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Billet de blog 11 novembre 2016

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Aux tirailleurs sénégalais morts pour la France !

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Illustration 1

MONUMENT DE FREJUS 1994

« Passant, ils sont tombés, fraternellement unis, pour que tu restes français » 

Léopold Sédar SENGHOR

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Maman Africa nous a donné notre humanité

Quelle déchéance morale que de piller l’universel de son patrimoine !

Suicidaire programmation des déportations des faciès inappropriés !

Explosion des contrôles génocidaires des identités publiquement déclarées impures !

Messieurs Guillotin et Bertillon !

Est-ce là le génie de l’histoire de vos desseins ?

Qu’avez-vous appris du passé de l’index ?

Les victimes d’hier sont aujourd’hui les bourreaux de nos lendemains !

Le soleil au zénith,

Que vaut le blanc sans l’ombrage de sa genèse ?

Abdoulaye M’BAYE

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Aux Tirailleurs Sénégalais morts pour la France 

Voici le Soleil
Qui fait tendre la poitrine des vierges
Qui fait sourire sur les bancs verts les vieillards
Qui réveillerait les morts sous une terre maternelle.
J'entends le bruit des canons - est-ce d'Irun ?

On fleurit les tombes, on réchauffe le Soldat Inconnu.
Vous, mes frères obscurs, personne ne vous nomme.
On vous promet 500 000 de vos enfants à la gloire des futurs morts, on les remercie d'avance, futurs morts obscurs
Die schwarze Schande !

Ecoutez-moi, Tirailleurs Sénégalais, dans la solitude de la terre noire et de la mort
Dans votre solitude sans yeux, sans oreilles, plus que dans ma peau sombre au fond de la Province
Sans même la chaleur de vos camarades couchés tout contre vous, comme jadis dans la tranchée, jadis dans les palabres du village
Ecoutez-moi, tirailleurs à la peau noire, bien que sans oreilles et sans yeux dans votre triple enceinte de nuit.

Nous n'avons pas loué de pleureuses, pas même les larmes de vos femmes anciennes
Elles ne se rappellent que vos grands coups de colère, préférant l'ardeur des vivants.
Les plaintes des pleureuses trop claires
Trop vite asséchées les joues de vos femmes comme en saison sèche les torrents du Fouta (3)
Les larmes les plus chaudes trop claires et trop vite bues au coin des lèvres oublieuses.

Nous vous apportons, écoutez-nous, nous qui épelions vos noms dans les mois que vous mourriez
Nous, dans ces jours de peur sans mémoire, vous apportons l'amitié de vos camarades d'âge.
Ah ! puissé-je un jour d'une voix couleur de braise, puissé-je chanter
L'amitié des camarades fervente comme des entrailles et délicate, forte comme des tendons.
Ecoutez-nous, morts étendus dans l'eau au profond des plaines du Nord et de l'Est.
Recevez le salut de vos camarades noirs, Tirailleurs Sénégalais

Léopold Sédar Senghor [1906-2001]

Les soupirs du servant de Dakar
    C'est dans la cagnat en rondins voilés d'osier
    Auprès des canons gris tournés vers le nord
    Que je songe au village africain
    Où l'on dansait où l'on chantait où l'on faisait l'amour
    Et de longs discours
    Nobles et joyeux.

    Je revois mon père qui se battit
    Contre les Achantis
    Au service des Anglais
    Je revois ma sœur au rire en folie
    Aux seins durs comme des obus
    Et je revois
    Ma mère la sorcière qui seule du village
    Méprisait le sel
    Piler le millet dans un mortier
    Je me souviens du si délicat si inquiétant
    Fétiche dans l'arbre
    Et du double fétiche de la fécondité
    Plus tard une tête coupée
    Au bord d'un marécage
    Ô pâleur de mon ennemi
    C'était une tête d'argent
    Et dans le marais
    C'était la lune qui luisait
    C'était donc une tête d'argent
    Là-haut c'était la lune qui dansait
    C'était donc une tête d'argent
    Et moi dans l'antre j'étais invisible
    C'était donc une tête de nègre dans la nuit profonde
    Similitudes Pâleurs
    Et ma sœur
    Suivit plus tard un tirailleur
    Mort à Arras.

    Si je voulais savoir mon âge
    Il faudrait le demander à l'évêque
    Si doux si doux avec ma mère
    De beurre de beurre avec ma sœur
    C'était dans une petite cabane
    Moins sauvage que notre cagnat de canonniers-servants
    J'ai connu l'affût au bord des marécages
    Où la girafe boit les jambes écartées
    J'ai connu l'horreur de l'ennemi qui dévaste
    Le Village
    Viole les femmes
    Emmène les filles
    Et les garçons dont la croupe dure sursaute
    J'ai porté l'administrateur des semaines
    De village en village
    En chantonnant
    Et je fus domestique à Paris
    Je ne sais pas mon âge
    Mais au recrutement
    On m'a donné vingt ans
    Je suis soldat français on m'a blanchi du coup
    Secteur 59 je ne peux pas dire où
    Pourquoi donc être blanc est-ce mieux qu'être noir
    Pourquoi ne pas danser et discourir
    Manger et puis dormir
    Et nous tirons sur les ravitaillements boches
    Ou sur les fils de fer devant les bobosses
    Sous la tempête métallique
    Je me souviens d'un lac affreux
    Et de couples enchaînés par un atroce amour
    Une nuit folle
    Une nuit de sorcellerie
    Comme cette nuit-ci
    Où tant d'affreux regards
    Éclatent dans le ciel splendide

Guillaume Apollinaire 1880 - 1918

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