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Billet de blog 15 juillet 2008

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Mai 1968: le joli mois de la contrainte

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Merci, cher Antoine Perraud, de votre enquête sur les participants au mouvement du 22 mars 1968. Je sais maintenant qui sont les gens qui ont contribué à entraver ma liberté tout au long de ce mois de la contrainte.

Certes, le début était sympathique, voire prometteur. Quand on est étudiant, on ne peut être spontanément du côté des flics et toute manif s'apparente à un monôme qu'on suit avec joie. Comme beaucoup d'autres, je me suis laissé prendre au piège et j'ai couru sur le boulmich. Et puis très vite, les premiers craquements sont apparus; des affiches dont le ton tranchait avec la jubilation initiale. La réalité est apparue avec les premières AG. Finie la démocratie, brocardée, ravalée au rang de démocratie bourgeoise formelle selon la logorrhée habituelle et cela par des trotskistes et des maoistes c'est à dire les adorateurs zélés de deux des pires serial killers du 20ème s. Il n'était plus question d'exprimer une opinion différente , quant à demander un vote qui aurait pu gêner nos nouveaux commissaires politiques, c'était s'exposer à des rebuffades rapidement brutales. Enfin, vint l'occupation totale des deux établissements d'enseignement supérieur dans lesquels je poursuivais mes études: occupation brutale et sans réplique. J'imaginais ce qu'avaient pu ressentir les citoyens de Prague lorsqu'en 1947, les milices communistes avaient montré leur vrai visage.

Nous avons commencé à nous compter, à nous concerter, à nous rassembler dans une atmosphère excitante de résistance à l'oppression , à l'occupation. Puis, nous passâmes à l'action: tracts, affiches, interventions groupées dans les AG, heurts physiques avec les gardes rouges, etc...Histoire de montrer que les moutons n'étaient pas tous d'accord.

Je me rappelle l'intervention décisive de de Gaulle, nous étions regroupés dans un coin du grand amphithéâtre plein à craquer. Nous nous sommes mis à applaudir, quelle surprise chez les maîtres des lieux...

La manif du 30 mai fut vibrante, on sentait une telle volonté d'en sortir, une telle joie de pouvoir enfin s'exprimer librement. Organisée à la hâte, elle rassembla cependant trois fois plus de monde que la plus importante des manifs de ce mois ; combien dérisoire apparaissait la farce de Charletty! Les élections législatives qui suivirent , donnérent une majorité écrasante à ceux qui voulaient remettre la France à l'endroit. Le peuple avait repris la parole!

Depuis lors, je conserve une méfiance viscérale à l'encontre de ceux qui prétendent monopoliser la parole du peuple; il n'y a que dans les démocraties populaires qu'on arrive à supprimer le peuple.

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