Assemblons les pièces du puzzle, puisque nous ne pouvons aller aider ces courageux manifestants pacifistes sur la Place Tarhir et que l’on se ronge le sang pour nos collègues partis là-bas chercher l’info, un peu comme on part à la chasse au dahut…
D’un côté nous avons MAM, qui ne se souvient plus des dates, qui n’avait pas envie de faire deux heures en voiture pendant ses vacances et qui flouitise à gogo un épisode « un peu gênant » de son escapade/maillot de bain tunisien. Donc, à cause de toutes les bêtises de Madame, trois journalistes enquêtent pour savoir 1) Quid de l’avion ?, 2) Quid de son charmant propriétaire ? 3) Quid du programme réel de chacun/chacune?
Pendant ce temps là, deux journalistes, dans un froid glacé,se demandent si ce soir ils seront en vie. Ils se répètent probablement qu’avec le nombre gens au courant du fait qu’ils sont otages en Afghanistan, on ne peut plus les zigouiller sommairement. J’espère qu’ils savent ça, au moins, parce que pour le reste, ni eux, ni nous, ne savons rien de leur sécurité présente et avenir.
Pendant ce temps là mon vieil ami Stéphane, photo-journaliste pour Grotius.fr. Médias et humanitaire
http://www.grotius.fr/sur-la-place-tahrir-au-caire/ essaye de se rendre sur la Place Tarhir sans se faire ni écraser, ni lyncher,ni arrêter….Stéphane qui était un peu exaspéré la dernière fois que nous nous sommes parlés parce qu’il ne trouvait pas beaucoup d’acheteurs pour un reportage aussi osé qu’accablant sur le viol systématique des femmes utilisé comme arme de guerre en Afrique. « Pas assez vendeur ».
Pendant ce temps je reçoit un message de Kawtar : « Adeline, STP est-ce que tu peux m'expliquer ce qui ce passe en France. Ce n'est plus la France qu'on connait. Même la presse est devenue une presse de oui-dire et de "info du souk" comme on dit chez nous », mon amie tunisienne qui vient de visionner sur mon mur de Facebook, le montage des réactions officielles française face à ce qui se passe en Tunisie http://www.facebook.com/video/video.php?v=1760101971062&oid=171852280196&comments&ref=mf….
"Infos du souk" :-), excusez du peu…j’ai fait de mon mieux.
Pendant ce temps un énervé squatte le site de soutien aux deux journalistes de France 3 retenus en Afghanistan :
http://www.facebook.com/group.php?gid=252579303018
pour diffuser un message dont le génie financier n’a d’égal que la générosité :
« Sur quoi seront payées leurs rançons ? Sur nos impôts ? Ou surnotre redevance TV ? Les syndicats de la TV publique française n'accepteront jamais que les rançons soient payées sans une augmentation de la redevance TV.Donc, j'ai bien raison de ne plus jamais regarder la TV française. »
On vous remercie de faire avancer le débat, Jean Claude.
Je repense à mon dernier papier sur « Des gens comme les autres », le livre de Joris Luyendijk qui dit qu’il n’y a pas de réel travail de correspondant possible dans le Monde Arabe. Que ce type de poste est a repenser entièrement, car il reste nécessaire, mais pas adaptée à certaines situations. C’est vrai qu’en tous cas, ils n’ont pas vu venir la révolution…pas plus que la DGSE d'ailleurs.
Mais ça ne m’empêche pas de m’interroger.
Et d’avoir honte.
D'avoir honte face aux peuples de Tunisie et d’Egypte qui ont tellement de courage, et de se dire que nous sommes « le Pays des droits de l’homme » et si peu au rendez-vous.
Et ceux qui essaient d’y être, y vont à leur propre risque,Stéphane et Hervé, dans leur vallée afghane en savent quelque chose …Stéphane !!!
Je te répète de faire attention à toi !
Ca a du bon quand le peuple prend la parole, c’est surtout ça que je retiens. Quand il s’exprime dans la rue où sur internet. Ça remet les idéaux en place. Ça permet de dire aux ministres qui ont de bons copains qu’on ne peut pas éternellement prendre les gens pour des cons, ça permet de balancer des dictateurs aux ordures.
Ça a du bon d’avoir des journalistes pour faire passer cette parole. D’avoir des gars qui risquent leur peau pour une photo, un témoignage, un regard…C’est plus que précieux d’autant que la loi du marché est sans pitié et qu’il faut donc souvent s’y reprendre à plusieurs fois pour avoir une info dans toute sa complexité, son contexte, dans ce qui nous dérange aussi.…Donner une nouvelle lumière à ce métier aussi prestigieux qu’ingrat.
Ça a du bon les révolutions, en effets collatéraux aussi. D’un coup ça remet les pendules à l’heure de tous les imbéciles qui disent « Et pourquoi, pensez-vous que la liberté d’un journaliste, c’est plus important que la liberté des autres ? » « Mon bon monsieur, n’ayez crainte pour votre redevance, c’est un peu plus subtil… »,ça permet de faire réaliser que la liberté de la presse est en grand danger actuellement en France et de voir avec regret, combien la notion de « savoir-faire français » est à re-préciser (!), re-idéaliser, débarrasser de bien de fagociteurs de tous poils, à libérer, en quelque sorte….