A l'occasion des 50 ans du premier diplôme professionnel de l'animation, Patrice Weisheimer, secrétaire général du Syndicat de l’éducation populaire-Unsa, s'adresse à Patrick Kanner, ministre de la jeunesse et des sports. Temps de travail, postes offerts, professionnalisation: autant de point qui attendent « une orientation politique de l’Etat », conformément aux promesses du candidat François Hollande.
Monsieur le Ministre,
Ce mardi 9 septembre 2014, les animateurs et professionnels de l’éducation populaire fêtent les 50 ans de l’animation. En effet, le 9 septembre 1964 paraissait le décret du premier diplôme professionnel de l’animation : le Decep, diplôme d’Etat de conseiller d’éducation populaire. Ce mardi, à l’initiative du Journal de l’animation et du SEP-Unsa, les animateurs sont invités à tweeter et poster sur Facebook avec le hashtag #anim1métier pour manifester leur besoin de reconnaissance. Au regard de ce mouvement qui se dessine, nous vous demandons de tenir compte de ce secteur qui dans sa globalité compte aujourd’hui près de 800 000 salariés et dont vous avez la responsabilité en tant que ministre de la jeunesse et des sports.
Un des enjeux majeurs révélés par la réforme des rythmes éducatif est la professionnalisation. Le dernier Comité national de jeunesse et d’éducation populaire a permis aux organisations syndicales de salariés, d’employeurs et aux fédérations d’éducation populaire de tenir le même discours. La professionnalisation du secteur de l’animation est une priorité. Il faut un cap politique permettant de déterminer le niveau de compétence et de qualification des animateurs, ainsi que des modalités d’accès aux formations professionnelles actuellement inaccessibles financièrement aux animateurs. Le Brevet professionnel de jeunesse d’éducation populaire et du sport (BPJEPS) au niveau IV est le minimum à atteindre. Et il est de la responsabilité des pouvoirs publics de former ces professionnels.
Nous devons également vous signaler que même si on entend ces dernières semaines que les collectivités éprouvent des difficultés à embaucher, de nombreux animateurs titulaires de diplômes professionnels sont toujours au chômage. Ils « coûteraient trop cher » et ce sont des personnes faisant office d’animateurs qui sont embauchées. Cette situation est inacceptable. Le temps périscolaire doit être pris en charge par des professionnels dont c’est le métier (sous-entendu avec des compétences et des qualifications). Najat Vallaud-Belkacem s’était engagée le 16 juillet 2014 à mettre en œuvre une commission de travail, sous son autorité, ayant pour rôle de faire des propositions sur les conditions nécessaires à la professionnalisation du secteur. Nous vous demandons de démarrer ce chantier au plus vite. Ces travaux devront comprendre un calendrier et une méthode de travail codécidée avec les partenaires sociaux.
Compte tenu des difficultés à mettre en œuvre la négociation sur le temps partiel, les employeurs de la branche de l’animation n’ont pas encore mis à l’ordre du jour la négociation sur les contreparties du pacte de responsabilité. Nous vous demandons de les mobiliser pour négocier sur des objectifs d’amélioration des salaires et de prise en charge des formations professionnelles pour les salariés. Les collectivités et la Caisse nationales d'allocations familiales financent la création d’emplois dans l’animation. Il faut cependant rendre notre métier plus attractif et cela passe notamment par une amélioration de la grille indiciaire.
De plus, nous vous rappelons que le président de la République s’était engagé dans son discours de Créteil, le 11 février 2012, à mettre en œuvre un pôle interministériel éducatif. Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Education, n’y est pas opposée et Matignon attend la position des deux ministères pour entériner cette perspective. Nous vous demandons de vous positionner pour enfin mettre en œuvre l'engagement présidentiel afin, qu’in fine, travail entre animateurs et enseignants soit facilité.
Enfin, nous observons que la mise en œuvre de la réforme des rythmes se fait difficilement en cette rentrée. Votre ministère, par ses politiques autour des projets éducatifs locaux ces vingt dernières années, dispose de l’expertise pour accompagner les partenaires éducatifs au niveau local. Les conseillers d’éducation populaire et de jeunesse (CEPJ) disposent des compétences pour animer cette coéducation décidée par la loi sur la refondation. Mais aujourd’hui la charge de travail des CEPJ en poste les empêche de se mobiliser à la hauteur des besoins. Nous demandons que votre ministère crée 1 000 postes de CEPJ sur le poste budgétaire des 10 000 non pourvus par l’Education Nationale (faute de candidats) avant que ces postes ne disparaissent. Avec ce recrutement, 1 000 CEPJ pourront développer une mission exclusive de coordination et de formation pour mettre en œuvre les Projets éducatifs de territoire dans une logique de coéducation.
Monsieur le ministre, vous venez d’arriver sur un secteur sinistré qui a été maltraité depuis trop longtemps. Najat Vallaud Belkacem avait proposé des pistes de travail avant son départ trop rapide, il devient plus qu’urgent que vous portiez une expression claire et concrète pour donner une orientation politique de l’Etat sur le secteur de l’animation et de l’éducation populaire.