'entendre le premier ministre de l'époque et l'actuel pour savoir comment une telle autorisation a pu être donnée.

L'article 20 minutes rappelle les cinq cas dans lesquelles les écoutes administratives sont autorisées :

  • sécurité nationale,
  • prévention du terrorisme,
  • prévention de criminalité et délinquance organisée,
  • sauvegarde d'éléments essentiels du potentiel scientifique et économique,
  • prévention de la reconstitution ou du maintien des groupes de combat et milices privées dissous.

A moins d'une déclaration spontanée de DSK venant le contredire, il est possible de penser que le président du FMI n'entrait pas dans un de ces motifs.  A moins qu'il existe des motifs cachés.

Il faut relire, sans rire, la fable du policier qui se confie à Mathilde Mathieu et à Louise Fessard affirmant que " certaines requêtes prennent beaucoup de temps à remonter jusqu'à la CNCIS comme en témoigne une source proche des services. « Il faut compter en moyenne une quinzaine de jours entre la demande d'un agent et l'accord final, mais c'est aussi parce qu'il y a des filtres hiérarchiques en interne (au sein même des services – ndlr). La hiérarchie sait bien sur quoi la demande risque d’être retoquée par la CNCIS, sur les formulations, les motivations à apporter au regard de la loi, donc elle pré-filtre. » Les services s'en plaignent-ils ? « Pour les agents, c’est important d'avoir le regard d’autres personnes. C'est tellement attentatoire aux libertés… Mais parfois, il faudrait presque avoir le contenu des écoutes à l'avance pour pouvoir justifier une demande ! À l'inverse, les écoutes judiciaires (autorisées par un juge – ndlr) sont obtenues en deux heures, parfois une demi-heure. » "

Les révalations de Canal + convergent avec l'enquête de Médiapart dans laquelle " Interrogé sur les angles morts de la CNCIS, l'un de ses anciens membres s'en amuse : « Il y a le soft, le semi-soft, le hard et le top-hard… Tout ça n'est qu'un vaste concours de faux culs ! » ". En l'espèce, c'est au juge qu'il reviendra d'apprécier.

Selon ce que Médiapart rapporte, le fonctionnaire qui a demandé l'écoute de Dominique Strauss Kahn a donc motivé très sérieusement sa requête ; ses motifs ont passé avec succès l'examen des filtres hiérarchiques, qui savent sur quoi la demande risque d'être retoquée (" c'est tellement attentatoire aux libertés "),  et leur appréciation bienveillante l'ont forcément rassuré sur la justesse de ses formulations au regard de la loi,  blablabla blabla blabla

Soi la demande constitue un faux, soit il existe dans la police parallèle des procédures parallèles à celles qui passent devant la CNCIS. Jean-Marie Delarue a intérêt à s'en assurer et demander des explications au premier ministre sur cette affaire.

En attendant, et si tant est que DSK veuille savoir pourquoi François Fillon et Nicolas Sarkozy - à moins que le second dise n'en rien savoir - l'ont mis sur écoute, il ne lui reste plus qu'à déposer plainte. Le commissaire divisionnaire doit connaître la procédure. La plainte permettra d'ouvrir une instruction afin qu'un juge perquisitionne et recherche cette demande d'écoute motivée, identifie le demandeur, les filtres hiérarchiques dont le contrôle est venu garantir qu'il n'y avait aucune atteinte aux libertés, et l'auguste premier ministre de permanence qui a paraphé l'autorisation pour écouter les  marivaudages dans le cadre d'une enquête concernant (cocher la case)   :

  • la sécurité nationale,
  • la prévention du terrorisme,
  • la prévention de criminalité et délinquance organisée,
  • la sauvegarde d'éléments essentiels du potentiel scientifique et économique,
  • la prévention de la reconstitution ou du maintien des groupes de combat et milices privées dissous.

Il risque qu'il n'y ait pas d'enquête parce qu'il n'y aura pas de plainte pour violation de la vie privée.

C'est ce que logiquement l'avocat du commissaire divisionnaire aurait d'ailleurs du faire. Il ne l'a pas fait. C'est étonnant.

Et si d'aventure il y avait une plainte, le juge d'instruction risquerait de se voir refuser par le premier ministre l'accès aux archives au motif qu'elles sont couvertes par le secret défense. Ce que sait déjà d'avance l'avocat du commissaire divisionnaire. ce ne mange donc pas de pain de faire beaucoup de bruit pour rien.

Reste que cette révélation de Canal + confirme combien le secret défense est nocif.

Il permet de couvrir des écoutes qui n'ont rien à voir avec la protection de la sécurité publique et il empêche de savoir pourquoi cette protection de la sécurité publique a failli gravement.

On en saura donc jamais la vérité, à moins bien sur que le policier anonyme cesse de l'être.

Mais alors il s'expose à des poursuites disciplinaires et surtout à des enquêtes judiciaires qui ne manqueront pas de s'intéresser à sa proximité avec le commissaire divisionnaire à qui profite ses révélations.

La révélation de Canal + démontre la nécessité qu'il y a à donner les moyens qui s'imposent à CNCIS, comme le demande Jean-Marie Delarue, pour que ce magistrat puise exercer effectivement et pleinement sa mission pour garantir au pays que cessent les détournements de procédures, dont l'affaire DSK n'est sûrement pas la seule.

Le Canard enchaîné de cette semaine rapporte (Manuel la Menace p.2) que le président de la République s'est écrié contre son premier ministre en disant " il ne faut pas surestimer les menaces ! Il n'y a pas 3000 personnes qui peuvent poser des bombes " et que Bernard Cazeneuve, lors du séminaire gouvernemental du 22 janvier a confié aux ministres présents que " 505 Français partis faire le djihad faiaient actuellement l'objet de procédures ".

Le quota de 2000 lignes est donc très largement suffisant, si la DGSI sait se concentrer sur son boulot et ne pas perdre son temps ni se dissiper en gaspillant ses moyens sur des affaires de cul, comme le dit un "ancien membre".

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