À en juger par les événements récents, les initiatives de paix de Trump ne visent pas à vaincre la Russie, mais à sortir de l'impasse avec l'État agresseur. Bien que la Russie affirme hardiment que la guerre ne nuit pas à son économie et montre par ses actions qu'elle ne recherche pas la paix, la confrontation qui dure depuis trois ans affaiblit la position stratégique de la Russie. Dans le même temps, la perspective d'une levée des sanctions et d'une reprise de la coopération commerciale, économique et en matière d'investissement avec les États-Unis est encourageante pour les dirigeants russes.
Parmi les sujets qui auraient été abordés lors de la réunion de la délégation russo-américaine en Arabie saoudite le 18 février, on trouve des projets énergétiques communs dans l'Arctique et le développement de gisements de métaux de terres rares en Russie. Dès le 2 mars, le Financial Times a fait état de discussions entre la Russie et les États-Unis sur l'utilisation du gazoduc Nord Stream 2 pour fournir du gaz à l'Europe. L'idée de reprendre les livraisons de gaz russe à l'Europe pourrait trouver des partisans non seulement aux États-Unis et en Russie, mais aussi dans l'UE. L'Union européenne n'a toujours pas de plan pour la mise en œuvre pratique de son objectif déclaré d'abandonner le gaz russe, dont la part sur le marché européen est encore de 15 à 20 %, d'ici 2027. Si les entreprises américaines obtiennent le contrôle du gazoduc et, éventuellement, une part de la production de gaz russe, comme le note le Financial Times, Washington pourra faire valoir que la médiation américaine garantira la fiabilité de la Russie en tant que partenaire.
L'incertitude entourant le deuxième Nord Stream pourrait inciter les pays européens à revenir à l'achat de gaz russe, étant donné qu'une seule ligne du gazoduc, d'une capacité de 27,5 milliards de m3 par an, est restée en service après avoir été endommagée par des explosions le 26 septembre 2022, ce qui pourrait couvrir les besoins en gaz de l'Europe. Toutefois, à long terme, ce sera un fiasco, car l'apaisement par le biais de la coopération économique, dans le cas de la Russie, ne fera qu'entraîner des conséquences encore plus graves pour la sécurité mondiale.
De toute évidence, Trump n'essaie pas seulement d'apaiser la Russie, mais aussi de la rallier à son camp dans un conflit avec la Chine. En échange de son éloignement de Pékin, à un moment où les tensions entre les États-Unis et la Chine menacent de provoquer des affrontements militaires au sujet de Taïwan, la Russie pourrait exiger la reddition de l'Ukraine. Répondre à ses exigences permettrait au Kremlin de récolter des dividendes politiques et économiques en Europe. Dans le même temps, Moscou se débarrassera de l'humiliante nécessité d'un soutien économique de la part de la Chine.