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Billet de blog 7 mai 2022

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FRANCE : LE NOUVEAU FRONT POPULAIRE AUX PORTES DU POUVOIR ?

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Dans le monde actuel on retrouve les phénomènes économiques de rareté d’avant et nous sommes face à l’effondrement de plusieurs pouvoirs politiques portés par la technocratie, par le management public et par la puissance de médias financés par les marchés boursiers et par les oligarques des nouvelles technologies. Ces incubateurs de ruptures ont contaminé la politique en général et les politiques publiques en particulier en encourageant des démarches répressives de contraction des finances sociales à défaut de défendre l’extension des mécanismes de redistribution de l’égalité et des services publics au service des millions de  citoyens marginalisés  et de milliers de quartiers, banlieues  et territoires frappés par les  fractures de la modernité.  

Partout, des gens ordinaires se voient priver  de leur pouvoir d’achat, rangé par l’inflation désormais durable et structurelle : ils sont face au dilemme d’accroître les revenus ou de réduire les dépenses, les ménages modestes  sont aussi victimes de transferts de revenus massifs par les pouvoirs publics vers les riches et les actionnaires sous forme de dividendes et de niches fiscales. Sans être contre-nature, la question de l’indexation des salaires sur les prix et sur les profits refera surface dans les combats pour le droit à l’équité économique. Cette accumulation de déni de justice sociale trouve également son origine dans la ruée du néolibéralisme occidental vers  les délocalisations et les désindustrialisations qui ont créé des situations de faillites brutales, des dettes vertigineuses et du chômage de masse. La préférence aux actionnaires contre les travailleurs dans les pays riches a profité aux pays pauvres nouvellement industrialisés, pays à bas coût, champions de dumping fiscal et monétaire, pays qui ont en trente ans de mondialisation sauvage prospéré pour ensuite challenger l’occident sur son leadership économique et politique, l’avenir proche annonce une résurrection des anciens empires pour redessiner le partage du monde. 

Quant aux problèmes et crises sociales de ces dernières décennies, elles ne sont pas que géopolitiques, nés surtout de guerres commerciales entre nations pour accoucher de guerres de classes puis d’insurrections à venir contre l’économie des automates, des plates-formes et du digital. On retrouve aussi cette logique dans nos démocraties ébranlées par la défiance populaire vis-à-vis d’un ordre économique mondial en proie à  l’effondrement  et qui est désormais exposé  à l’émergence à de nouvelles  formes d'oppositions sociale nationale d’extrême droite et sociale populaire portée par l’extrême gauche.

 Il est indéniable que la responsabilité du centrisme mondial, dit aussi establishment dans cette déconstruction est centrale et ce n’est pas seulement un jeu de mot. Le  nouveau centrisme politique français a définitivement métabolisé et installé l’atonie idéologique en détruisant les partis classiques , socialiste et gaulliste, afin d'installer la rupture entre deux France, celle des initiés à la nouvelle économie des algorithmes et celle de l’ancienne économie de l’industrie traditionnelle et des métiers manuels, entre la France des inégaux et la France des plus égaux. 

Aujourd’hui, le face à face entre le peuple et le pouvoir est réel, les citoyens  veulent un État solidaire et protecteur des couches sociales défavorisées qui souffrent du déclassement et des discriminations, citoyens pourtant actionnaires et contributeurs dans la formation du capital public. Retrouver la tradition républicaine, s’insurger c l’uberisation du travail qui n’est pas l’emploi, la privatisation de l’enseignement supérieur qui n’est pas le pacte social de l’égalité des chances, la privatisation des maisons de retraites qui n’est pas l’imbrication solidaire entre générations, l’accès instantanée et de proximité aux services publics qui n’est pas le tout numérique et les déserts administratifs, la justice fiscale qui n’est pas la tax flat  et la crypto-économie de la spéculation et des dividendes. 

Il ne faut pas s’étonner que la France se trouve actuellement à l’avant-garde des débats sur l’exclusion sociale, car Emmanuel Macron, président a été celui qui est allé le plus dans les dérégulations démocratique, sociale et économique via le deux poids deux mesures fiscales. Si les pauvres se révoltent c’est parce qu’ils ne pourront jamais financer ni l’éducation ni la santé, ils ne pourront jamais devenir socialement légitimes sans la béquille de l’État providence , il faut faire financer la redistribution par les extrêmement riches dont le pouvoir de consommation est excessif face aux pouvoir d’achat dépressif des classes populaires.

 Selon Thomas Piketty, 8 millions de français se trouvent en situation d’indigents dont 33% en moins de 30 ans, 40% des français n’arrivent plus à financer leurs frais de santé, et 1/3 peinent à payer leur loyer. Il est vrai aussi que plus de 65%  des français gagnent moins de 2000 euros, salaire pivot pour s’estimer hors du danger de la paupérisation et du déclassement. 

Alors qu’Emmanuel Macron avait promis une Révolution en 2017, le peuple de 2022 en désillusion aspire à des contre-pouvoirs et une cohabitation d’équilibre, la majorité à l’assemblée pourrait-être composée d’une majorité de blocage venant de la convergence des deux oppositions, l’une pilotée par l’extrême droite et l’autre défendue par la  Nouvelle Union Populaire, Écologique et Sociale (NUPES). 
La reconquête populaire attendue devra militer pour  réduire les inégalités patrimoniales entre riches et pauvres, tout faire pour accélérer le transfert du capital des entreprises vers les salariés, seulement 3% du capital  des entités du CAC 40  se trouve aujourd’hui entre les mains des salariés, 97% entre les mains d’actionnaires anonymes, il faudra passer à la fin de ce quinquennat à 12%. 

Abandonner définitivement le projet de réforme controversée de retraite à 65 ans, pour équilibrer financièrement le système de retraite, il faudra chercher des ressources fiscales auprès des spéculateurs, des entreprises opérant dans les nouvelles technologies dans lesquelles le rendement est 4 à 5 fois plus élevé que dans les entreprises industrielles, remettre l’impôt sur la fortune et revoir l’impôt sur les successions en le corrélant au critère de parenté et à l’âge des bénéficiaires. Les réformes économiques et sociales doivent en particulier s’attaquer aux causes de l’accroissement des écarts revenus  du travail et revenus du capital et aux grandes barrières d’accès à la propriété immobilières. Les Français veulent vivre dignement, pouvoir se loger et faire confiance à un gouvernement qui transforme la société pour tous et qui doit s’attaquent aux sources connus désormais de tous  de l’économie néolibérale de discrimination.  

Si La retraite à 62 ans permet un certain consensus, à 65 ans et avec des pensions de retraites en moyenne de 1320 euros, les futurs retraités en plus d’être abîmés à 65 ans risqueront de cumuler misère sociale et obsolescence  de vie programmée.  Aujourd’hui un jeune débutant et âgé de 23 ans  issu de Sciences Po, d’une école d’ingénieurs ou d’une école de commerce gagne le même salaire que ses parents qui ont trente à trente-cinq ans d’ancienneté, anecdotique, ce n’est évidemment pas le cas de 90% des jeunes  ruraux et de jeunes de banlieues  «étrangers de l'intérieur assignés à résidence». 

Puis et enfin, Jean Luc Mélenchon, chef de file de la Nouvelle Union Populaire, Écologique et Sociale et celui qui a réussi à changer le logiciel de la gauche et la réinventer, celui qui défend l’idée d’une politique migratoire humaniste et réaliste,  "l’émigration forcée est toujours une double souffrance : " ne pas être chez soi où l'on vit, et ne plus être chez soi d'où l'on vient", sujet qui ne doit plus être ni politique ni tabou. La France devra repense les politiques de coopération avec le continent africain et avec le sud de la Méditerrané, faire de l’avantage comparatif, faire du transfert de technologie et des savoir-faire, édifier un pont de prospérité qui relie l’Europe et l’Afrique, aider ce continent à relever les défis  de sa plurielle souveraineté, défis démographiques, hydriques et climatiques, ils sont liés et dangereux pour l’avenir de toute la planète. 

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