Variation sur plusieurs thèmes : le rêve et l’étrange, la célébrité et la création. En 1959, Norman Wells est un jeune écrivain, un peu désœuvré et au talent erratique. Il est en retard pour rendre un papier, et sa mère se plaint qu’il invente constamment des histoires. Qu’il s’invente des excuses. Un soir, dans un bar de Manhattan, il rencontre Truman Capote, qu’il aide à ramener une mystérieuse amie, ivre et brune. La belle endormie oublie sa chaussure dans la voiture de Norman et dès le lendemain ce dernier retourne chez Capote. Et fait la connaissance de Marilyn Monroe.
Christian de Metter ne s’est pas engagé sur la voie d’un énième panégyrique de l’icône du cinéma américain. Au contraire, il s’est emparé de celle-ci pour la faire revivre, et lui faire vivre une aventure hors du temps, hors du réel, aux frontières de la réalité et du rêve. Le rêve d’un écrivain en mal d’inspiration, timide et complexé, aimant les histoires, mais ne sachant pas comment les raconter. Norman est cet écrivain qui rêve éveillé, et doit se pincer pour réaliser que la magnifique jeune femme blonde qui est devant lui au petit matin est la mystérieuse amie brune de Truman Capote. Rencontrer l’immense écrivain était déjà inespéré en soi. Alors, parler à Marilyn !

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Marilyn se révèle alors à Norman. Elle lui parle, de ses angoisses, de sa vie d’actrice, de ses projets – elle va tourner avec Montand –, elle lui parle des affres de la célébrité, de la jeune Norma Jean qui sommeille en elle tandis que Marilyn est projetée – et son image avec elle – sur les écrans et sur le devant de la scène. Norma et Norman, un couple improbable, une histoire impossible. Une histoire inventée peut-être. Ou une simple parenthèse. Il vont partir ensemble, le temps d'un court voyage, ils vont s'évader.

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Christian de Metter manie l’onirisme et l’aquarelle avec grâce. Sa palette de couleurs explose tandis qu’il plonge les deux protagonistes dans ce récit à la fois sombre et irradiant de mystère. Il utilise la lumière avec parcimonie et semble la réserver à la beauté de l’actrice. Il capte chaque expression, chaque trait, chaque sourire de Marilyn comme s’il avait visionné des heures durant des images volées, scruté des photos immortalisant Marilyn. Chaque plan, chaque incursion sur les regards perdus, sur les doutes et sur les interrogations de celle-ci tiennent autant de la mise en scène que de la direction d’acteur. A la fois inquiétant et intimiste, finement dialogué, Marilyn est un roman graphique, presque un roman-photo avec ses postures figées, et ces gros plans troublants. Un court-métrage façon Alfred Hitchcock raconte… qui aurait rencontré Lewis Carroll. De l’autre côté du miroir.
DB

Marilyn, De l'autre côté du miroir, De Metter, Casterman, 94 pages, 18 €
La bande-annonce ici.

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© De Metter – Casterman 2009