Billet de blog 12 avril 2012

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Propositions pragmatiques pour une Europe de la croissance

«L’austérité tous azimuts n’est en aucun cas une solution pour sortir de la crise. (...) Le redressement se fera par des politiques qui sûrement exigent des efforts de la part de chaque pays, mais qui surtout jouent la carte maîtresse de la solidarité européenne et de la croissance.» Par Nicolas Bouzou, économiste, Jo Leinen, député européen allemand (SPD), Bertrand Mertz, maire (PS) de Thionville et Nicolas Schmit, ministre du travail, de l’emploi et de l’immigration du Grand-Duché de Luxembourg.

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«L’austérité tous azimuts n’est en aucun cas une solution pour sortir de la crise. (...) Le redressement se fera par des politiques qui sûrement exigent des efforts de la part de chaque pays, mais qui surtout jouent la carte maîtresse de la solidarité européenne et de la croissance.» Par Nicolas Bouzou, économiste, Jo Leinen, député européen allemand (SPD), Bertrand Mertz, maire (PS) de Thionville et Nicolas Schmit, ministre du travail, de l’emploi et de l’immigration du Grand-Duché de Luxembourg.


La crise financière dans la zone euro n’est pas encore maîtrisée. Certes, l’accord sur le traité portant sur la stabilité, la coordination et la gouvernance –négocié dans des conditions peu transparentes et qui ne résout que très partiellement les problèmes actuels– ainsi que, avant tout, l’action de la Banque centrale européenne, ont contribué à calmer momentanément les marchés.

Il est vrai que la réduction des déficits publics reste incontournable pour certains Etats. Mais cet objectif ne peut être atteint sans croissance soutenable. Les mesures d’austérité imposées sans discernement se révèlent contre-productives et plongent un pays tel que la Grèce non seulement dans une récession de plus en plus profonde mais également dans une crise sociale et politique majeure.

La situation de la zone euro reste fragile. Pourtant sa stabilisation est possible, à  condition d’ajuster les politiques en conséquence.

La consolidation des finances publiques doit être poursuivie, d’une part par l’augmentation ciblée des prélèvements obligatoires, surtout pour les catégories sociales les plus aisées, et, d’autre part, par une réduction de certaines dépenses, en améliorant la productivité  du secteur public. Ces adaptations budgétaires doivent être définies selon un calendrier qui les étale dans le temps, afin de ne pas asphyxier la croissance. Il est crucial que l’effort, tant en termes de prélèvements que de dépenses, ne pénalise pas les investissements d’avenir, entre autres dans l’éducation, la formation, la recherche-développement et l’innovation écologique.

Si ces pays doivent entreprendre des réformes structurelles afin de redresser leur compétitivité, la politique de dévaluation interne qui consiste à réduire drastiquement les revenus a des conséquences économiques et sociales désastreuses. Le chômage et la pauvreté  explosent littéralement. Cette «thérapie mortelle» a été comparée par l’économiste allemand Peter Bofinger à la politique économique menée par le chancelier Heinrich Brüning à la fin de la République de Weimar.

Aussi faut-il se demander si les pays qui bénéficient de surplus commerciaux considérables ne devraient pas voir les salaires augmenter plus rapidement pour corriger les disparités grandissantes de la compétitivité. Une attention particulière doit être consacrée au chômage des jeunes, sujet à peine effleuré lors du dernier Conseil européen qui s’est abstenu de faire des propositions crédibles. L’Europe a besoin de sa jeunesse. Il est inacceptable que dans plusieurs pays un jeune actif sur deux n’ait ni un emploi ni une formation. Il faut mobiliser les ressources budgétaires communautaires, du Fonds social et des Fonds structurels, pour lancer une stratégie favorisant l’emploi des jeunes.

Dans l’optique d’une véritable Union budgétaire, nous plaidons pour une augmentation raisonnable du budget communautaire financé  par des ressources propres telles qu’une taxe européenne sur les transactions financières et éventuellement une taxe carbone. A terme, la mise en commun d’une partie au moins des capacités d’endettement des pays de la zone euro, sous forme d’eurobonds, est nécessaire. En attendant, le renforcement des moyens financiers des instruments de soutien et de stabilisation s’impose. Mais il faut également mettre en commun les outils de financement permettant de relancer la croissance structurelle de la zone euro grâce à des investissements publics et privés dans des secteurs stratégiques tels que le transport, les énergies renouvelables, les réseaux à haut débit etc. Ces « project bonds » pourraient être développés en étroite relation avec la Banque européenne d’investissement. Ils seraient destinés au financement de ces investissements structurants, notamment en faveur des pays dont la capacité d’investissement est réduite par les efforts de consolidation. Favorables au marché intérieur, ils contribueraient à y redresser la croissance potentielle.

L’austérité tous azimuts n’est en aucun cas une solution pour sortir de la crise. Il faut changer rapidement de stratégie comme le démontre l’exemple grec. Les Grecs ont en effet réalisé des efforts réels en réduisant leur déficit entre 2009 et 2011 de près de 11%. Mais en même temps leur économie s’est contractée par rapport à 2007 de 15 %. Le Portugal voit également ses efforts remarquables annulés par une récession interminable. Il devient évident que, sans reprise de la croissance, ces pays ne pourront pas sortir du marasme actuel. L’éclatement de l’Union monétaire ne serait alors plus un scénario improbable. Les conséquences politiques, économiques et financières seraient gravissimes. Le redressement se fera par des politiques qui sûrement exigent des efforts de la part de chaque pays, mais qui surtout jouent la carte maîtresse de la solidarité européenne et de la croissance. Nous croyons à cette Europe qui retrouve la confiance et avance à nouveau.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.