Cette modeste réflexion se veut une analyse de la problématique de changement en Tunisie à l'aune de l'approche cartésienne qui sied aux systèmes d'information, après l'effondrement soudain de l'ancien régime, la désarticulation de ses composantes politiques, sociales et économiques, la rupture de ses flux avec son lot de débordements et de flottements suivi par l'éclosion de prémices de signes d'espoir d'un monde meilleur jugé selon un spectre allant selon les acteurs du profond scepticisme à l'euphorie inconsidérée.Impliqué de par mon métier dans la mise en œuvre des systèmes d'information, j'ai observé un parallélisme entre les difficultés et les enjeux engendrés par un changement brutal de système dans une institution et celui de tout un pays par la déstabilisation des équilibres précaires et d'un existant « serein et rassurant » toute proportion gardée.Au niveau des institutions, certains systèmes de gestion informatisée peuvent suite à des dérives, de dysfonctionnements et d'inadéquation aboutir à un effondrement de performances et à un quasi blocage se traduisant par la désaffection des parties prenantes de son objectif initial présumé.Comme chaque organisation évolue naturellement vers la bureaucratie guidée qu'elle est par la recherche de la stabilité, à l'instar d'une rivière rencontrant des obstacles qui creuse de nouveaux talwegs, émergent des processus de substitution constituant un système parallèle qui surmonte cycliquement les crises par des actions correctives évolutives.Quand la décision de changement s'impose comme la seule alternative, les choix des fondamentaux du nouveau système peuvent avoir des conséquences désastreuses si les bénéficiaires et principaux utilisateurs ne sont pas associés dans l'élaboration des termes de références et cahiers des charges qui répertorient les attentes formalisant les besoins ainsi que les méthodes de mise en œuvre et les contraintes budgétaires, humaines et logistiques en tant que pré requis. A cette étape, l'arbitrage et la pondération du poids des choix et alternatives en fonction des attentes stratégiques des forces en présence et de la perception qu'a chaque acteur des objectifs , nécessitent des cycles itératifs pour aboutir à une solution cible qui a l'adhésion de la majorité par la transformation progressive des antagonismes en synergie.Bien souvent, quel que soit l'inadéquation et les insuffisances de l'ancien système, il est difficile de faire table rase du passé, pour passer directement au nouveau système, le recours à un fonctionnement en parallèle étant souvent la règle, tant les habitudes sont tenaces et le facteur humain prépondérant (caractérisé par l'anxiété que toute rupture et la perte de points de repère provoquent) dans le fonctionnement d'un système quel que soit son apport.Les échecs cuisants de mise en place de systèmes d'information pourtant bâtis autour de solutions professionnelles, éprouvées et coûteuses des grands leaders mondiaux (ORACLE JD EDWARDS ? SAP, etc..) sont légion soit pour inadéquation dès le début lors de la définition des besoins soit pour avoir sous estimé ou négligé les mesures d'accompagnement..En Tunisie, pour la télé compensation bancaire et les télé déclarations sociales et fiscales, il y eu des démarches allant de l'information jusqu' à la coercition en passant par la négociation avant que ces systèmes ne deviennent opérationnels.On peut citer des dizaines d'exemples dans le monde, en Afrique et en Tunisie d'institutions ayant acquis des logiciels lourds de plusieurs milliards qui ont échoué ou été abandonnés en cours de route faute de précautions dans la conduite du changement tant le facteur humain est important ! 1A titre anecdotique, on peut affirmer qu'une licence (produit matérialisé par un droit d'utilisation) Windows d'un coût de 150 dinars nécessite pour un novice réfractaire à l'autoformation au moins un budget de 500 dinars de prestations de formation pour en maitriser l'essentiel des fonctionnalités !Car au-delà de la qualité de l'outil, il y a l'environnement et le contexte d'utilisation qui conditionnent la réussite de l'implémentation d'un nouveau système et à l'instar des entreprises, un pays doit intégrer les problématiques de la gouvernance, du pilotage, de la gestion des projets, pour les aspects sécuritaires, du risk management, de l'optimisation des ressources et in fine, la quête de performances évaluées par les économistes par les taux de croissance et autres indicateurs de développement humain.Pour ce qui est des ressources humaines, les intervenants (décisionnaires, cadres, maitrise ou agents) n'ont pas obligatoirement les mêmes attentes et on peut affirmer sans ambages que la première réaction est la résistance au changement.Chacun va s'interroger à son niveau personnel quelles sont les prérogatives et les acquis qui vont échapper à son cercle de décision suite à la modification des processus dans le nouveau système et dans le cas où les menaces sont graves, il va tout faire pour en saboter la mise en œuvre ou tout au moins faire du zèle en retardant autant que se peut son démarrage.Bien souvent , les réfractaires -de bonne ou de mauvaise foi- vont tout faire pour démontrer que l'ancien système -que tout le monde décriait- est meilleur que le nouveau en mettant en exergue les risques de blocage et les dérapages que peut occasionner le saut vers l'inconnu que représente l'adoption du nouveau.La solution ne se fait pas sans intégrer les tâches d'accompagnement, la démarche et la temporalité par la maitrise du calendrier ,par l'organisation de séminaires d'information, des échanges, et communications et des formations assorties de revalorisations individuelles et collectives, en vue de l'appropriation du nouveau système par les concernés même si en filigrane la solution est imposée d'en haut !En ce sens, les différents débats, séminaires et colloques qui peuvent paraître pour certains un foisonnement désordonné me paraissent utiles.L'expérience montre qu' en s'appuyant par une approche volontariste -à titre d'action pilote-sur un leadership collectif, motivé et convaincu, qui peut incarner une modernité valorisante , à un moment donné , un déclic se produit où la majorité bascule en faveur de ceux qui ont adhéré au nouveau système par rapport aux réfractaires qui vont sentir que s'ils ne prennent pas le train en marche, ils vont rester à jamais en rade sur le quai.A côté des aspects tangibles, la mobilisation des moyens concrets et l'importance de l'information, des référentiels, des indicateurs pertinents et de bases de données statistiques fiables pour le pilotage, l'adhésion et l'assimilation de nouveaux concepts par les composantes de la population Tunisienne compte tenu de son vécu, son soubassement culturel et ses mœurs et conditions sociales représentent les pré requis de la réussite du changement.A la veille de la mobilisation de fonds de plusieurs dizaines de milliards pour le financement du programme économique, on devrait se préoccuper en plus des actions de refonte politique, du problème purement technique de gestion des projets qui y seront associés.Ce ne sont pas les directeurs de projets au sein des ministères qui n'ont ni la culture de l'engagement sur résultat, ni l'indépendance de décision et encore moins les contrôleurs de dépenses qui n'ont que l'approche administrative qui vont maitriser ces immenses chantiers mais des agences d'exécution compétentes et autonomes et des ingénieurs qui n'ont pas toujours l'expérience du pilotage des grands projets.La mise à niveau en la matière ne concerne pas uniquement les services centraux mais les administrations territoriales nouvelles à créer, une fois la déconcentration et la décentralisation rendues effectives, censées remédier au déséquilibre régional.Lejri Abderrazak Informaticien, chef d'entreprise 23-05-20111 Statistiques d'échecs des projets de mise en œuvre des systèmes d'information :- 31.1% des projets sont arrêtés après leur démarrage - 52.7 % sont finalisés avec un dépassement important de leur coût initial - 16.2 % sont terminés en temps et selon le budget - les projets terminés ont proposé seulement 42% des fonctionnalités prévues2 Winston Churchill a dit :Pour s'améliorer, il faut changer.
Donc, pour être parfait, il faut avoir changé souvent. » 3 « Le changement surprend, inquiète, impressionne, dérange. Il suscite la curiosité, déclenche les passions, fait naître l'espoir, enthousiasme ou déçoit ».
Billet de blog 23 mai 2011
La théorie des systèmes et la problématique de conduite du changement
Cette modeste réflexion se veut une analyse de la problématique de changement en Tunisie à l'aune de l'approche cartésienne qui sied aux systèmes d'information, après l'effondrement soudain de l'ancien régime, la désarticulation de ses composantes politiques, sociales et économiques, la rupture de ses flux avec son lot de débordements et de flottements suivi par l'éclosion de prémices de signes d'espoir d'un monde meilleur jugé selon un spectre allant selon les acteurs du profond scepticisme à l'euphorie inconsidérée.
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