Et si au moment de partir en vacances, au lieu de prendre une valise supplémentaire, emportant l’intégrale de vos Tintin ou de vos Thorgal, si vous changiez de support ? Oubliés les grands formats, les 30/40 et les beaux livres, les romans graphiques au format poche, les classiques…
La BD numérique se développe en France à grande vitesse depuis que les Smartphones, Iphone en tête, inondent le marché du mobile. La BD se met au diapason du tout Internet – connexion illimitée, 3G, WiFi – et entame une nouvelle carrière hors rayons des libraires. Alors même que la bande dessinée revendique haut et fort son statut d’art adulte, elle continue sa percée et multiplie les moyens pour fidéliser son lectorat et en conquérir de nouveaux.En février 2009, le Festival de la Bande Dessinée d’Angoulême avait utilisé l’Iphone comme support de promotion et de présentation de la sélection officielle avec 39 albums consultables en ligne, proposant des extraits de quatre ou cinq pages pour chaque titre. Et cela gratuitement.
En avril 2009, l’éditeur Soleil propulsait la BD Les Blondes sur écran réduit, avec un lancement sur téléphone mobile après un découpage en six épisodes de manière à s’adapter « aux circonstances et à la durée d’utilisation moyenne constatées »… Du 15 avril au 2 mai, ces épisodes avaient été mis en vente au tarif de 1 € 59 (TTC), sur un rythme bihedomadaire.
Fin avril, c’était au tour de Lewis Trondheim d’annoncer la publication, chaque jour pendant un an, d’un strip de 6 cases, à lire exclusivement sur son téléphone portable. Un peu avant, Christophe Bertschy, le créateur de Nelson qui paraît sur la toile et dans les pages du Matin suisse depuis huit ans, évoquait pour Comic Strip son intérêt pour une aventure semblable...
Aujourd’hui, Soleil s’est vu emboîter le pas par Dargaud, Dupuis, Le Lombard, et des sociétés telles que Ave ! Comics ou Anuman Interactive développent pour ces grands éditeurs les versions nomades d’albums de leurs catalogues respectifs.
Les lecteurs, entendez les « players », comme pour un fichier mp3, varient selon les plateformes choisies, mais le credo est le même : la portabilité, la lisibilité, l’interactivité. Qu’ils soient gratuits ou payants, les catalogues numériques s’étoffent de jour en jour. Chez Dargaud, des titres comme Lady S. ou IRS sont déjà disponibles, et Valérian, Achille Talon, XIII et Open Space sont d’ores et déjà annoncés sur l'Iphone et l'Itouch, courant juillet 2009.
La BD sur téléphone mobile rebutera sûrement plus d’un puriste, même si la technique permet un rendu parfait des dessins et une ergonomie fluide permettant de feuilleter virtuellement les pages, de zoomer sur des cases, des détails. On peut même se laisser guider en diaporama. Le contact avec le livre, lui, est inexistant, les dimensions de l’écran et les capacités du « player » ne sont pas toujours idéales.
Phénomène de mode ou avancée technologique qui va permettre à la BD de rebondir et d’installer un nouveau mode de vie et de lecture ? On ne saurait le dire aujourd’hui. La mobilité à tout prix, le nomadisme web permettront bien sûr d’emporter partout plusieurs gigas de BD en lieu et place d’une collection complète de son héros préféré – qui peut atteindre jusqu’à plus de 50 albums pour certains…
Mais si nous n’en sommes pas encore là, il faut saluer l’effort fait par les éditeurs français pour s’engouffrer dans la brèche, sur un créneau déjà connu et reconnu des Japonais ou des Coréens par exemple, grands consommateurs de strips et mangas à lire en tous temps et en tous lieux.
Le prix, quant à lui, reste abordable, entre 1,59 et 4,99 € l’album numérique, contre de 5 à 15 € l’album traditionnel. Cela dit, il faut quand même acheter le téléphone…
DB
IR$, de Vrancken et Desberg, Editions Le Lombard, Dargaud,11 albums parus.