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Billet de blog 30 mars 2010

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Mélenchon plus fort que «Michou la Colère»

C'est une vidéo qui buzze dans le petit monde d'internet, où l'on voit le président du Parti de gauche prendre violemment à partie un apprenti journaliste, Félix Briaud, en marge d'une diffusion de tracts le 19 mars dernier…

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C'est une vidéo qui buzze dans le petit monde d'internet, où l'on voit le président du Parti de gauche prendre violemment à partie un apprenti journaliste, Félix Briaud, en marge d'une diffusion de tracts le 19 mars dernier…

L'entretien part mal, et «Méluche» ne semble pas des mieux prédisposés. Le dialogue s'envenime vite autour du sujet des maisons closes, cité en exemple du «mélange de voyeurisme et de prostitution de l'esprit public» de la sphère médiatique selon Jean-Luc l'évangile vigilant. Alors que le sujet n'intéresse visiblement pas Mélenchon («Un débat sans aucun intérêt (…) C'est vos problèmes à vous, le refoulé de la petite bourgeoisie (…) Moi, ce que vous racontez, ça ne concerne personne dans mon quartier, personne ne m'interpelle pour me dire "Tiens, je préférerais des maisons closes que d'aller chercher des putes au coin de la rue"…»), les relances de Félix Briaud font sortir l'eurodéputé de ses gonds.

«Avec moi, vous parlez de politique! Vos sujets de merde, vous les faites avec les gens qui veulent répondre à de la merde!», lâche-t-il, avant de conclure l'entretien, sans grande commisération envers son interlocuteur: «Ecoute-moi bien petite cervelle: Tu fermes ta petite bouche, tu me parles politique… moi je te parle de médias et de ton métier pourri!»

Le Canard Enchaîné aimait représenter le colérique Michel Debré, premier ministre de De Gaulle, un entonnoir sur la tête et l'avait rebaptisé «Michou la Colère». Voilà un nouveau client.

Illustration 4
Capture d'écran du blog de Jean-Luc Mélenchon

Cet épisode doit aussi être vu à la lecture de la rancœur qu'éprouve l'ancien sénateur de l'Essonne vis-à-vis des grands médias télévisé, et spécifiquement France Télévisions. Dans un communiqué rageur au soir du second tour des élections régionales (lire ci-dessous), Mélenchon accusait ainsi le service public de «piétiner le pluralisme politique», s'estimant victime d'être mis à l'index des émissions politiques de France 2 et France 3 depuis qu'il avait déclaré à Arlette Chabot d'«aller au diable!», lors d'un sinistre débat d'avant européennes, le 4 juin 2009 (lire le billet de blog d'alors de François Bonnet).

Illustration 5

Cliquez pour agrandir le communiqué

En conclusion de l'extrait vidéo, on entend Mélenchon livrer un constat qu'on ne peut toutefois rejetter en bloc: «Vous êtes en train de préparer un drôle de métier (…) à mouliner du papier qui se vend». Mais là où le bât blesse, c'est qu'il s'en prend au maillon le plus faible de l'institution qu'il entend dénoncer, mettant tout le monde dans le même sac, y compris ceux que la sociologie des médias a nommé «les OS du journalisme».

Il faut tout de même relativiser l'acrimonie mélenchonesque, vécue par les journalistes de presse écrite qui le suivent régulièrement, comme une partie du personnage, caractériel et excessif, qui s'est aussi construit un personnage médiatique sur cette façon bien à lui de «conflictualiser» ses relations avec la presse. Pour l'anecdote, l'auteur de ces lignes ne résiste pas à narrer deux tranches de vie commune avec «le héraut de l'autre gauche», qui se rêve tour à tour en Oskar Lafontaine ou en Evo Morales de la vie politique française.

La première eut lieu en marge d'un meeting aux européennes, quand il se précipita vers une consœur, en lui lançant, mi-débonnaire mi-sérieux: «Vous, on est fâché! Mais je ne sais plus pourquoi…» La seconde conclut un entretien réalisé par Mediapart à l'automne dernier, après plus d'une heure de dialogue par webcams interposées. Inquiet devant le refus de lui faire relire l'interview avant publication, il dit alors: «Bon, je vous fais confiance pour édulcorer certains de mes propos. Ce n'est pas de vous que j'ai peur, mais de moi…»