Peu de gens savent, de Manu Larcenet. 169 révélations fondamentales permettant aux imbéciles d'appréhender le monde avec un minimum de sérieux.

Mi encyclopédie, mi recueil d'un savoir accouché jour après jour, dictionnaire relatif et drôle, carnet de croquis emportés, enlevés, il est important de clamer haut et fort que Peu de gens savent est un livre hilarant. Une aventure écrite et dessinée de 332 pages en couleurs (parfois) pour les dessins et en noir (souvent, très souvent) pour l'humour asséné au long des pages.
Ni almanach ni journal, Peu de gens savent embrasse des thèmes aussi variés et fédérateurs que la zoologie, la politique internationale, les sciences naturelles, l'histoire, la littérature, les faits de société, les dinosaures et les chinchillas ou les hommes à tête de pierre... de quoi damer le pion aux synthèses et sommes de saillies prétentieuses lues ou entendues ailleurs et se prétendant définitivement exhaustives.

Chaque page, chaque considération commence par la même phrase, comme une sentence a priori : « peu de gens savent ».

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Remercions solennellement Manu Larcenet de venir ainsi combler notre savoir lacunaire. Car, et ce ne sont que quelques exemples, il est vrai que « peu de gens savent que Jesse James, le hors-la-loi américain bien connu, était féru de danse contemporaine », « qu'Igor, lâme damnée du docteur Frankenstein était un être délicieux » et « que les otaries roses des Antilles sont fréquemment atteintes d'érotomanie ».
Manu Larcenet a noirci pendant deux ans des carnets « sans autre but que de provoquer des accidents de dessin ». Puis, au gré de l'écriture, tout a pris forme. C'est devenu ce magnifique album-livre, où se rencontrent les pensées intimes de l'auteur, des considérations des plus surprenantes, des faits inconnus, des personnages non moins anonymes. Et les éclats de rire du lecteur.
Peu de gens savent que le concept d'inconscient utilisé par Sigmund Freud dans sa théorie psychanalytique basée en partie sur l'étude des rêves est une vaste fumisterie ! Si j'avais un inconscient, je le saurais !

Manu Larcenet distille de l'humour noir dans une veine qui emprunte des chemins fréquentés par Alphonse Allais, Pierre Desproges, Ambrose Bierce, Albert Dupontel et Christophe Alévêque ou les Monty Pythons et Terry Gilliam et ses bestiaires iconoclastes...
Peu de gens savent est un voyage dans l'absurde comme on n'en fait plus beaucoup aujourd'hui et sur ce livre salutaire souffle un vent frais d'insolence et de dérision. Au fil des pages, des aquarelles subtiles et légères font écho à des dessins, croquis, crayonnés au trait fort et gras, illustrations ou évocations poétiques en miroir des textes.

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Inutile de dire : « peu de gens savent » que Manu Larcenet pratique cet humour rare qui parle à nos zygomatiques en puisant dans un imaginaire farfelu et cocasse, savant (et encyclopédique !) mélange d'écriture travaillée et de plume aventureuse et inspirée. Parce que, n'en déplaise à l'auteur, on le savait déjà.
Et toc !
- D.B.

Peu de gens savent, 169 révélations fondamentales permettant aux imbéciles d'appréhender le monde avec un minimum de sérieux, de Manu Larcenet.
Couverture cartonnée, quadri, dos toilé, intérieur couleur et noir et blanc, 332 pages, Les Rêveurs, Hors collection. Avril 2010. 28 €.