Agrandissement : Illustration 1
Au lendemain de l’assassinat de Charlie Kirk, le ministère de la Justice américain a retiré de son site internet une étude du National Institute of Justice sur la prépondérance de la violence de l’extrême-droite aux États-Unis ces trente dernières années. Ainsi la Maison blanche a-t-elle rapidement saisi la balle qui a frappé le fondateur de Turning Point USA pour braquer les projecteurs et orienter le débat mondial sur “la violence de la gauche”. Mais invisibiliser les chiffres ne fait pas disparaître les corps : le terrorisme intérieur le plus meurtrier aux États-Unis est bien le fait de fanatiques d’extrême-droite, néonazis, masculinistes, incels et autres suprémacistes blancs.
Diagrammes propose de revenir sur l’explosion du nombre de tueries de masse sur le sol étatsunien inspirées par la rhétorique de haine de Donald Trump et de ses soutiens depuis la campagne présidentielle de 2015. Charleston, Charlottesville, El Paso, Buffalo, Allen… “L’effet Trump” est visible à travers tout le territoire et lisible dans les manifestes des auteurs de ces massacres. “I’m extremely proud to call Trump my President!” (Je suis extrêmement fier de pouvoir dire que Trump est mon Président” !), écrira l’un d’eux sur les réseaux sociaux deux ans avant d’abattre “le plus de Mexicains possible” dans un supermarché texan.
Cette timeline accompagne notre entretien en libre accès avec le politiste Joe Lowndes, spécialiste des droites américaines, qui a intégré les rassemblements de Turning Point USA comme élément clé de ses récentes recherches de terrain, mais aussi les conventions du Parti républicain et les multiples groupuscules néofascistes. Ce qui lui a notamment permis de mettre en lumière un phénomène sociologique à la fois frappant et récent : le suprémacisme blanc n’est plus l’apanage des Blancs. C’est de l’avènement de cette extrême-droite multiraciale, de la haine utilisée comme arme politique et plus largement des États-Unis à l’ère post-démocratique dont nous parle Joe Lowndes dans notre entretien, et qu’illustre cette timeline.
Agrandissement : Illustration 2
2015-2023
Il aura fallu 19 ans pour voir le nombre de victimes de crimes de haine aux États-Unis baisser de 36 %. En 2014, il connaît son plus bas niveau depuis les années 1990. Il aura fallu 9 ans pour le voir augmenter de 115 %.
Plusieurs chercheurs, dont Griffin Sims Edwards et Stephen Rushkin, ont documenté l’impact de la rhétorique haineuse de Donald Trump, et sa validation par son élection, sur l’envolée de ce terrorisme intérieur depuis 2015. Voici quelques exemples de ce qu’ils ont appelé “l’effet Trump”.
Agrandissement : Illustration 3
17 juin 2015
Dylann Roof, suprémaciste blanc et néonazi autoproclamé de 21 ans ouvre le feu sur la communauté noire de l’église Mother Emanuel de Charleston, en Caroline du Sud. Il avait assisté, pendant 1 heure, au cours d’étude biblique au sein de l’établissement religieux avant d’abattre 9 de ses participants.
“J'ai failli ne pas le faire parce que tout le monde était tellement gentil avec moi”, dira-t-il à la police, mais l’homme est déterminé à déclencher une guerre raciale. Radicalisé en ligne après avoir passé des heures à lire les diatribes racistes du Council of Conservative Citizens, Roof, natif de Caroline du Sud, regrettait amèrement le bon vieux temps des États confédérés pour qui “l’esclavage et la subordination à la race supérieure sont [la] condition naturelle et normale [du nègre]”.
Le lendemain de la tuerie, tous les drapeaux avaient été mis en berne, seul le drapeau confédéré, avec lequel Roof aimait tant se prendre en photo, continuait de flotter fièrement sur le Capitole de Columbia.
Agrandissement : Illustration 4
11 et 12 août 2017
À Charlottesville, en Virginie, des centaines de suprémacistes blancs, néoconfédérés, néofascistes, néonazis, membres de l’alt-right, du Ku Klux Klan et de milices d’extrême droite se rassemblent pour protester contre la décision de la ville de retirer d’un parc la statue du général confédéré Robert E. Lee.
Le “Unite the Right rally”, qui a pour ambition d’unifier le mouvement nationaliste blanc américain, rencontre sur place la résistance de nombreux militants antifascistes. Le 12 août, le néonazi James Alex Fields Jr. fonce, au volant de sa voiture, sur un groupe de contre-manifestants blessant 35 personnes et tuant Heather Heyer, 32 ans. Loin de condamner le rassemblement et les motivations haineuses de ses initiateurs, Donald Trump instaure une équivalence entre les néofascistes et les antifascistes qui s’affrontent à Charlottesville déclarant qu’”il y a des gens très bien des deux côtés”.
Agrandissement : Illustration 5
3 août 2019
À El Paso, ville texane située à la frontière entre les États-Unis et le Mexique, Patrick Crusius commet l’une des tueries de masse les plus meurtrières commises sur le territoire américain depuis la Seconde guerre mondiale. Déclarant vouloir tuer le plus de Mexicains possible, il ouvre le feu dans un supermarché Walmart assassinant 23 personnes et en blessant tout autant.
Avant de passer à l’acte, Crusius faisait preuve d’une certaine obsession pour le débat sur l’immigration. Louant sur les réseaux sociaux la politique frontalière dure de Donald Trump, tout dans le manifeste qu’il a rédigé pour dénoncer “l’invasion hispanique” fait écho à la rhétorique présidentielle sur l’immigration mexicaine. Trois mois plus tôt, lors d’un rassemblement en Floride, le chef de l’État demandait à ses partisans des idées pour “stopper ces gens”. L’un de ses supporters a crié “Tirez-leur dessus !”. Rire de la foule, sourire du président.
Agrandissement : Illustration 6
14 mai 2022
Payton Gendron, 18 ans, adepte de la théorie du “grand remplacement”, se décrivant comme ethno-nationaliste et suprémaciste blanc, tue 10 personnes, toutes noires, et en blesse 3 autres, dans une épicerie de Buffalo, dans l’État de New York. Il souhaite, par cet acte “terroriser toutes les personnes non-blanches et non-chrétiennes, et les pousser à quitter le pays”.
Dans le manifeste qu’il a publié en ligne avant l’attaque, Gendron dit s’être d’abord identifié comme étant de gauche, avant d’avoir été convaincu par les positions idéologiques populistes, suprémacistes, antisémites et écofascistes du néonazi Andrew Anglin. Ce dernier a été l’un des premiers soutiens de Donald Trump en 2015, appelant ses lecteurs à le suivre, il écrivait : “votons pour la première fois de notre vie pour le seul homme qui représente vraiment nos intérêts”.
Agrandissement : Illustration 7
6 mai 2023
Mauricio Martinez Garcia, néonazi, suprémaciste blanc (non blanc) et incel, tue 8 personnes, dont un petit garçon d’origine asiatique de 3 ans, dans un centre commercial à Allen, au Texas. Lors de l’attaque, il portait un gilet tactique brodé d’un écusson “RWDS” (Right Wing Death Squad / Escadron de la Mort d’Extrême-droite).
Sur son profil du réseau social russe Odnoklassniki, il postait des photos de ses tatouages fascistes, exprimait sa haine envers les Asiatiques, les Arabes, les Juifs et les femmes, et fantasmait sur des guerres raciales et l’effondrement de la société.
Agrandissement : Illustration 8
Chaque entretien Diagram[me]s est chapitré et accompagné d’une chronologie mais aussi d’un dossier documentaire destinés à introduire les discussions, à les étayer et à les relier entre elles : biographie de l’invité, repères historiques, synthèses des événements mentionnés, définitions des concepts clés, portraits des figures citées
Découvrez en libre accès l'entretien complet de Joe Lowndes et l'article de 404 Media mentionné dans le chapô.
Pour suivre et soutenir Diagram[me]s :
Notre newsletter : https://www.diagrammes.fr/fr/page/newsletter
Notre compte Instagram : https://www.instagram.com/diagram.me.s/
Et notre compte Bluesky : https://bsky.app/profile/diagrammes-fr.bsky.social
Portfolio 3 octobre 2025
2015-2023 : chronologie de la vague de tueries de masse racistes aux États-Unis
Le 16 septembre dernier, 404 Media a révélé la suppression d’une étude sur les attentats d’extrême droite aux États-Unis par le ministère de la Justice américain. Notre timeline retrace la vague de tueries de masse motivées par des idéologies racistes et revient sur leurs contextes sociaux et politiques, s’appuyant sur l’analyse de Joe Lowndes, spécialiste des droites américaines.
Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.