Le Mexique a joué ces dernières années un rôle majeur sur la scène internationale pour favoriser le développement du droit conventionnel et des mécanismes internationaux pour la protection des droits humains. Sur le plan interne, les gouvernements mexicains se sont employés à harmoniser le droit national avec les exigences des traités internationaux relatifs aux droits humains. Jusqu'ici, cet objectif n'a été que partiellement réalisé. L'un des principaux obstacles qui entrave l'application réelle des normes relatives aux droits humains au Mexique réside dans le fait que la constitution ne reconnaît pas de manière claire et catégorique l'obligation de respecter ces traités. La résistance continuellement opposée par certaines autorités aux niveaux fédéral, des États, et des communes, qui refusent de reconnaître que le droit international relatif aux droits humains a valeur constitutionnelle, nuit à son application dans tout le pays.
La juridiction militaire prive les victimes de leurs droits
Une autre question cruciale se pose aux pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire : le rôle de la justice militaire dans les enquêtes, les procès et la décision des sanctions pour des militaires impliqués dans des atteintes aux droits humains.
En décembre 2009, le rapport d'Amnesty International, Mexique : Nouveaux cas de violations des droits humains perpétrées par l'armée, décrivait des cas emblématiques d'exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées, torture et détentions arbitraires par des membres des forces armées mexicaines participant à des actions de maintien de l'ordre. Ce rapport montrait les obstacles opposés par la juridiction militaire aux victimes et aux proches désireux de déposer plainte et d'intenter des actions en justice.
Les autorités civiles transfèrent en effet systématiquement ces affaires directement aux autorités militaires sans même les enregistrer correctement. Le système de justice militaire, non seulement empêche les victimes et leurs proches d'obtenir des informations sur leur affaire, mais ne communique à la société mexicaine que les données les plus rudimentaires concernant les allégations de violations et les mesures prises pour enquêter correctement.
Les victimes et leurs proches se voient privés de leurs droits fondamentaux d'obtenir justice, vérité et réparation.
Le rôle joué par l'armée dans le maintien de l'ordre sous le gouvernement actuel est à observer de très près, car le nombre d'atteintes aux droits humains signalé est en augmentation, parallèlement au déploiement à grande échelle des forces militaires.
Le gouvernement a fréquemment réitéré son engagement de respecter les droits humains dans le cadre de sa lutte contre le crime organisé. L'ampleur de la compétence militaire constitue cependant un obstacle majeur à la justice dans le pays.
Quand les instances internationales s'en mêlent
La Cour interaméricaine des droits de l'homme (CIADH) a confirmé, en décembre 2009, dans son jugement sur l'affaire Radilla-Pacheco, l'obligation des autorités mexicaines de mettre fin au recours à la justice militaire pour des cas de violations de droits humains.
En décembre 2009, le gouvernement du Mexique a explicitement reconnu son obligation de donner suite à ce jugement.

Ces réformes législatives devront comprendre la restriction de la juridiction pénale militaire à des cas exceptionnels, le système pénal militaire ne pouvant avoir de compétence pour diligenter une enquête en cas de violations des droits humains ni pour juger et sanctionner leurs auteurs présumé.
Pas de sécurité sans justice
La complexité des problèmes sécuritaires qui se posent dans de nombreuses régions du pays en raison des niveaux élevés de violence dus aux bandes de criminels est certaine. On ne peut cependant s'attaquer à l'insécurité sans que les droits de tous, notamment de ceux qui sont suspectés de crimes et des simples spectateurs, soient respectés et garantis par les forces de sécurité.
Il est vital que toutes les forces de sécurité, civiles ou militaires, soit correctement formées, soumises à un contrôle de la part de civils, et tenues de rendre des comptes pour les atteintes aux droits humains.
L'Argentine, la Colombie, le Nicaragua et le Pérou ont déjà pris des mesures pour retirer de la compétence militaire les affaires d'atteintes aux droits humains.
Cette démarche capitale, montrera au monde que le pays s'engage clairement à respecter le droit international relatif aux droits humains et à faire progresser la cause de ces droits au Mexique.
En savoir plus sur Valentina et Inés, agressées par des militaires
Lire le texte que Agnès Bihl a écrit pour Valentina et Inés
Voir en vidéo le témoignage des deux femmes
Avec Amnesty International, le 3 décembre, agissez sur www.marathondessignatures.com !