« J’avais promis des réformes dans mon discours d’investiture en 2000 mais les priorités ne sont plus les mêmes » explique Bachar Al Assad dans son discours d’aujourd’hui.
Il est sans ambigüité aucune que Bachar s’adresse à son peuple et non pas au monde.
Le monde attend la levée de l’état d’urgence et l’assouplissement du régime alors les syriens savent à peine ce que c’est, concrètement. Le leader se présente donc en syro/syrien et non pas en dictateur aux abois, soucieux de montrer son nouveau visage à l’occident (car pour nous "le monde" , c'est l'occident, n'est-il pas?)
Les priorités qu’il veut voir sont la stabilité et l’élévation du niveau de vie.
Que dire de cela?
Pour ce qui est de la stabilité, on le comprend…c’est la grande force de la Syrie et vouloir la préserver semble sage. Les syriens ne connaissent pas ce que c’est que « la guerre chez eux » et cela depuis vraiment fort longtemps. Ils sont fiers de cela et martèlent à qui veut l’entendre qu’ils sont allés au Liban parce qu’on leur a demandé, ce qui est un peu court, mais vrai.
Par ailleurs depuis la grande démocratisation de l’Irak, les irakiens affluent en terre syrienne.
Vu de l’intérieur du pays, il y a eu les irakiens …..puis les libanais lors des derniers évènements du Sud. La population syrienne leur a vraiment ouvert son pays et tout le monde était bien content d’avoir un cousin à Damas, a ce moment là.
Bachar, sait parfaitement qu’il parle à une population qui a ouvert son cœur aux voisins de l’Ouest et de l’Est, et qui partage encore son pain (voire son emploi) avec eux (par exemple à Hama, dont on pourrait s’étonner qu’elle est choisi de manifester pour et non contre lui.)
Pour ce qui est de l’élévation du niveau de vie, depuis 11 ans qu’il est là, elle a eu lieu, indubitablement. Quand le leader dit qu’il veut lutter contre le chômage, il est crédible et qu’il le fixe comme une priorité dans un pays où l’on a découvert avec lui les joies d’internet et du téléphone portable ne semble pas insensé.
« Quid des libertés? » a-t-on envie de lui envoyer dans le nez.
« La liberté ne vous fera pas manger » répond-il à sa façon….
C’est à la fois odieux et assez vrai, surtout quand on voit la faouda (le bordel, soyons clair) où sont depuis plus où moins longtemps ceux qui étaient censées montrer le chemin de ce qui reste pour le monde arabe, un nouveau concept…A ce titre d’ailleurs , il est clair que la très brillante intervention américaine chez le grand voisin, aide fort généreusement Bachar dans cette hardie prise de position. Jamais la démocratie ne s’est vu faire si mauvaise pub….
Alors, oui, on est un peu déçu dans notre logique occidentale mais on s’applique à se souvenir de nos longues années syriennes pour comprendre le message de Bachar « avec des yeux de l’intérieur » et l’on se dit que ce président là n’est point fou. Il évite scrupuleusement la posture « qui, dans l’urgence, rend des comptes à l’occident , grand juge du progrès dans le monde » et adopte celle d’un leader imposant son rythme, celui du défenseur de la Syrie et des soucis du monde arabe, passé inclus.
Le juger trop vite ne semblerait pas très malin.
Quand on sait comment les syriens "de la rue", méconnaissent et restent très suspicieux vis-à-vis de « l’homme occidental libéré » "de la rue" (qui lui rend bien!), on a du mal a détester tout à fait cet homme politique là.
Voyons ce qui se passera dans les jours prochains…