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Devoir de mémoire
Il y a cent deux ans, c'était hier
"Il y a cent deux ans, c'était hier
Ils étaient partis en voyage, prenant le train, pour la dernière fois, heureux d'en être,
Choisis, élus parmi les leurs ils s'envolaient vers un ailleurs plein de promesses
Sourires aux lèvres la tête haute, pères de famille et puis les autres, c'était la liesse
Sur les quais ils embrasaient, femmes et enfants, rieurs et fiers par les fenêtresHommes des champs et ceux des villes, ils étaient frères, et c'était beau
Sur les rails ils cheminaient tous ensemble en un wagon pour une douce France
Où ils allaient peu importait, fusils légers et chausser lourd, c'était Byzance
Du bleu du blanc et puis du rouge, sur leurs casques la mère patrie
en drapeauParties de cartes improvisées sur le fer noble des cantines, un paysage qui défilait
Tombant vestes, ils s'entassaient, les uns les autres les voix enjouées, La Marseillaise
Ils chantaient "Le jour de gloire est arrivé ", la tyrannie et toutes ces foutaises
Les heures passaient ils s'enivraient d'eau de vie, mais ils ignoraientQuand locomotive s'est arrêtée, ils sont descendus le coeur joyeux en cet autre pays
Leurs uniformes étaient froissés, leurs besaces déchirées, quand tonna le garde à vous
L'orage grondait, la pluie les accueillait , leurs matricules autour du cou
Soldats d'une guerre de fleurs et de jasmin bientôt rejoindraient les tranchées de la lieLe ciel gris sifflait de balles, les vents de l'Est soufflaient grenailles, un opéra
Au front ils étaient aux premières loges, de ce théâtre de chairs et de sang
Rampant leurs corps ils charriaient les cadavres de leurs compagnons vrillés aux flancs
Embourbés et affamés, ils fuyaient même le silence d'une lettre de là-basAu bords de la Marne, ils se baignaient et ils flottaient les yeux livides
Au chemin des Dames ils dansaient la valse de leurs ennemis, entrailles à terre
Tirant à vide dans les sillons, la boue grimant leurs visages dans la poussière
Ils pensaient à elles, ils rêvaient d'eux sur ces quais de gare désormais videsQuelques missives ils envoyaient disant que tout ici était magique, nulle inquiétude
Ils leur mentaient, mais c'était le prix à payer pour les garder purs en leurs souvenirs
Les cris d'obus faisait trembler la plume sourde de leurs blessures, de leurs soupirs
Au fond d'eux ils devinaient que leurs familles ils ne serreraient plus, leurs solitudesIl y a cent deux ans, c'était hier."
©Gisèle-Luce de Christian-James
Portfolio 11 novembre 2020
C’était hier
Devoir de mémoire
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