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Billet de blog 23 janvier 2015

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Charlie Hebdo : réponse à CHRIS43 sur la faute de la police

Vous me demandez dans votre commentaire à mon billet " Attentat de Charlie Hebdo : la corruption dans la police une des causes du fiasco ? " : " Avant l'attentat Coulibaly n'était qu'un terroriste potentiel, comme des milliers d'autres signalés.  Je répète ma question : comment fait-on pour déterminer lequel qui va passer à l'acte ? ". Si la police "signale" Coulibaly, c'est qu'il était déjà considéré comme un terroriste. Le simple fait de participer à une organisation le permet (Art. 421-2-1 du Code pénal), ce qui impliquait l'obligation d'ouvrir une procédure et donnait ainsi à la police des moyens pour le surveiller, le convoquer, contrôler ses déplacements, voire les lui interdire. L'adoption du délit d'«entreprise individuelle terroriste» est venu faciliter cela. Il ne sert donc à rien de légiférer à nouveau si le droit existant n'est pas respecté ou mis en oeuvre. La contradiction à signaler Coulibaly et ne pas ouvrir de procédure judiciaire laisse présumer une faute et que le gouvernement raconte n'importe quoi en considérant que :

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Vous me demandez dans votre commentaire à mon billet " Attentat de Charlie Hebdo : la corruption dans la police une des causes du fiasco ? " : " Avant l'attentat Coulibaly n'était qu'un terroriste potentiel, comme des milliers d'autres signalés.  Je répète ma question : comment fait-on pour déterminer lequel qui va passer à l'acte ? ". Si la police "signale" Coulibaly, c'est qu'il était déjà considéré comme un terroriste. Le simple fait de participer à une organisation le permet (Art. 421-2-1 du Code pénal), ce qui impliquait l'obligation d'ouvrir une procédure et donnait ainsi à la police des moyens pour le surveiller, le convoquer, contrôler ses déplacements, voire les lui interdire. L'adoption du délit d'«entreprise individuelle terroriste» est venu faciliter cela. Il ne sert donc à rien de légiférer à nouveau si le droit existant n'est pas respecté ou mis en oeuvre. La contradiction à signaler Coulibaly et ne pas ouvrir de procédure judiciaire laisse présumer une faute et que le gouvernement raconte n'importe quoi en considérant que :

Premièrement, les "milliers de personnes signalées" est un chiffre invérifiable, puisqu'il est invoqué par un service qui refuse de répondre à la représentation nationale en invoquant le secret-défense. Ce que dit ce service, ou ce qu'on lui prête, ne vaut donc rien. Un universitaire et un journaliste s'étant rendu en Syrie, invités hier soir par Médiapart, énoncent un chiffre de deux cents personnes susceptibles de passer à l'acte. Libre à chacun de préférer croire un chiffre invérifiable à des données débattues publiquement par des personnes qui étudient le sujet.

Deuxièmement, soit les personnes signalées - jusq'aux USA - le sont sur des éléments suffisants permettant d'ouvrir une procédure ; soit elles sont signalées de façon abusive. D'où l'importance à obliger la DGSI à être contrôleée par une autorité indépendante dans ses signalements pour empêcher que n'importe le soit pour n'importe quelle raison. Un signalement sur des éléments sérieux, en revanche, impose l'ouverture d'une instruction. L'instruction judiciaire est obligatoire en cas de "terrorisme", puisque c'est une infraction qualifié crime. Dès lors qu'il y a signalement, la DGSI a donc l'obligation de dénoncer ces faits au Parquet en vertu de l'article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale, des droits de la défense et du droit à l'information du mis en cause. L'ouverture d'une instruction permet un contrôle judiciaire, donnant les moyens de surveiller les suspects. L'absence d'instruction judiciaire montre que la police n'a pas informé la justice, qu'elle a contourné son obligation d'inforamtion du parquet, méprisé les droits de la défense et son obligation d'impartialité. Elle a failli a son obligation d'exemplarité. Libre à chacun de se satisfaire d'une police qui agit au mépris du droit.

Troisèmement, pour rappel, il y a 243 000 policiers et gendarmes en France (sans compter les services privés). Il y a donc des moyens. Le public peut raisonnablement exiger une gestion intelligente de l'affectation des moyens de la police en considération de la priorité des menaces contre la sécurité publique. Les attentats démontrent que ce ne sont pas les moyens mais l'intelligence à les gérer qui manque. Il est incohérent qu'un ministère affecte des moyens pléthoriques pour des procédures de joints et d'étrangers, objectifs secondaires et peu motivants, et prétende qu'il en manque alors que le premier ministre angoisse l'opinion en affirmant que le risque terroriste n'a jamais été aussi grand en France. C'est une insulte à l'intelligence. Libre à chacun de l'accepter.

Quatrièmement, comment pouvez-vous croire que la police qui fait des procédures pour un bout de shit soit incapable d'appréhender des des kalachnikovs, des munitions, des gilets pare-balle, des bazooka ? Elle contrôle Coulibaly, un type signalé et le laisse repartir. Elle est alertée de deux types violents qui rôdent autour de Charlie Hebdo et ne fait rien. Plutôt que de contrôler dix fois une même personne, ce qui montre qu'elle gaspille ses moyens, la police devrait contrôler une fois par jour les gens qu'elle a elle-même signalés.  Il est inadmissible que les "passages à l'acte" profitent de l'incohérence de gestion de la police. Libre à chacun de cautionner un gaspillage des ressources affectées à une politique discriminatoire.

Cinquièmement, la détention d 'armes et de munitions sans autorisation administrative - est une infraction, dont les peines peuvent aller jusqu'à dix ans d'emprisonnement. Le droit permet donc à la police d'intervenir, sans attendre un "passage à l'acte", de saisir ces armes, d'enquêter et remonter les réseaux. Ce n'est pas fait malgré toutes les armes présentes en France. Voilà donc un pays étonnant où la police contrôle des millions de personne, pour rien, plutôt que de poursuivre le trafic d'armes, malgré la solide répression inscrite dans le droit, qui permettent un carnage dans un journal publiquement menacé par les terroristes. Libre à chacun de se satisfaire de l'idée que la police voit plus facilement un joint qu'une Kalachnikov.

Sixièmement, si signaler des personnes n'induit pas la surveillance de leurs déplacements, à quoi bon les signaler ? Coulibaly est allé en Belgique acheter des armes en grosses quantitésil a vendu sa voiture, ce qui a du être signalé. A qui peut-on faire crorie que la DGSI n'a pas accès au fichier des cartes grises ?

Si les moyens existant étaient affectés intelligemment en proportion de l'importance de la menace, en considération des équipents informatiques déjà existant, dans l'hypothèse que la police respecte le droit, il est raisonnable de pouvoir penser qu'il n'y aurait pas eu de passage à l'acte. La contradiction entre l'état du droit, les moyens de la police, l'absence inexplicable d'ouverture d'instruction contre des personnes signalées, montre que le gouvernement essaye d'exonérer les dirigeants de la police de leur incompétence, comme il en couvre lorsqu'ils commettent des infractions. Libre à chacun d'accepter ces incohérences graves. Tout peut se défendre.

NB : Il n'y a pas de mise en cause générale de la police et des policiers. Non. Il s'agit d'une critique de sommet de l'institution qui met en danger tant les la population que les fonctionnaires de police et de gendarmerie eux-mêmes. Au-delà des victimes civiles et de la violence armée incroyable qui s'est déroulée dans la capitale où la proportion de policiers par habitants est trois fois supérieure à celle des métropoles régionales, trois fonctionnaires sont morts pour avoir été exposés inconsidérément à un risque, dont il est raisonnable de penser que leur administration se devait de les prévenir, à commencer par le garde du corps de Charb et les policiers du quartier.

Il est anormal d'entendre dans ce débat une vision monolithique des faits pour obliger à une solidarité qui vient couvrir des erreurs ayant abouti à autant de morts et de blessés. C'est irresponsable. Les fonctionnaires du RAID, de la BRI et du GIGN ne sont pas là pour exposer leur vie, prendre des risques phénoménaux, pour récupérer les conséquences de bavures ou d'impéritie d'un ministère dont l'actualité vient de sanctionner dramatiquement sa très mauvaise gestion des priorités.

NB' : La faute de la mauvaise gestion de la police devient politique dans la mesure ou le politique ne procède pas à un remplacement des cadres qui ont failli. Elle est aussi politique pour l'absence de décisions susceptible à faire obstacle efficacement à la finance de la criminalité organisée, qui utilise les mêmes moyens que ceux de l'évasion fiscale ou du blanchiment de la corruption.

Le terrorisme est un business : Le terrorisme n'est qu'une branche sectaire de la criminalité organisée, laquelle n'est d'abord qu'un business très profitable. La mafia est le seuil ultime de la logique libérale, fondée sur le rapport de force et l'anomie, telle qu'elle tente de s'imposer dans l'accord transatlantique, en faisant prévaloir les intérêts des "investisseurs" sur le droit des Etats.

Les 17 morts de Paris sont une conséquence de la dérégulation bancaire, sans laquelle les fonds douteux ne circuleraient pas aussi facilement. Force est de constater que l'ennemi de la finance n'a rien fait en ce domaine pour entraver la circulation de l'argent sale, son blanchiment et son réinvestissement dans l'économie "légale", si tant est qu'il en reste une, puisque le PIB intègre dorénavant le chiffre d'affaires de la pègre. Un mafieux est un investisseur selon cette nouvelle logique comptable. Un mafieux fera un jour un procès à un Etat pour le risque potentiel de perte de gains. L'accueil des contestations d'entreprises transnationales, malgré des pratiques douteuses notoires faites au mépris de l'ordre public qu'elles violent, montrent que la banalisation nécessaire à voir une organisation criminelle plaider le dédommagement de ses pertes n'est plus à exclure.

Libre à chacun de voter pour des mystificateurs qui couvrent la corruption dans le Tarn, provoquant la mort d'un botaniste, répriment des libertés publiques en mutilant ou persécutant ceux qui l'exercent et est incapable de mettre bon ordre dans une institution, où la rigueur ne semble trouver à s'appliquer qu'au petit personnel, qui se trouve en première ligne.

17 morts à Paris, deux fois plus qu'à Toulouse. La progression arithmétique est d'autant plus inquiétante que le pouvoir ne cherche pas d'explication ni de responsabilité à un tel fiasco. Il garde les mêmes et il continue. Il portera donc l'entière responsabilité du prochain attentat.

En espérant vous avoir répondu.

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Mise à jour :

Six mois avant les attentats, Coulibaly avait été contrôlé avec les Belhoucine 

Un rapport de police indique qu'Amedy Coulibaly a été contrôlé le 30 août 2014. Il était en compagnie des frères Belhoucine, Mohamed et Mehdi.

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