C'était en juin, je crois, il faisait beau et chaud, nous entrons en classe dans le silence le plus total qui soit, à son signal on s'installe, le cours commence, il parle, on écoute, il va et vient dans l'allée entre les rangs, il s'arrête, me regarde, marque une pause: "Abdelkader, descendez vos manches de chemise et fermez les avec les boutons, ... si vous avez trop chaud, demandez à votre papa qu'il vous achète une chemise à manches courtes !" ... Je m'exécute... le cours reprend ... La séance suivante, en début de cours: "Abdelkader, au tableau! vous allez nous réciter la poésie", j'y vais, je la connaissais par coeur, " Le dormeur du val d'Arthur Rimbaud ....
Arthur RIMBAUD
1854 - 1891
Le dormeur du val
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Monsieur Dambron, merci, mille fois merci !