Elle se présente comme naïve, elle qui fut conseillère de Lilianne Bettencourt au moment de l'affaire Woerth (aucune question de parlementaires sur son passé : bizarre...), avant de travailler pour Cahuzac, qu'elle ne nommera jamais autrement que par périphrases "l'homme pour lequel je travaillais" ou "le ministre qui m'employait", comme si le nom même la brûlait encore, puisqu'en préambule, avec des trémolos dans la voix, elle exprima la difficulté d'avoir été "abusée" (mais pas manipulée, dit-elle) par celui pour qui elle sacrifiait ses w-e, sa vie de famille, etc. Donc, nous avons devant nous la victime d'un puissant gourou, une pauvre bergère, dont elle a la petite robe, qui a été sous les ordres du grand méchand loup. Sauf qu'on y croit peu. Tout est travaillé chez elle, ses tics de langage "pour vous dire la vérité", "pour être très honnête avec vous", "très sincèrement", "pour dire les choses de façon extraordinairement précise"... on a plutôt envie d'entendre le contraire. Elle n'a rien vu, rien dit, rien entendu. Elle a douté, mais pas douté, c'est pas clair, quand le ministre lui a jeté à la figure le petit mot révélant que l'affaire sortait chez Mediapart. Ce n'est pas elle qui a informé le JDD. Mais Cahuzac prenait lui-même ses appels, à cette époque.
Marion Brugeard n'a donc pas révélé grand'chose sur l'affaire concernant le "ministre pour lequel (elle) travaillait". Mais une remarque incidente donne un argument à ceux qui reprochent à Hollande d'avoir tarder à démissionner Cahuzac. Marion Bougeard note en effet que de décembre à avril il était très perturbé, il n'avait plus vraiment la tête à son boulot, étant sans arrêt avec "ses conseils". Le seul fait (mineur au regard de l'argument massif du conflit d'intérêts, qui conduit un "criminel à enquêter sur ses propres crimes", comme le dit plaisamment Marion Bougeard, qui ose la comparaison) de ne plus pouvoir se consacrer pleinement (et encore moins sereinement) à son travail de ministre, aurait dû conduire à la démission. C'est d'ailleurs un argument classique (donné en son temps par DSK sous Jospin lors de l'affaire de la MNEF) : donner sa démission pour avoir le temps d'assurer sa défense. L'argument très hypocrite donné par le pouvoir (il n'était pas mis en examen, et bénéficiait de la présomption d'innocence) ne tient pas au regard des dyfonctionnements au sein du ministère induits par l'affaire.
L'ambiance, malgré les pressions amicales du bras, est maintenant ouvertement tendue entre Courson et Claeys, le second n'aimant pas que le premier traduise ses questions en indiquant (en clair) l' "hypothèse implicite" qu'elles soutendent. Il est un "grand garçon" comme il l'a dit en se rebiffant dans une autre audition. Courson prépare une réponse sur la lettre de Moscovici à son endroit. On attend avec impatience les arguments de ce "chevalier sans peur".