Arnaud Montebourg fait la fête avec des amis et le duo de l'exécutif se vexe. Sa réaction est celle d'un petit chef de service (Montebourg, Filippetti et Hamon débarqués du navire gouvernemental, Critiques de Montebourg: "Une ligne jaune franchie" pour l'entourage de Valls, Démission du gouvernement : trois départs et une nouvelle équipe). Louis XIV exile Fouquet.
Il supprime le gouvernement dans le seul but de mettre Arnaud Montebourg au placard, comme si la constitution servait à justifier des comportements qui s'apparentent plus à des méthodes de harcèlement moral.
Un professeur de droit interprète cela comme " Un geste qui impose le Premier ministre comme chef de l’exécutif ". François Hollande est donc disqualifié.
Le premier ministre exige des économies et se permet la fantaisie de gaspiller un argent fou en décidant de démissionner son gouvernement, par susceptibilité. La contradiction du geste avec le dicours montre que le premier ministre est largué.
Il n'y a aucun courage dans cette démission. C'est même un aveu de faiblesse. L'impétuosité d'un coup de tête, d'un coup de sang. Tout l'opposé du sang froid nécessaire à ceux qui ont la responsabilité de diriger une grande puissance mondiale (et si, même si l'Allemagne a un un pIB plus gros que la France, elle n'est pas membre permanent du Conseil de sécurité des Nations-Unies...).
Il faudait donc penser à être un peu sérieux et à cesser de martyriser le droit public.
Si François Hollande "dissout" le gouvernement - ce qu'il n'a pas le pouvoir de faire - parce qu'il s'y trouve des ministres critiques, pourquoi ne prononce-t-il pas la dissolution de l'Assemblée - ce qu'il a le pouvoir de faire - alors qu'ils s'y trouvent de nombreux députés qui ne sont pas d'accord avec le gouvernement ?
Le duo de l'exécutif fait du très grand n'importe quoi. Un festival. Normal, c'est lété.
Les petits calculs, les effets de manches de matamores de la communication ne marchent plus. Ils nous font du stand up. De l'improvisation. Du comique troupier ?
L'Elysée réagit comme un petit chef chafoin. L'adjoint de service - l'adjudant de caserne (Manuel Valls veut une "armée") - est chargé de régler le compte au gêneur, à moins qu'il n'ait anticipé le souhait du maître.
Les seconds couteaux vallscistes menacent de "Pôle emploi" ceux qui n'obéissent pas ! Le pouvoir ne rechigne pas à adopter le chantage au chomage du Médef. La trop grande fréquentation de Monsieur Gattaz donne un drôle d'image du ... PS.
Le duo exécutif a une réaction d'exécutants jaloux de leurs prérogatives. Une dermatite de ronds de cuir et de manches de lustrine. C'est courtelinesque. Mais sans talent. Du mauvais théâtre de boulevard. Un drame de cocus jaloux et obséquieux qui s'épient par les trous de serrure.
Alors que la France est mal gouvernée depuis deux ans, la critique de l'évidence ne produit qu'une réaction typiquement administrative, de petit fonctionnaire de catégorie A, qui n'a rien de politique.
La réaction du président montre qu'il n'a aucun argument, aucun discours cohérent à opposer à ceux qui le critiquent.
Et l'autre s'en va en invoquant Cincinnatus et Saint Augustin (Qui est ce Cincinnatus cité par Montebourg?). Seul un miracle pourrait-il nous sauver ? C'est beau les conversions.
Dramatique.
Cela montre aussi que le pouvoir n'a aucune autorité.
La méthode Valls fondée sur l'invective, la stigmatisation et la menace ne marche plus. Elle est usée. C'est celle que les Français ont sanctionné en 2012. La politique King Com' ne marche plus (Montebourg, Bauer, Urvoas... Valls, un homme de réseaux à Matignon, Valls, Bauer, Fouks : le pacte de Tolbiac). Alors, le retour de Sarkozy, ce n'est pas sur que tout le monde en rêve...
Ce ne sont pas des politiques.
Ils ne font pas de la politique, ils gèrent une carrière, une réélection.
Cette "dissolution" du gouvernement en une illustration.
Manuel Valls n'est pas bon (Plus de huit Français sur 10 ne font pas confiance au gouvernement). Il s'accroche aux branches comme il peut. La démission du gouvernement s'inscrit alors bien plus dans la perspective d'une stratégie électorale pour l'échéance présidentielle, dans ... trois ans, que de répondre à l'attente des Français.
Et les affaires de l'Etat ?
Cela n'a pas l'air d'occuper beaucoup les esprits.
La droite bygmalienne se rengorge, se présente comme un recours. Le ridicule ne l'étouffe pas. Incapable de gérer les fiances de son propre parti, l'UMP prétend savoir gérer la France. Ce n'est plus l'hôpital qui se moque de la charité, mais la vérole qui se fout du bas-clergé.
Le FN crie comme une nuée de mouettes au cul du chalut. La charogne ne lui répugne pas. Il s'en délecte et en fait un motif de propagande comme récemment avec Ebola.
Cela montre que s'ils ont peut-être le sens de la domesticité publique, ils manquent à celui du service de l'intérêt général.
François Hollande est en train de poser une référence.
Il laissera son nom à la politique comme Kelvin (illustration) a laissé le sien à la science en déterminant le zéro absolu. Mais la concurrence est rude. Il pourrait être rattrapé et doublé sur sa droite.
Quant à Manuel Valls, démissionnaire impétueux, comment compte-t-il obtenir la confiance de l'Assemblée alors qu'il n'a plus la majorité ? (Manuel Valls a perdu la majorité absolue, Des frondeurs de plus en plus nombreux au sein de la majorité).
L'avenir du duo exécutif est écrit.
C'est à celui qui se débarrassera de l'autre et récupèrera Arnaud Montebourg pour l'élection de 2017 comme ultime recours. Arnaud Montebourg se prépare à être en 2017 ce que fut Jean-Luc Mélenchon en 2012, celui d'un rabatteur.
Il revient au PS de prendre ses responsabilités - c'est bien lui qui a soutenu et proposé ce candidat aux Français - et de faire comprendre efficacement à François Hollande que ce qui pose problème à gauche, c'est sa façon de faire de la politique.
Une solution serait que François Hollande démissionne de la présidence, plutôt que de menacer de " Pôle emploi " tous ceux qui ne pensent pas comme Manuel Valls, Monsieur 5%.
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