En ce mois d'août, le législateur et l'exécutif ont fait entrer en application le pass sanitaire dans leur stratégie de lutte contre le covid. Ce dernier est censé impulsé une nouvelle dynamique pour la campagne vaccinale. Le vaccin étant, selon le président, notre "atout maître". Le pass sanitaire soulève de vives contestations en plein cœur de l'été. Est-il possible de douter que le vaccin, et avec lui le pass sanitaire, soient une porte de sortie à la crise ?
À quoi sert le pass sanitaire ?
Le pass sanitaire qui rentre en application est le passe sanitaire européen [1]. Celui-ci est destiné aux personnes qui "semblent présenter un risque réduit d'infecter d'autres personnes avec le SRAS-CoV-2" [2]. Avec ce risque moindre, l'intérêt du pass est de lever les restrictions pour son détenteur. Par exemple en France, par défaut et sans décision inverse du préfet, les lieux soumis au pass seront exemptés du port du masque [3] et seront vus comme des "sanctuaires" libre du covid [4].
D'après le conseil d'État, le pass sanitaire ne peut servir à "un objectif qui consisterait à inciter les personnes concernées à se faire vacciner" [5].
Avec ce projet de loi, le conseil constitutionnelle confirme que "ces dispositions n'instaurent, en tout état de cause, ni obligation de soin ni obligation de vaccination" [6], un test PCR permettant son accès.
En théorie, le pass sanitaire permet de s'assurer du faible risque de transmission de son détenteur, et ne saurait être un moyen de déguiser une obligation vaccinale.
Efficacité du vaccin
Quand on parle d'efficacité du vaccin, il y a au moins 2 aspects à prendre en compte. Leur protection contre les formes graves et leur protection contre la propagation du virus.
Les formes graves
Indéniablement, l’efficacité des vaccins est démontrée et limite les formes graves de la maladie. Nous le voyons empiriquement, le nombre de contaminations est dissocié du nombre de décès & d'hospitalisation lors de cette 4ème vague [7].
L'efficacité d'un vaccin varie selon la marque et le variant auquel il est appliqué, la Haute Autorité de santé parle d'une efficacité de 90% contre les formes graves contre le variant Delta pour les vaccins ARNm [8].
Bien que les risques soient drastiquement réduits, ils ne sont pas nuls, ce qui explique que des patients soient hospitalisée ou décèdent même avec un schéma vaccinal complet. Cela ne remet pas pour autant en cause leur efficacité.
Les contaminations & les transmissions
Les protections diffèrent quand on s'intéresse à la prolifération du virus. Comme l'on peut contracter des formes graves, même en étant vacciné l'on peut être contaminé et transmettre le SRAS-CoV-2. L'on possède ce que l'on appelle des "leaky vaccine", des vaccins qui "fuient" et qui permettent toujours au virus de circuler chez un hôte vacciné.
Deux dimensions à bien distinguer : la probabilité d'être contaminé & la probabilité de transmettre le virus une fois contaminé.
Encore une fois, l'efficacité varie en fonction du vaccin utilisé et des variants. Ces chiffres sont à prendre avec des pincettes et sont difficile à connaître réellement, rien que pour le fait que l'on ne teste pas souvent les personnes asymptomatiques.
En ce qui concernait le variant alpha (chinois) & beta (anglais), les données montraient une importante réduction de probabilité d'être contaminé de l'ordre de 90% [9], ainsi qu'une réduction de la charge virale d'un vacciné et donc une capacité réduite à transmettre le virus [10].
La vaccination permettait, avec ces variants historiques, de possiblement briser massivement les chaînes de contaminations.
Avec le variant Delta, "la guerre a changé" [11].
Contamination et transmission du variant Delta
En ce qui concerne les probabilités d'être contaminé par le variant delta une fois vacciné, cela reste une certaine inconnue. Je ne trouve pas de valeur qui fasse un minimum foi pour le moment. Cela est d'autant plus compliqué de connaître ce taux car une grande partie des personnes vaccinés et contaminée par ce variant sont asymptomatique, et donc très peu testée.
À l'inverse, nous commençons à avoir davantage de donné sur la possibilité de transmission une fois contaminé. L'hypothèse qui commence à émerger tend à dire que les vaccinés et les non-vaccinés auraient des charges virales similaires au moins sur la première semaine [12], ce qui pourrait les rendre aussi contaminants que les non-vaccinés. Point de vue partagé par le Dr. Fauci, directeur de l'Institut national américain des Allergies et des Maladies Infectieuses [13].
L'inquiétude monte sur le potentiel de contamination des personnes entièrement vaccinée.
Les instructions commencent à évoluer au niveau international. En mai, les Américains vaccinés pouvaient faire tomber le masque [14], mais ce 27 juillet [15] les recommandations du CDC pour les personnes vaccinées ont été mises à jour et incite à un retour du masque en intérieur [16]. En Israël également, laboratoire de la vaccination, le masque et la distanciation sociale reviennent, ainsi qu'une quarantaine pour les voyageurs en provenance de certains pays quel que soit le statut vaccinal [17].
Heureusement, la France fait figure d'exception ! Au même titre que le nuage radioactif de Tchernobyl s'est arrêté à la frontière du pays, les personnes vaccinées "n'ont plus de chance d'attraper la maladie" [Jean Castex] et "ne risqu[ent] pas de contaminer les autres" [Jean-Michel Blanquer].
Les vaccins seraient donc efficaces pour lutter contre les formes graves de la maladie, et non pour protéger contre la propagation du virus.
Si les probabilités d'être contaminé et de contaminer les autres s'avèrent importantes même chez les vaccinés, c'est toute la logique du pass sanitaire qui s'effondre.
L'immunité collective
Un des potentiels objectif avec la vaccination serait d'atteindre une immunité collective.
C'est ce que l'on retrouve dans cette idée avancée par le ministre de la Santé, qu'une fois que "tout le monde est vacciné, il n'y a plus de virus" [18].
Ce discours semble bien plus politique que scientifique : "l'immunité collective n'est plus une discussion que le monde devrait avoir." [19]
Cela s'explique pour diverses raisons, la première étant que les vaccins permettraient une circulation du virus encore trop importante.
Dans un second temps, les anticorps face au coronavirus ont une durée limitée [20], d'où les cas de réinfection au covid. Une fois vacciné, nous sommes protégés pour de courtes périodes, c'est pour cette raison que l'on parle déjà d'une 3ème dose de rappel. Israël parle d'une diminution de l’efficacité des vaccins (Pfizer) après 6 mois [21].
Variants résistants aux vaccins
Bientôt, nous risquons de découvrir le phénomène de sélection naturelle. Les probabilités de mutation et de résistance d'un variant aux vaccins sont hautes selon des scientifiques. D'après une étude publiée en mars, sur 77 épidémiologistes et virologues, au moins 2/3 pronostiquent que cela arrivera [22].
Quelques hypothèses émergent sur la résistance au vaccin du variant Lambda [23]. Si cela ne se confirme pas, c'est probablement l'une des prochaines lettres de l'alphabet grec. De plus, le SRAS-CoV-2 peut muter in vivo chez les vaccinés, et directement chercher à outrepasser les résistances.
Dans l'hexagone, tout est sous contrôle. "Nous regardons tous les variants qui circulent avec beaucoup de vigilance, mais pour l'instant c'est Delta qui nous préoccupe", selon Gabriel Attal [24].
Quel impact sur la campagne vaccinale si cette nouvelle venait à tomber ? Ce n'est peut-être qu'une question de temps.
Conclusion
Le pass sanitaire sert à s'assurer que le porteur ne peut transmettre le virus, le variant Delta semble circuler facilement chez les vaccinés. Le gouvernement pratique une fuite en avant, cette question est soulevée depuis le débat parlementaire sur l'extension du pass. Le gouvernement ne répond pas à cette interrogation, voir pire, il ment éhontément.
Avec une stratégie qui consiste à retirer les gestes barrières dans les lieux soumis au pass, les personnes vaccinées, se croyant protéger, risquent de faire circuler massivement le virus. Des personnes fragiles et de bonne foi, qui se croient entièrement protéger, devraient se retrouver prochainement en détresse respiratoire.
Comme dans les autres pays, avec la politique sanitaire actuelle, les gestes barrières risquent de revenir pour tous. Des citoyens qui espéraient revenir à une vie normale pourraient être déçu. Si des mutations résistantes arrivent, la campagne vaccinale repartira du début. Les hôpitaux pourraient se retrouver saturer, encore une fois.
Le vaccin, à lui seul, risque de ne pas être la solution. En se limitant à l'aspect sanitaire, sans prendre en considération les problèmes éthiques, sa difficile mise en pratique, la violente division qu'il entraîne, le pass sanitaire (européen) semble voué à l'échec.